Depuis le 6 février 2024, l’association Mémoires & Partages fait les frais de la décision de la cour administrative d’appel de Bordeaux sur l’affaire du quartier La Négresse à Biarritz.
« Soient vous arrêtez vos conneries soit je règle les choses adresse familles. … ce sera dans le Coffre et hop dans l’Adour. J suis payé pour ça…bande de fils de pute. Ça va saigner…je vais vous pourrir la vie. J’ai vos plaques d’immatriculation, vos adresses…Je suis pas sûre que la police vous protégera…. moi par contre suis ope et payé bonne chance »
Des menaces comme celle-ci, il en arrive des dizaines chaque jour dans la boîte mail de l’association depuis que la cour administrative d’appel de Bordeaux lui a donné raison sur le changement de nom de La Négresse, jugeant l’appellation « sexiste et raciste », « de nature à porter atteinte à la dignité de la personne humaine », et « comportant un caractère offensant à l’égard des personnes d’origine africaine ».
« Des menaces explicites et inacceptables »
Dans ce dossier, Mémoires et Partages ne s’est pas fait que des amis. Nombreux sont les opposants au changement de nom, à commencer par les habitants du quartier en question. Certains affirmaient en janvier au micro de nos confrères d’Ici Pays Basque que « c’est comme ça qu’elle était nommée à l’époque, en le reprenant, cela ne fait pas de nous des racistes ! ».
Effectivement, au XIXe siècle, ce sont les soldats napoléoniens qui auraient donné ce nom au quartier en hommage à la femme qui tenait alors l’auberge du quartier.
Parmi les mécontents, certains n’ont pas hésité à s’en prendre directement à l’association bordelaise en postant de nombreux commentaires haineux sur les réseaux sociaux, allant même jusqu’à proférer « des menaces explicites et inacceptables » par mail à l’encontre des membres de Mémoires & Partages et de leurs familles.
« J’estime que le travail que nous faisons est un travail honnête et on comprend la difficulté qu’il y a peut-être à Biarritz à admettre qu’une appellation comme celle-ci soit qualifiée de raciste, notamment par la justice, mais j’étais loin de m’imaginer qu’après cette décision de justice impartiale et incontestable on pourrait subir de telles violences », s’émeut Karfa Diallo.
Protection fonctionnelle
Dans un communiqué de presse de ce mercredi, l’association Mémoires et partages considère que son directeur, conseiller régional (Les Ecologistes) de Nouvelle-Aquitaine, « devrait bénéficier de la protection fonctionnelle à laquelle les élus locaux ont droit », afin de prendre en charge des frais de justice par la collectivité.
Elle s’indigne par ailleurs que « le Rassemblement national s’affiche solidaire du maintien des stéréotypes racistes ». Dans un tract, le parti d’extrême droite dénonce en effet la « soumission juridique à une idéologie déconstructiviste ».
Enfin, Mémoires et Partages demande à la maire de Biarritz, qui a fait signer un Cahier de doléances contre la décision de la cour administrative d’appel, de « cesser d’entretenir ce climat de défiance ». L’association bordelaise souhaite que le quartier retrouve son nom basque, Harausta.
Climat de défiance
Le fondateur et directeur de l’association a choisi de porter plainte à titre personnel contre X pour menaces de mort et pour outrage sur personne chargée d’une mission de service public ; en tant qu’élu régional, il bénéficie d’un régime de protection s’apparentant à la protection fonctionnelle. Quant à elle, l’association porte plainte contre X pour cyberharcèlement et menaces de mort. L’avocat de Mémoires et Partages doit également saisir le Procureur dans les prochains jours.
« Il faut que la maire de Biarritz cesse d’entretenir ce climat de défiance, les conséquences en sont imprévisibles, ajoute Karfa Diallo. On sait bien comment le fait de voir les élus contester des décisions de justice peut nourrir, encourager certains comportements violents, que ce soit par mail ou bien physiquement. »
Car du côté de Biarritz, Maider Arosteguy freine des quatre fers sur le sujet. Dans son arrêt du 6 février, la cour administrative d’appel de Bordeaux annulait deux délibérations de la mairie de Biarritz ayant attribué le nom de « La Négresse » au quartier. La municipalité Biarrotte avait alors formulé une requête demandant à la cour de revenir sur cet arrêt au motif que la première délibération de la Ville n’existait pas. Le délibéré sera rendu le 17 avril prochain.
Contactée, la mairie de Biarritz n’a pas répondu à nos sollicitations.
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