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Pas de miracle pour les Girondins, le club en redressement judiciaire

Après une semaine entrecoupée de hauts et de bas, la direction du Football Club des Girondins de Bordeaux ne s’est pas présentée devant la Direction nationale du contrôle de gestion (DNCG) pour son audition en appel.

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Pas de miracle pour les Girondins, le club en redressement judiciaire
Les Girondins s’éloignent du Stade Matmut

Le couperet est tombé ce matin mais de la manière la plus inattendue qu’il soit, comme souvent dans ce dossier. Le FC Girondins de Bordeaux, relégué administrativement en National, ne s’est pas présenté devant la Direction nationale du contrôle de gestion (DNCG) pour son audition en appel.

Le club a finalement jeté l’éponge et file maintenant vers un redressement judiciaire ainsi qu’un plan social. Face à cette situation, la DNCG pourrait même envoyer le mythique club en National 2 (4e division). Le FCGB perdrait alors son statut professionnel et devra dire adieu à son centre de formation et ses joueurs sous contrats.

« Le FC Girondins de Bordeaux accepte la sanction de rétrogradation administrative au sein du Championnat de National 1 pour la saison 2024/2025 et sera à nouveau convoqué pour présenter son budget devant la DNCG. La période qui s’ouvre doit permettre au FC Girondins de Bordeaux de revenir plus fort et au plus haut niveau. Le Club et son actionnaire assurent les supporters, et l’ensemble des parties prenantes, de leur volonté de protéger les intérêts du Club », livre le club dans un communiqué.

FCG-FSG : le match le plus long

Pourtant ce lundi 22 juillet, soit la veille de l’ultime passage du club bordelais devant la DNCG, l’espoir semblait de retour. Après avoir jeté l’éponge, Fenway Sports Group (FSG) était revenu à la table des négociations par le biais de son représentant et avait rencontré la Métropole pour négocier le loyer du Matmut-Atlantique (4,7 millions d’euros) et les créances (20 millions d’euros) selon le quotidien Sud Ouest. 

Dans la foulée, Bordeaux Métropole publiait un communiqué dans lequel la collectivité s’engage à voter en septembre la baisse du loyer et l’effacement de la dette contractée par le club.

« Au regard de l’urgence et dans la mesure où, pour sauver le club de la relégation sportive aux conséquences financières et sociales catastrophiques, un projet de reprise par FSG semble à ce jour la seule option envisageable, la présidente de Bordeaux Métropole a adressé un courrier au président du club s’engageant à soumettre à l’assemblée délibérante de septembre prochain un abandon de créance et une nouvelle proposition de loyer, plus adaptée à la Ligue 2 dans un premier temps. »

Mais il faut croire que cette intention ne vaut pas garantie aux yeux de l’investisseur américain propriétaire, entre autres, des Red Sox de Boston (baseball) et du fameux Liverpool FC (football). Quelques heures plus tard, une nouvelle information tombée dans la soirée a fait l’effet d’une douche de glace pilée : Fenway Sports Group n’ira pas jusqu’au bout de l’achat. Les Américains se désistent une seconde fois en une semaine.

Montagnes russes

Il faut avoir le cœur accroché chez les supporters Girondins. Alors que FSG se présentait comme l’ultime solution, son premier désistement avait semé la panique. Se profilait alors la confirmation de la rétrogradation en National prononcée par la DNCG puis la dégringolade en divisions inférieures… Voire même la disparition des Girondins de Bordeaux dans le pire des cas.

Jeudi 18 juillet, Gérard Lopez était (enfin) sorti de son silence et avait évoqué dans une interview accordée à l’AFP qu’il réfléchissait à plusieurs scénarios dont la refondation du club en National 2.

« Le premier est de trouver un partenaire de dernière minute. On a été approché par beaucoup de monde mais qui, malheureusement, n’ont pas les moyens. C’est l’option la plus optimiste au premier abord, mais boucher le trou maintenant ne serait que reporter le problème à plus tard, on l’a vu avec la non-montée. Pour un investisseur qui ne veut pas vendre de joueurs, l’investissement initial est de 200 millions sur les quatre ou cinq années à venir. S’il vend des joueurs, c’est 80 millions d’euros. La deuxième option, c’est la liquidation et la disparition du club. Enfin, il y a l’exemple du sauvetage de clubs avec passage dans des divisions plus inférieures, en se donnant deux-trois ans de pause pour reconstruire. »

L’actuel président-propriétaire des Girondins a reconnu une « situation critique » mais n’a évoqué, à aucun moment de l’entretien, la possibilité de remettre la main au pot et de signer le chèque de 42 millions d’euros.

De gauche à droite, Patrick, Sébastien et Logan, trois supporters des Girondins qui ne veulent plus de Lopez (ML/Rue89 Bordeaux).

« Une grosse perte »

Inquiets de la tournure que prenaient les événements, quelques supporters bordelais ont même tenté de lancer une mobilisation devant l’Hôtel de Ville, samedi 20 juillet, pour interpeller l’opinion publique. Ils étaient une petite cinquantaine.

