Le vote a été sans appel. Après avoir répondu de manière favorable aux deux questions « souhaitez vous vous prononcer sur cette question » et « vous sentez-vous suffisamment informés pour donner un avis », le Conseil des collèges de l’université Montesquieu a voté à bulletin secret à la question « souhaitez-vous débaptiser l’amphithéâtre Roger Bonnard ». Résultat : 20 « oui », pour 4 « non » et 4 abstentions.
Alors que la question avait suscité un débat houleux lors du précédent conseil, entre Loïc Grard le président du conseil des collèges, et Yann Delbrel, l’auteur du rapport qui concluait à la nécessité de changer ce nom, cette fois, un consensus s’est dégagé quant à la nécessité de sortir de la polémique, évoquée dans nos colonnes. Loïc Grard après avoir indiqué régulièrement qu’il fallait une nouvelle commission indépendante, et que le rapport n’était pas suffisant, à cette fois estimé que le conseil ne devait pas se dérober.
Michel Bergès, historien bordelais, dont le travail de recherche a permis une avancée non négligeable sur ce sujet, s’est déclaré satisfait de cette décision prise par le conseil des collèges.
« C’est pour moi un très grand bonheur, que de prendre connaissance de cette décision. En plein débat pour donner de Vichy une vision bienveillante, c’est une décision importante, de voir une ancienne faculté se pencher enfin sur son passé. Car Bonnard, outre le fait qu’il ait légitimé le régime de Pétain, à négligé le débat sur la qualité juridique du droit national socialiste allemand, à mêlé Léon Duguit à cette idéologie, en écrivant en 1937 qu’il y avait concordance quasi parfaite entre son oeuvre et le droit national socialiste. C’est aussi un signe important que cette décision soit portée par une nouvelle génération de juriste, et par une association étudiante, alors que vient d’être créée la Nouvelle Université de Bordeaux »
C’est aussi l’association OSB IV, qui depuis sa création a toujours revendiqué que cette erreur soit corrigée, qui se réjouit de cette décision forte. C’est un peu d’émotion qui a saisi les deux élus d’OSB IV au conseil des collèges, lorsque les résultats du vote ont été annoncés.
« L’université de Droit avait idéalisé sa propre histoire en camouflant la vérité. Cette histoire a traversé les générations, sans qu’aucun acte ne soit entrepris. 8 ans de luttes se terminent, d’autre combats commencent. »
Le nom de Manon Cormier avancé
En effet, il subsiste des zones d’ombre, notamment relative à Henri Vizioz, le vice-doyen de Roger Bonnard : il a été pendant la guerre au secrétariat de l’enseignement de Georges Ripert, lorsque les premières lois contre les juifs dans l’éducation ont été promulguées, ainsi qu’un membre actif des « amis du Maréchal », le groupe de personnalités locales pétainistes soutenant ardemment la politique de Vichy.
Il reste désormais à ce que la décision soit entérinée au sein du Conseil d’Administration de la Nouvelle Université de Bordeaux. Et à trouver un nom à cette salle bientôt anonyme. L’association OSB IV compte proposer des noms, et en premier lieu celui d’une femme, Manon Cormier, première femme inscrite au Barreau de Bordeaux, et morte en revenant des camps. Une manière pour eux de réparer les années où l’université Montesquieu est restée sourde à sa propre histoire.
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