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Traîné en justice, le TnBA pourrait baisser le rideau

Comme d’autres centres dramatiques français, le théâtre national de Bordeaux n’applique pas un accord sur l’emploi direct de comédiens. Les syndicats du spectacle réclament 355 000 euros au TnBA, qui, s’il est condamné, pourrait fermer plusieurs mois.

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Traîné en justice, le TnBA pourrait baisser le rideau

Avec 14 Centres dramatiques nationaux (CDN), le Théâtre national de Bordeaux Aquitaine (TnBA) est assigné devant le tribunal de grande instance de Paris par le Syndicat français des artistes interprètes SFA-CGT, rejoints par FO et la CFDT.

Ceux-ci réclament 8 millions d’euros pour non-respect d’un accord de 2003 qui les engage à un certain volume d’emploi des artistes interprètes, ont révélé lundi les 15 théâtres lors d’une conférence de presse à Paris. Après des mois de négociations infructueuses avec les syndicats, ils ont décidé, avec le Syndeac qui les représente, de révéler les conséquences potentiellement désastreuses de ce conflit :

« Pour le TnBA, cela représente 355 000 euros, autant dire 5 mois de fermeture complète du théâtre avec l’ensemble des équipes techniques, ce qui voudrait dire que la programmation de l’automne serait annulée », indique à Rue89 Bordeaux Nadia Derrar, secrétaire générale du TnBA.

Si fin février ou début mars – la date n’est pas encore arrêtée –, le TGI donne tort aux CDN, ce serait le dépôt de bilan pur et simple pour certains d’entre eux, auxquels les syndicats du spectacle réclament jusqu’à 896 030 euros. Avec quels scénarios ?

« Soit le SFA-CGT est débouté, soit le juge décide que l’accord doit être appliqué, poursuit Nadia Derrar. Et même si nous faisons appel, nous devrons provisionner cette somme. Cela voudra dire pas de programmation propre, et pas de co-production cet automne. »

Absurde

L’accord de 2003 prévoit que les 38 Centres dramatiques nationaux, fers de lance de la décentralisation théâtrale, doivent affecter à l’emploi direct de comédiens 40% de leur budget artistique. En outre, ce volume d’emploi doit correspondre à 25% du nombre d’heures travaillées par les autres professions du théâtre (techniciens et administratifs).

Les théâtres jugent cet accord « absurde », car il ne tient pas compte de l’évolution de l’emploi des artistes et de l’intermittence. Les CDN n’emploient pas de troupe permanente mais soutiennent en co-production des compagnies indépendantes, ce qui est moins favorable pour le calcul des heures de travail.

« Il n’y pas pratiquement plus de comédiens dans les CDN et même les plus vertueux (le TNP de Villeurbanne, par exemple, a sa propre troupe, NDLR) n’arrivent pas a respecter cet accord obsolète », souligne la secrétaire générale du TnBA.

« Mission de diffusion »

Le théâtre bordelais n’emploie ainsi directement qu’un seul comédien permanent, également directeur pédagogique du TnBA. Et sur 31 spectacles programmés lors de la saison 2016-2017, 3 sont des productions « maison ».

« Nous sommes la seule scène nationale de Bordeaux, et la Ville est plus attachée à notre mission de diffusion que de création, ce qui complique la situation, ajoute Nadia Derrar. Ce sont donc les compagnies indépendantes, dont les CDN sont les premiers employeurs, qui risquent de le payer très cher. »

Rue89 Bordeaux n’est pas parvenu à joindre de représentants locaux du SFA-CGT. Interrogé par l’AFP, son délégué général Denys Fouqueray, juge lui cet accord « tout à fait positif » :

« Si les CDN estiment qu’ils n’ont pas les moyens de l’appliquer, ils n’ont qu’à se retourner contre l’État qui a assisté à la négociation. »

Sans en être signataire… Au TnBA, on s’étonne d’ailleurs du « mutisme » du ministère de la Culture, qui semble « considérer que c’est un problème technique qui doit se régler entre nous ». Et si possible en coulisses.


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