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Procès en appel de la ratonnade de Saint-Michel : trois robes noires identitaires au secours des nationalistes bordelais

Pierre‑Marie Bonneau, avocat impliqué politiquement dans l’extrême droite, Mathieu Sassi, avocat engagé dans les dossiers nationalistes, et Jérôme Triomphe, avocat militant d’une extrême droite catholique s’invitent au procès en appel qui se tient ce 19 et 20 juin pour obtenir la relaxe des militants de feu Bordeaux nationaliste, auteurs d’une ratonnade en juin 2022 dans le quartier de Saint-Michel.

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Procès en appel de la ratonnade de Saint-Michel : trois robes noires identitaires au secours des nationalistes bordelais
Pierre‑Marie Bonneau, Mathieu Sassi et Jérôme Triomphe

Ils viennent au secours de leurs camarades. Maîtres Pierre‑Marie Bonneau, Mathieu Sassi et Jérôme Triomphe sont les nouveaux défenseurs des prévenus qui ont fait appel de leurs condamnations prononcés le 16 mai 2023 par le tribunal correctionnel de Bordeaux pour des faits de violence aggravée et d’outrage sexiste en réunion, ayant eu lieu dans la nuit du 24 au 25 juin 2022, dans le quartier Saint-Michel.

N’ayant pas été présents lors du premier procès, ces avocats seront là ce 19 et 20 juin pour défendre cinq des six militants d’extrême droite (un n’avait pas fait appel et un autre autre s’est désisté), qui avaient écopé de peines allant jusqu’à 2 ans de prison, dont un an avec sursis.

Les audiences des 23 et 24 mars avaient révélé des militants aux parcours divers réunis par une idéologie identitaire et conservatrice à peine assumée pour certains, et pleinement revendiquée par d’autres. Parmi ces derniers, Yanis Iva, fondateur de la Bastide bordelaise et candidat aux dernières législatives, condamné en 2023 pour des provocations lors de la Marche des fiertés en 2022.

Maître Pierre‑Marie Bonneau l’ultranationaliste

Avocat au barreau de Toulouse, Me Pierre‑Marie Bonneau, surnommé « Pilou », incarne depuis plusieurs décennies l’alliance entre le militantisme ultra-nationaliste et l’engagement juridique. Il a débuté comme cadre au sein du GUD, puis de l’Œuvre française – dissous en 2013 – avant de rejoindre Les Nationalistes, parti fondé par Yvan Benedetti.

Son cabinet est vite devenu le refuge des figures les plus radicales : il défend régulièrement des négationnistes comme Robert Faurisson, des ultranationalistes comme Boris Le Lay, ou l’antisémite Alain Soral. Sa réputation est telle que la mouvance extrémiste fait souvent appel à lui dans des affaires violentes ou politiquement sensibles, parfois sans qu’il facture d’honoraires.

Sa méthode : une défense politique assumée, plus orientée vers la visibilité idéologique que le pur droit. Lors du procès pour coups graves à Nantes – l’affaire Du Chaffault –, il a minimisé la responsabilité de jeunes identitaires dans une plaidoirie qualifiée d’ »à vomir ». Il critique régulièrement les juges, policiers ou médias, dénonçant une « répression politique » contre la mouvance nationaliste.

Bonneau animateur et conférencier

Militant jusqu’au bout de sa robe, Pierre‑Marie Bonneau n’hésite pas à animer des conférences dans des cercles d’extrême droite. En février 2023, il prononçait un discours sur les « lois anti-nationalistes » devant des sympathisants. Il s’est aussi porté candidat en tête de liste aux élections européennes 2024 pour « Forteresse Europe », avec un programme prônant la sortie de l’UE et de l’euro, la remigration, l’abolition de l’IVG, de la PMA, et du mariage pour tous.

Sa pratique politique va au-delà du droit. Il se distingue par sa présence sur la scène internationale – notamment à des commémorations néofascistes en Bulgarie ou Roumanie – et par l’usage des réseaux sociaux et des médias bien au-delà de son cabinet. En avril 2023, il a été victime d’une agression à Toulouse, revendiquée par un groupe antifasciste, incident qu’il a qualifié de « dangereux », tout en assurant que ses camarades « ne font pas ça ».

Pierre‑Marie Bonneau s’affirme ainsi comme une figure militante, déterminée à faire valoir ses convictions dans tous les arènes – juridique, politique et médiatique.

Jérôme Triomphe, sauveur de l’extrême droite catholique

Au barreau de Paris, Me Jérôme Triomphe s’est fait un nom en défendant des causes associées à l’extrême droite et aux cercles catholiques traditionalistes. Il est notamment l’avocat habituel de Civitas, association intégriste revendiquant la « Royauté sociale du Christ », et de l’AGRIF (Alliance générale contre le racisme et pour le respect de l’identité française et chrétienne).

Fortement impliqué dans l’affaire Vincent Lambert, il s’est opposé avec véhémence à l’arrêt de l’hydratation et de l’alimentation du patient, estimant que l’État bafouait les droits fondamentaux. Sa palette militante couvre également les combats contre le mariage homosexuel : il a défendu des membres de La Manif pour tous à l’occasion d’interpellations policières, intervenant publiquement, Code pénal à la main, pour obtenir leur libération. Il s’est aussi illustré en plaidant devant la Cour d’appel pour le compte de Civitas, et a traité de « surréaliste » la répression policière à l’encontre de jeunes pro-LMPT.

Son engagement dépasse également les prétoires : il multiplie les discours dans les cercles conservateurs et catholiques, souvent aux côtés de figures identitaires, et n’hésite pas à faire le lien avec des médias étrangers. Il a par exemple loué le travail de la radio russe La Voix de la Russie, vue comme un espace de contestation face à « la dictature des homosexuels ».

Mathieu Sassi, maître des dossiers nationalistes

Me Mathieu Sassi, inscrit au barreau de Paris (17ᵉ), exerce depuis fin 2023 en droit pénal général et des affaires, combinant conseil à des chefs d’entreprise et interventions en contentieux politique. Il intervient dans des affaires impliquant des jeunes identitaires. Il a notamment défendu des prévenus impliqués dans les incidents de Romans‑sur‑Isère (novembre 2023), plaidant un « groupement pacifique » victime d’ « arrestations arbitraires » et de « campagnes de fichage » orchestrées par les services de renseignement.

À l’audience, il conteste vigoureusement les procédés policiers, dénonçant des « méthodes déloyales ». Il s’insurge que ses clients, « jeunes qui défendent une certaine idée de leur pays », soient « espionnés » et « nassés » sans recours.

Au-delà des prétoires, Me Sassi articule ses interventions comme une tribune politique : sa défense est souvent présentée comme une résistance à ce qu’il décrit comme une « répression des idées nationalistes ». Il relaye cette posture dans les cercles identitaires, y compris via les réseaux sociaux, ou sur des sites comme Boulevard Voltaire.

En force pour la relaxe

Maîtres Pierre‑Marie Bonneau, Jérôme Triomphe, et Mathieu Sassi espèrent peser sur les débats là où leurs confrères ou assistants – Maître Emile Tribalat, remplaçant de Pierre-Marie Bonneau en 2023, Maître Aurore Le Guyon, et Maître Gaessy Gros – avaient échoué à obtenir la relaxe.

Les trois nouveaux ténors n’ont pas l’intention de faire le voyage pour rien. En face, la partie civile parle déjà d’une défense sur « un terrain politique », forcément plus propice à l’air du temps.


#extrême droite

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