Établir un plan d’actions opérationnel
Il y avait plus de 50 personnes, réunis en cercle dans la cour du café Pompier, autour d’un « arbre à palabres » qui avait mauvaise allure. Il ne fallait pas y voir une analogie. Ce serait prendre un chemin court certes mais qui ne mène à rien. Car l’envie qui anime l’assemblée est surtout de mettre en route une énergie, une synergie qui permettra par sa poussée d’emporter des idées et des courants de pensée.
Si certains étaient présents par l’ « envie de parler culture » ou encore « venir à la rencontre d’autres artistes »… Si d’autres faisaient l’aveu d’une difficulté de s’exprimer en public… l’axe principal développé par Eric Chevance, l’animateur de la réunion au nom du groupe de La Palabre, était l’ « organisation de la pensée pour produire des analyses et des propositions ». L’acte fondateur est celui de « produire », donc de faire ressortir un bilan volontariste et transformer ce bilan en plan d’actions opérationnel.
L’idée d’un glossaire
« Ce n’est pas le bureau des pleurs, ni le tribunal de la politique culturelle de la ville de Bordeaux. » Le secteur de la production et la diffusion culturelle et artistique empile les malaises et les mésaventures. La tentation de la plainte est grande. Mais dans son ensemble, le débat n’est pas tombé dans cette facilité.
Il y avait bien sûr quelques représentants des intermittents du spectacle ; le dossier chaud de l’actualité. Un militant rappelle leurs actions programmées pour le lendemain. Une voix dans le public resitue le sujet : intermittent du spectacle est un régime et non pas un statut artistique. Le débat s’accélère.
Comment alors défaire les préoccupations des uns et des autres et définir des priorités ? Une première piste de travail : donner du sens aux mots, établir un glossaire.
L’économie créative, nerf de la guerre ?
Nadia Russel, directrice de L’Agence Créative pour l’art contemporain, rappelle en prologue l’aventure de la galerie « à suivre ». Cette initiative ayant été peu aidée financièrement, déclenche, au lendemain de sa disparition, l’idée de La Palabre avec la complicité de Marta Jonville, cofondatrice de l’association PointBarre. Cette entrée en matière situe, avec des points abordés tout au long des deux heures d’échanges, les rapports de la culture à son économie.
Faut-il reconnaître définitivement les liens entre art et économie ? Dans ces liens je-t’aime-moi-non-plus, comment préserver l’art et la culture du poids de la rentabilité ?
Si l’économie créative est définie comme un ensemble d’activités exploitant l’inventivité esthétique et artistique de groupes de travailleurs créatifs, il n’en demeure pas moins qu’elle reste, aux yeux d’une grande partie de l’assistance, une menace comme marchandisation de l’art et de la culture. Cependant, décrite comme le quatrième secteur de l’économie traditionnelle, elle constitue un volet incontournable des premières réflexions (le témoignage d’un élève des Beaux-arts intègre la notion de l’économie dans les préoccupations actuelles).
L’inquiétude du mélange des genres
« Il faut faire part de nos lâchetés qui nous empêchent sincèrement de dire les choses. » Cet aveu soulève alors la nécessité d’un constat sur « ce qui marche et ce qui ne marche pas » et l’urgence d’établir des choix et de se défaire des idéologies, bannir celle, actuelle, qui « nous a dépassé et qui nous a fait mourir ».
Le refus d’une idéologie ouvre la culture à une réflexion plus large. « Quand on parle de culture, on parle de quoi ? » Cette ouverture dans le questionnement reconnaît la culture comme un bien commun appartenant à des valeurs sociaux et sociétaux. Elle se doit donc de défaire l’entre-soi et le corporatisme. Une idée qui inclut l’artiste dans la société d’où il est souvent exclu par des décisions politiques qui déclenchent la baisse des budgets ou la suppression pure et dure de certaines manifestations.
Culture utilitariste ? Culture rentable ? Voilà le premier chantier établi par La Palabre. Le calendrier des travaux reste à définir. Affaire à suivre.
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