Quel est le point commun entre le centre commercial Leclerc de Langon, la pépinière d’entreprises Darwin à Bordeaux et Labat Assainissement, à Aire-sur-Adour (Landes) ? Ces sociétés vont toutes bénéficier d’aides de la région Aquitaine, fléchées vers l’autoconsommation d’électricité solaire : 100 000 euros, sur les 450 000 euros que va coûter l’installation photovoltaïque pour Labat, entreprise de traitement de déchets, par exemple.
« L’intérêt pour nous, c’est d’être plus indépendants des réseaux externes, explique son patron, Xavier Labat. Notre nouvelle usine de méthanisation, qui va produire du gaz et de l’électricité à partir de déchets, puis la revendre à EDF, a besoin pour fonctionner d’un mégawatt par an. Notre production photovoltaïque assurera jusqu’à 40% de ces besoins », grâce à des panneaux installés sur des ombrières de parking.
Le Leclerc de Langon estime à moins de 6% ce taux de couverture. Mais ce n’est pas négligeable quand on sait que les factures énergétiques des grandes surfaces atteignent plusieurs centaines de milliers d’euros, notamment pour les réfrigérateurs. Et si on considère que les tarifs de l’électricité vont augmenter de 30% d’ici 2017, selon la Commission de régulation de l’énergie, et de 50% d’ici 2020 selon le Sénat, cela n’a plus rien d’anecdotique.
Prise de risque
Il faudra toutefois 10 ans pour rentabiliser ces installations, poursuit Xavier Labat :
« Nous avons déjà investi 9 millions d’euros pour l’usine de méthanisation, c’est donc une prise de risque pour nous, en supposant que le coût de l’électricité sera malheureusement plus élevé, et que cela permettra de tamponner les hausses. Nous ne gagnerons rien. Cela montre que toutes les énergies renouvelables ont besoin d’être aidées pour démarrer. »
La région Aquitaine calcule d’ailleurs le montant de sa subvention en fonction du temps que l’entreprise aidée mettra à rentabiliser son investissement. Elle financera ainsi entre 10% et 40% du montant de ce dernier. Une vingtaine de projets sont en cours.
Seule condition : l’appel à projet vise des installations de 10 à 250 kilowattheures en crête, ce qui exclut de fait les particuliers. Il ne contient pas en revanche d’obligation d’intégrer les panneaux aux bâtiments, « une spécificité nationale française qui bloque les projets », selon Pascal Latorre, chargé de mission au conseil régional.
Filière sous perfusion
Le Conseil régional se substitue ainsi aux tarifs de rachat de l’énergie verte, le système le plus courant. Car si les études montrent que les bénéficiaires pourront consommer jusqu’à 90% de leur production électrique, elle ne pourront revendre le reste, réinjecté sur le réseau, à EDF.
« Les tarifs de rachat de l’électricité, augmentés en 2008, ont stimulé l’industrie photovoltaïque, mais ils ont aussi créé une bulle spéculative, qui a lorsqu’elle s’est dégonflé, a ensuite mis à mal toute la filière lors du moratoire sur ces tarifs en 2010, explique Pascal Latorre. Nous avons tenu une réunion de crise avec les entreprises locales, et nous avions peu de fenêtre de tir. On s’est aperçu que les tarifs de rachat mettent la filière sous perfusion, et ne permettent pas de donner une lisibilité à long terme. Développer l’autoconsommation permet au contraire d’orienter les entreprises locales vers un marché d’avenir. »
Une réflexion est engagée, notamment avec le cluster Sysolia, qui fédère 30 entreprises régionales de la filière photovoltaïque.
« Au lieu de revendre l’électricité sur le réseau, ce qui est une opération commerciale sans lien avec les besoins du bâtiment support, on va avoir une étude de ces derniers, note Ronan Guivarch, président de ce cluster. Le projet sera dimensionné en fonction de ces besoins, pas pour produire le plus possible afin de revendre un maximum. »
La région Aquitaine note toutefois qu’avec la crise, les entreprises hésitent à s’engager. Elle n’a ainsi engagé que 600 000 euros, sur un million disponible pour cette opération.
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