« Si c’est un dépôt de bilan je les soutiendrais, je resterai attaché à ce club, promet alors Patrick, 55 ans, maillot floqué à son nom. Pour sauver le club il y a trois ans, on avait que Lopez, on était bien obligé de le prendre. Mais là il faut qu’il parte. Ce que je lui reproche c’est d’avoir mis Admar Lopes comme recruteur. C’était catastrophique dès la première année. »

« Pour la ville c’est une très grosse perte, c’est une institution, c’est l’un des plus beaux clubs de France », racontait, les larmes aux yeux, Sébastien, 46 ans, dont 40 en tant que supporter. Il se souvient, la gorge serrée, de la finale de Coupe de France en 1987. Les Girondins tenants du titre s’impose 2 à 0 face à Marseille. Mais tout ceci semble loin.

« Je pense que c’est fini. Qu’on soit en National 1 ou 2, ce sera sans Gérard Lopez. Autrement on le fera partir. »

« Sans Lopez »

« Gérard Lopez, j’en veux plus, quelque soit le projet. Pour moi, Bordeaux est tombé avec la vente de M6… Mais l’idéal maintenant c’est une descente en National 2 avec le tribunal de commerce qui s’en mêle et que Lopez se fasse virer », expliquait Logan, 20 ans, t-shirt siglé Ultras sur les épaules. Il avait l’intention de s’encarter cette année auprès des Ultramarines, le plus grand groupe de supporters du FCGB.

« Je supporterai mon club même après, je lâcherai pas mon club peu importe la division dans laquelle il va tomber. »

Le maire Pierre Hurmic qui est venu à leur rencontre, a voulu leur adresser un message de soutien, faute de pouvoir rassurer.

« Je leur ai dit que je resterai mobilisé. Même si mes marges de manœuvres sont dérisoires. Repartir en National 2, c’est le pire. Il faudra des années pour revenir dans l’élite du football français. On aidera le club à se reconstruire. On a fait un effort quant Lopez est arrivé avec un prix de location du Haillan de l’ordre de 10% de sa valeur. Quant aux salariés, je suis en contact avec le directeur général délégué, Thomas Jacquemier. Les premières victimes ça va être le personnel, il y aura des pertes d’emploi. Il faut conserver encore un tout petit peu d’espoir. »

Mais la partie de poker semble cette fois-ci pliée. Et comme l’an passé, la saison se termine sur un tapis… vert. 

Pierre Hurmic défend une refonte du modèle du club

Comme la semaine passée, Pierre Hurmic a réagi à ce nouveau rebondissement. Devant la presse, le maire de Bordeaux, qui s’est dit « attristé » par la rétrogradation, souhaitait affirmer son soutien aux Girondins qui « font partie du patrimoine immatériel de Bordeaux ». Il a insisté sur la nécessité d’une refonte en profondeur du modèle et de l’identité du club :  

« Je constate aussi un échec de la gouvernance et d’un modèle économique à bout de souffle. On s’en est encore rendu […] Les collectivités locales sont exclusivement perçues comme des partenaires des dettes et déficits. Et nous pouvons accompagner davantage de dérives de ce type. Ce modèle doit porter vers plus d’horizontalité dans sa gouvernance mais également se tourner davantage vers son centre de formation et son territoire. »

Selon lui ce nouveau modèle à inventer réunirait les supporters, les anciens joueurs, les acteurs économiques locaux, les salariés, les collectivités… Une « association à la gouvernance » comme le permettrait une coopérative ou une SCIC. « Des réflexions sont en cours actuellement sur ce thème-là » assure l’édile qui cite des personnes intéressées pour contribuer à cette refondation comme l’avocat bordelais Thibault Laforcade.

« Il faudra quelques garde-fous »

À la question de savoir si l’avenir des Girondins se jouera avec ou sans Lopez, Pierre Hurmic refuse de trancher :

« Le propriétaire actuel jusqu’à nouvel ordre c’est Gérard Lopez, il est difficile de faire sans lui […] On sera plus rigoureux et vigilants quelque soit le futur partenaire. Il faudra quelques garde-fous. »

Le maire bordelais réitère comme la semaine dernière sa position vis à vis du format « extravagant » et inadapté du stade Matmut Atlantique : 

« On s’est engagé pour 30 ans avec ce partenariat public-privé. Il va falloir se rapprocher de SBA très vite, s’il n’y a pas de de club résident. C’est un modèle qui a failli. C’était prévisible. Ça nous coûte déjà très cher avec un loyer qui n’est plus payé. Il vaut mieux un locataire avec un loyer baissé et des efforts concernant l’arriéré que pas de locataire du tout. Ce sont les contribuables qui financeront le PPP et les loyers impayés ou baissés. »

Le Haillan c’est un loyer de 28 000 euros par an contre 300 000 euros en temps normal. Plus question de faire de cadeau ? Il « va falloir ré-interroger cette situation ». Néanmoins la ville va tout faire pour conserver un centre de formation dont « Bordeaux a besoin ».  Le maire a glissé qu’il y aura de toute évidence « des investisseurs » qui se montreront intéressés si le FCGB descend en National…


#Girondins de Bordeaux

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