La reconversion passe par le salon des « Profession’L »
Ce jeudi 15 mai, les talons des « Professionn’L » vont à nouveau retentir sur les parquets de la mairie de Bordeaux, pour la seconde édition du salon de la reconversion 100% féminin. Fortes d’un premier succès le 8 mars 2013, à l’occasion de la Journée de la Femme, Valentine Bardinet et Sandrine Valette remettent le couvert, et en grande pompe, dans les salons de l’Hôtel de ville.
Objectif : accompagner les femmes qui souhaitent donner un nouvel élan à leur carrière, ou changer de cap, notamment les jeunes mamans. Selon Valentine Bardint, l’heureux évènement d’une maternité peut aussi se muer en de très bonnes opportunités professionnelles par la suite :
« Au départ, c’est à ces femmes là que l’on s’adressait mais nos visiteuses ont des profils extrêmement variés. On a des toutes jeunes mamans qui veulent changer leur façon de travailler. Ou bien plus tard, lorsque les enfants ont grandi et qu’elles sont plus disponibles, elles se demandent quelle direction donner à leur carrière. Mais on a aussi beaucoup de femmes âgées pleines d’énergie et qui veulent mettre à profit leur expérience en se lançant dans l’entreprenariat. On est là pour les aider à franchir ce premier pas. »
1000 visiteuses en 2013
Le salon « Professionn’L » démarre à 9h30. Au menu de la journée : conférences, partages d’expériences, témoignages, coachings individuels… Les exposants sont organisés autour de quatre pôles thématiques – formation, recrutement, création d’entreprise et accompagnement individuel.
« Cette année, on a essayé d’avoir plus d’offres d’emploi malgré les difficultés économiques que l’on connaît, poursuit Valentine Bardinet. Un espace est réservé à Pôle Emploi, qui peut apporter des réponses sur la recherche ou la création d’emploi et sur les aides existantes, comme celles pour le bilan de compétence. On a aussi essayé de développer le pôle création, qui a attiré beaucoup de monde l’année dernière et notamment les réseaux commerciaux franchisés qu’on va mettre en avant aujourd’hui. »
Soutenues par la mairie, les organisatrices espèrent faire mieux que la précédente édition, qui a attiré 1000 personnes. Mais elles ont sans attendre déjà pris date pour l’année prochaine. Rendez-vous le 8 mars 2015.
On ne badine pas avec les « Drôles d’entrepreneurEs »
Toute l’année, une autre association, les Drôles d’entrepreneures, accueillent et reçoivent aussi toutes celles qui souhaitent créer leur activité. Ce club promeut en effet l’esprit d’entreprise et l’entreprenariat au féminin. Selon Nathalie Dujardin, présidente de l’association, c’est « un succès » : le club compte aujourd’hui 180 adhérentes et leur réseau, 700 membres.
Profils : de femmes chefs d’entreprise (pour 55% de moins de 10 salariés), des porteuses de projets. Officialisé le 8 mars 2011, par un « flash mob » organisé sur la place Pey-Berland, le club a tout de suite créé un véritable appel d’air.
« Ce jour-là, plus de 100 femmes sont venues. On s’est aperçues qu’il y avait un vrai besoin pour elles de se retrouver, non pas pour se mettre dans un ghetto avec des intentions féministes, loin de là, mais pour s’entraider sur la création d’entreprises. D’ailleurs lorsqu’on a créé le club, on n’était pas très bien vues : les gens ont imaginé qu’il s’agissait d’un club de filles où s’organisait des réunions Tupperware ou bien qu’on tricotait ! »
Stéréotypes sexistes
Depuis 2008, Nathalie Dujardin est indépendante, à la tête de son entreprise de communication, Beedigitale. Elle avait auparavant été salariée pendant 15 ans dans des très petites entreprises. Elle dit n’avoir alors jamais été victime de discrimination ni d’inégalité de salaire, des problèmes qui d’après elle se rencontrent davantage dans les grandes entreprises.
« Nous sommes néanmoins la cible d’autres problématiques et notamment des stéréotypes sexistes, qui rendent difficile l’accès à la création d’entreprise, d’où la création de notre club ».
