Eolien : ça bouge enfin côté aquitain
L’Aquitaine est avec l’Alsace la seule région de France sans éolienne, la faute avant tout à des conditions météo moins favorables qu’ailleurs. Mais le vent pourrait bien tourner : plusieurs dossiers sont actuellement en cours d’instruction en Gironde, dont celui piloté à Maransin, dans la communauté d’agglomération du Libournais, par ABO Wind.
Le projet de cette société toulousaine, qui gère plusieurs fermes éoliennes en Poitou-Charentes : un parc de 5 éoliennes de 180 mètres de haut, capables de produire l’équivalent de la consommation électrique (hors chauffage) de 13 500 habitants, sur un territoire qui en compte 20 000.
ABO Wind a déposé juste avant Noël les demandes de permis de construire et d’autorisations d’exploitation et de défricher, avec un atout dans sa manche : elle bénéficie du certificat de projet, une mesure expérimentée en Aquitaine afin de simplifier les démarches des entreprises.
« Cela nous permet d’avoir connaissance des différentes procédures administratives, témoigne Maxime Le Dain, responsable du projet chez Abo Wind. Toutes les étapes sont indiquées noir sur blanc, avec surtout un engagement de l’Etat sur les délais d’instruction : 4 mois pour nous dire si le dossier est recevable, 12 mois pour le permis de construire, 14 pour l’autorisation d’exploiter. Puis la préfecture saisit l’Autorité environnementale, qui a deux mois pour donner son avis. Enfin, l’enquête publique doit se tenir dans un délai de 4 mois après cet avis… Au total c’est normalement 22 mois d’instruction, mais en France il faut compter 6 ans en moyenne pour qu’un projet éolien se concrétise, contre deux à trois ans en Allemagne. »
Autre atout du certificat de projet : il gèle la réglementation en vigueur si les textes changent pendant la durée de la procédure, ce qui est souvent le cas dans le champ des énergies renouvelable.
« Cela ne nous mettrait pas à l’abri d’une baisse des tarifs de rachat de l’électricité renouvelable, explique Maxime Le Dain, mais cela nous empêcherait d’être touché par des amendements qui nous obligeraient par exemple à réviser notre projet en visant le nombre d’éolienne ou la distance premières des habitations. »
Conçu pour limiter au maximum l’impact environnemental, le projet d’Abo Wind a pour l’instant la chance d’être plutôt bien accepté par les riverains, malgré la création d’une association d’opposants.
Solaire : le pari réussi de l’autoconsommation
Ce lundi, l’écosystème Darwin a posé la première cellule (symbolique) de sa toiture photovoltaïques. L’installation de ses 480 m2 de panneaux devrait en fait démarrer la semaine prochaine, après livraison du matériel (made in France) par la société normande SCNA. La centrale pourrait entrer en service en mars et produire 83 000 kilowatts/heure, qui ne seront pas injectés dans le réseau électrique, mais consommés sur place. A titre de comparaison, la région finance aussi les toitures et les ombrières photovoltaïque du Leclerc de Langon, qui fourniront 278 577 kwh.
A Darwin, ces panneaux devraient répondre à 25% des besoins de la pépinière, et à la totalité de la consommation des commerces (l’épicerie bio et le restaurant), espère Jean-Marc Gancille, co-fondateur de Darwin.
Après la centrale solaire du Parc des expositions, c’est un des projets les plus ambitieux à Bordeaux intra-muros. Et encore : le projet initial était 10 fois plus important (5000 m2)… L’investissement en cours est toutefois non négligeable – 203 327 euros, financés pour moitié par Darwin, et pour l’autre par le conseil régional, dans le cadre de son soutien à l’autoconsommation. Une façon de soutenir la filière solaire locale, plombée par la baisse des tarifs de rachat d’énergie renouvelable.
Mais Darwin sera bien connecté au réseau électrique : lorsque la production solaire sera excédentaire par rapport aux besoins locaux, elle sera vendue à Enercoop Aquitaine, et réinjectée dans le réseau par la coopérative.
Biogaz : de l’énergie jaillie des eaux usées
Depuis l’été dernier, plusieurs arrêtés permettent d’injecter dans les réseaux de gaz de ville du biométhane produit à partir des stations d’épuration. La ville de Strasbourg a saisi cette opportunité pour lancer le premier projet – en cours de construction – pour valoriser de la sorte ce gaz qui se dégage des boues d’eaux usées.
Bordeaux Métropole a lancé des études pour tester le raccordement de l’usine d’épuration du Clos de Hilde, gérée à à Bègles par la Lyonnaise des eaux. Comme dans d’autres stations, elle produit déjà du biogaz utilisé en interne, pour sécher les boues. Cette production est excédentaire en été, alors qu’il est nécessaire d’importer du gaz naturel l’hiver.
Des boues aux bus
Le projet de l’agglomération consiste à récupérer la vapeur produite par l’usine d’incinération des déchets Astria voisine pour remplacer le biogaz produit, et purifier ce dernier pour l’injecter dans le réseau de gaz naturel urbain. Il pourrait être utiliser pour le chauffage urbain ou comme carburant pour les bus. L’agglomération bordelaise en effet commandé l’an dernier au constructeur MAN 25 bus capables de rouler au gaz naturel de ville comme au biogaz.
D’un potentiel de 16,5 Gigawatts/heure, ce projet représente les besoins en gaz de 1300 foyers et 15% des engagements du volet « production d’énergie renouvelable » du Plan Climat de Bordeaux Métropole (qui vise une production de 109 GWh par an d’ici à 2050).
Il serait mené par Regaz, société détenant Gaz de Bordeaux, et appartenant majoritairement à Bordeaux Métropole (la Ville de Bordeaux vient de lui vendre ses parts dans le cadre de la métropolisation, NDLR). L’entreprise de fourniture et de distribution de gaz est en voie de diversification dans le biogaz : via sa filiale Neomix, elle investit dans le raccordement au réseau de plusieurs usines de méthanisation de déchets agricoles, dont celle de Saint-Jean-d’Illac.
Entre la viticulture et la sylviculture, le potentiel du biogaz issu des déchets verts est énorme en Aquitaine, et les projets se multiplient, comme l’usine d’Hagetmau, dans les Landes.
Une interface gaz-électricité
Signalons celui très novateur d’une autre société bordelaise active dans le secteur du biogaz : Leaf cherche actuellement des financements pour un projet de « power to fuel ». Il s’agit ici de convertir de l’hydrogène en méthane, puis de l’injecter dans les réseaux de gaz.
« L’intérêt principal c’est d’apporter une solution au stockage de l’énergie électrique issue de sources renouvelables, explique son cofondateur, Emmanuel Voinier. Les excédents électriques sont transformés en hydrogène par électrolyse. On produit ensuite du méthane en combinant l’hydrogène avec du CO2 issu de cheminées industrielles, par exemple, ce qui permet de neutraliser ainsi des émissions de gaz à effet de serre. »
Selon le responsable de Leaf, société de 5 personnes, cette technologie n’a de frein autre que l’investissement nécessaire à son décollage. Elle pourrait ensuite utiliser les infrastructures existantes du réseau gaz, capable de stocker énormément d’énergie. Ce qui est le talon d’Achille de l’électricité en général et des renouvelables en particulier.
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