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Sexe sans tabou pendant une semaine à Bordeaux

C’est la Saint Valentin, si on parlait cul ? Ça tombe bien, X.Y. Sex, la semaine de la sexualité, commence ce vendredi à Bordeaux. Organisée par Aides, l’association de lutte contre le sida, elle offre une occasion rare et festive de débattre sans tabou des pratiques sexuelles. Entretien avec Raphaël Seine, de Aides Gironde.

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Sexe sans tabou pendant une semaine à Bordeaux

X.Y. Sex, la semaine des sexualités, du 14 au 22 février à Bordeaux (logo/Aides)
X.Y. Sex, la semaine des sexualités, du 14 au 22 février à Bordeaux (logo/Aides)
Raphaël Seine, de Aides Gironde (DR)
Raphaël Seine, de Aides Gironde (DR)

Rue89 Bordeaux : Quel est l’objectif de cette semaine de la sexualité ?

Raphaël Seine : On ne peut plus désolidariser la question de la prévention des risques (sida, hépatites) de la vie sexuelle. Lorsqu’on se rendait dans des saunas gay, on se prenait des portes au nez car les gens avaient l’impression qu’on allait les contraindre ou leur faire la morale. On ne peut donc plus se contenter d’encourager à mettre des capotes, il faut comprendre pourquoi certains ont des conduites à risques. Pour beaucoup de personnes, c’est parce qu’elles sont discriminées, isolées ou enfermées dans des tabous : certains gays, prostitué(e)s, transsexuels ou migrants sans papiers ne vont pas parler de leurs pratiques sexuelles à des médecins parce qu’ils ont honte ou parce qu’ils n’ont pas accès aux soins pour des raisons administratives. Il y a danger lorsqu’on n’ose pas parler de sexe anal ou de sadomasochisme, mais qu’on le fait quand même sans précautions. Lors de cette semaine, nous leur proposons d’en discuter et de parler ainsi de santé sexuelle.

Comment se passent ces échanges ?

Le défi consiste à faire prendre la parole aux gens en public, mais ils sont ensuite heureux de constater qu’ils ne sont pas les seuls à se poser les mêmes questions. On le fait donc dans des lieux conviviaux, des bars ou des salles de spectacle (La Tanière, l’Ours marin, le Girofard), on part d’interventions de comédiens ou d’expos. Par exemple, nous présenterons des photos sur « le sexe en transe » et débattrons ensuite avec l’association Trans3.0 de ce qui se transforme concrètement chez quelqu’un qui s’est fait opérer, comment cela se passe avec des partenaires non trans. Nous proposerons aussi une soirée « désir, couples et (in)fidélités », car le souci N°1 des gens en situation d’adultère mais qui aime leur partenaire, c’est de continuer à garder leur libido et leur désir. Que faire de ses fantasmes ? Comment garder sa santé mentale et physique si on va voir ailleurs ? Quel recours à la pornographie ou au triolisme (sexe à trois) ?

Qu’est ce qui intéresse le plus les participants ?

La parole se libère beaucoup lorsqu’on parle de pratiques concrètes : gorge profonde, pratiques sadomasos, éjaculation… On le fait bien sûr dans un cadre de bienveillance, sans prosélytisme pour telle ou telle pratique – on est pas là pour dire aux gens s’il faut se faire sodomiser ou pas ! Mais on veut aussi ouvrir la discussion à l’environnement de la sexualité, avec par exemple cette année un échange sur les croyances religieuses et la santé sexuelle.

La santé sexuelle, victime d’un « plan social caché »

Malgré le succès de X.Y Sex – 650 participants en 2011, 1000 l’an dernier – avez-vous rencontré des hostilités ?

Avec les manifs contre l’IVG et le mariage pour tous, les débats sur la pseudo « théorie du genre » et finalement sur l’égalité homme femme, le climat actuel va à l’encontre de ce qu’on défend, c’est à dire l’acceptation de toutes les sexualités. On lutte contre cette chape de plomb, même si ce n’est pas facile dès qu’on touche à l’intime. Mais Bordeaux est une ville ouverte et détendue, malgré l’agression du centre LGBT du Girofard, lors de la venue de Christiane Taubira.

Le programme de la semaine est aussi festif. Que recommandez vous ?

Ce vendredi pour l’inauguration, nous aurons le plaisir d’avoir the Doctors, un groupe électro post-punk qui monte à Bordeaux. Les Bustic Plaster, de Toulouse, feront une performance complètement déjantée, entre le théâtre et le concert. Ça c’est pour la soirée de clôture, notre grande boum qui sera le seul événement payant de la semaine, et qui permet de la financer.

Êtes vous confrontés à des difficultés ?

Nous avons un gros problème de budget avec la baisse des aides publiques de 10% à 15% chaque année. Résultat : Aides supprime 45 postes en France, et nous sommes en grève ce vendredi, même si à Bordeaux cela concerne des personnels externes (formation, communication) auxquels nous ne pourrons plus faire appel. Rappelons que le point Sida Info Services a fermé à Bordeaux. Malgré notre mission de santé publique, les associations sont victimes d’un plan social caché, 40 000 à 50 000 postes qui disparaissent tous les ans.


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