Jade Buisson et Elise Noyer, toutes les deux 26 ans, ont notamment rencontré quelques difficultés pour créer leur agence de communication éco-responsable à Bordeaux, l’Agence Root, en 2014 :
« En tant que jeune créatrice d’entreprise, on se sent souvent inférieure lorsqu’on tente de remettre en question vos compétences. Par exemple, avec les banques, on a essuyé 15 refus pour lancer notre projet, en raison de notre jeune âge, du fait qu’on est une femme et qu’on n’aurait pas ce qu’il faut pour tenir les rênes. »
En créant ce club, Nathalie, Laëtitia et Sophie veulent donc prouver que les « self-made-women » existent.
« On a remarqué que l’on n’est pas forcément prises au sérieux dans des réunions très masculines, de réseaux tels que le MEDEF, le CGPME, ou bien dans des clubs d’entreprises majoritairement constitués d’hommes, explique Nathalie Dujardin. Les femmes qui entreprennent ont une autre vision des affaires, mais ça ne veut pas dire qu’elles sont moins compétentes. Ce sont d’abord des passionnées davantage motivées par le contenu de leur métier que par la volonté d’aller chercher des chiffres et des résultats, même si elles y sont aussi très attentives. »
Le sexisme est fréquent dans certaines entreprises, estime Jade Buisson, ancienne salariée d’une boîte de com’ :
« On me mettait toujours en avant face aux hommes parce qu’ils ne sauraient jamais dire non aux femmes. C’est un peu discriminatoire. Au quotidien, on ne fait pas attention, mais quand ça devient récurrent et qu’on vous dit : “Allez au devant les clients, ce sont trois hommes, ça va marcher !”, je réponds : “Non, non, non ! Vous me choisissez parce que j’ai des compétences et non parce que je suis une femme et que je vais mettre une mini-jupe”. »
En devenant membres du réseau des Drôles d’entrepreneurEs depuis décembre 2013, Jade et Elise y ont trouvé tout ce qu’il fallait pour lancer leur entreprise (échanges, conseils, expertises), dans une ambiance que Jade aimerait qualifier de « normale ».
« Entre femmes, on a une autre vision des affaires : on va plus partager et s’entraider. Or quand on commence, on a besoin de soutien. Et l’autre avantage de ce réseau, c’est que ça nous a permis d’avoir des contacts. Comme elles étaient bien implantées, ça nous a permis aussi d’obtenir de la clientèle et de développer notre marché. »
Les entreprises aquitaines bonnes élèves de l’égalité homme-femme
Depuis la parution du nouveau décret sur l’égalité professionnelle, du 19 décembre 2012, les entreprises de plus de 50 salariés doivent dorénavant respecter leurs obligations en matière d’égalité professionnelle sous peine de sanctions financières.
Brigitte Faulquier, permanente de la Mission Egalité Aquitaine, créé en 2005 à l’initiative de la Délégation régionale aux droits des femmes et de l’égalité et de la Direccte, présente ce dispositif.
« S’il s’agit d’une obligation morale pour les petites entreprises de moins de 50 salariés, le décret impose des obligations très cadrées pour les entreprises de plus de 50 salariés. Le but c’est de parvenir à un accord. Quand un accord n’est pas possible, le chef d’entreprise est tenu de prévoir un plan d’action valable un an, le temps d’arriver à un accord définitif. L’accord doit prévoir des indicateurs capables de mesurer la progression et de cibler les actions, selon la taille des entreprises ; dans tous les cas de figure, l’axe des rémunération est obligatoire. Si l’entreprise ne fournit ni un rapport de situation comparée ni un accord, elle reçoit alors une mise en demeure. Elle a ensuite un délai de 6 mois pour se justifier et démarrer les démarches. Sinon les sanctions financières tomberont ! »
Certaines entreprises ont déjà été mises à l’amende, mais le ministère n’a pas rendu leurs noms publics.
Engagée sur le terrain de l’égalité professionnelle en tant que signataire de la convention « Territoire d’excellence », la région Aquitaine fait partie des bons élèves. Tout particulièrement chez les entreprises de plus de 300 salariés : elles sont 75% à s’être acquittées de leurs obligations. Toutefois, les entreprises de 50 à 300 salariés ne sont pas dans les clous : seules 32% d’entre elles sont couvertes par un accord.
« Ce n’est pas de la mauvaise volonté de leur part, selon Brigitte Faulquier. Ces entreprises n’ont pas toujours un service des ressources humaines qui peut porter le dispositif. Notre rôle est d’expliquer que l’égalité professionnelle, c’est une opportunité. Cela peut être fédérateur, développer une culture d’entreprise, rengager voire engager le dialogue social. Et quand ça donne des résultats, ça permet de souder les équipes et d’apaiser le climat social. »
Chargement des commentaires…