Drone : la centrale nucléaire du Blayais sous tension
Après le survol de la centrale du Blayais par un drone, EDF et les représentants des pouvoirs publics ont été mis sur le grill par la Commission locale d’information nucléaire. Mais celle-ci n’a pas eu de réponses sur la prolongation pour 10 ans du réacteur 1 ou sur la qualité des eaux rejetées dans l’estuaire. La zone de protection autour de la centrale fait aussi débat.
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« C’est un phénomène sûrement concerté », du fait de la simultanéité des vols de drones au dessus de 7 centrales nucléaires, estime Jacques Maugein, conseiller général et président délégué de la CLIN.
« Depuis quelques jours nous sommes la risée du monde entier, qui voit nos centrales visitées tous les jours par des drones, attaque Stéphane Lhomme. Nous sommes anéantis en particulier à Tchernoblaye, où nous étions si fiers de notre énergie nucléaire. »
OVNI contre colosse
Rappel des faits de Pascal Pezzani, directeur de la centrale du Blayais :
« Le 13 octobre les équipes de la centrale ont détecté une aéronef pouvant être assimilé à un drone. (…) Le peloton de gendarmerie du site est intervenu et s’est rendu sur les lieux immédiatement. Ce vol n’a eu aucune conséquence sur la sûreté, la sécurité et le fonctionnement du site. La direction a déposé plainte à la gendarmerie de Blaye. Une enquête est en cours et d’autre part les points vitaux sont protégés et ces drones ne mettent pas en danger nos points vitaux. La sûreté et le fonctionnement des installations n’ont jamais été mis en cause par ces drones. »
Stéphane Lhomme n’est évidemment pas d’accord : ces OVNI peuvent selon lui « fureter » au Blayais, « prendre des images extrêmement précises des points les plus vulnérables – arrivées des systèmes de refroidissement des réacteurs, piscines de combustibles… » – qui pourraient servir à « des drones plus puissants pourvus de charges explosives ».
« On s’aperçoit que le parc nucléaire, déjà un colosse aux pieds d’argile face aux menaces climatiques, l’est désormais face à évolution des technologies et leur démocratisation. »
« A qui profite le crime ? »
Un autre militant anti-nucléaire lance depuis la salle que les centrales connaissent déjà « des surcouts de maintenance industrielle. Si on ajoute des surcoûts de sécurité, où c’est qu’on s’arrête ? Mettons plutôt l’argent sur la déconstruction, car on n’aura jamais de centrales capables d’arrêter des drones ».
Jugeant au contraire que la sécurité doit être une priorité dont les surcoûts ne doivent pas être subordonnés à d’autres actions centrales, Florion Guillaud, trésorier du CLIN, interroge EDF sur « les mesures que compte prendre l’entreprise sous la responsabilité de l’Etat, et dans quels délais. » Mais il n’obtient pas de réponse…
Dans la salle, une voix accuse les anti-nucléaires de télécommander les drones :
« A qui ça profite ? demande Emmanuel Moulin élu à la communauté de communes de Saint Savin. Les vols de drones ne sont-ils pas orchestrés afin de diaboliser un peu plus le nucléaire, afin de peser sur la loi de transition énergétique actuellement en débat au Parlement ? »
« A qui profite le crime ? » reprend en chœur Jacques Maugein, puis d’autres élus locaux, en aparté des débats.
« Il y a sans doute une relation avec le vote sur la sortie du nucléaire (en fait, sa réduction dans le mix énergétique français, NDLR) et les énergies nouvelles, juge également Michel Rigal, maire de Braud Saint Louis. Jusqu’à présent on voyait le côté positif des drones, sans penser à des fins plus inquiétantes. J’espère que cela n’est qu’une façon d’interpeller, de mettre en garde la centrale et l’Etat, et qu’on en reste là. Auparavant Greenpeace avait utilisé une aile volante, on est passé à un nouveau stade… »
Mais globalement, la confiance règne chez les édiles du cru :
« On n’est jamais armés contre nouvelles agressions, mais la centrale est plus armée que le marché de Blaye », estime Bernard Bailan, maire d’Eyrans, pour comparer deux cibles éminemment stratégiques.
En tous cas, les drones ne risquent pas de changer la donne pour des élus de communes copieusement arrosées par EDF : la manne s’élève à 60 millions d’euros par an pour la Gironde, et 7,5 millions pour le seul village de Braud Saint-Louis, 1500 âmes, sur laquelle se trouve la centrale. Soit 5000 euros par habitant…
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