Dimanche, interrogé par LaCroix, Jean-Marie Darmian vice-président du Conseil général de Gironde, s’inquiétait des causes de cet incendie, il pointait alors « l’étalement urbain » ainsi que le « manque d’entretien des forêts par les propriétaires privés ».
Pierre Macé, directeur de la DFCI Aquitaine (Défense de la Forêt Contre les Incendies) rappelle alors que la cause du sinistre est avant tout humaine :
« 86% des départs de feu sont liés à l’homme. »
Mais la situation est ici d’autant plus exceptionnelle que la région est en pleine période de sécheresse, à cela s’ajoutent les fortes températures et ce vent tournant qui a causé bien des soucis aux soldats du feu. Le secteur atteint est un secteur bien entretenu avec des sylviculteurs dynamiques et des arbres récents car replantés depuis la tempête de 1998 :
« Il faut savoir que les pins maritimes sont plus inflammables durant leurs 25 premières années. »
Un conflit entre riverains et professionnels du bois
Les sylviculteurs, professionnels de la forêt, participent à la prévention des incendies en entretenant les forêts. Si l’étalement urbain augmente le risque pour les habitations, il pose surtout un problème de cohabitation. En effet, ces nouveaux habitants des bois, non habitués, ne comprennent pas toujours le travail des sylviculteurs qu’ils voient couper des arbres non loin de leurs habitations. Stéphane Latour, directeur de la Fédération des industries du bois d’Aquitaine (FIBA), explique :
« Ces nouveaux entrants du monde forestier se plaignent des nuisances, ils ne comprennent pas notre travail, c’est un vrai problème, nous sommes soucieux de ça et menons des campagnes de communication à ce sujet, plus que de la prévention, il s’agit de faire de la sensibilisation. »
Les professionnels du bois ont tout de même le soutien des élus locaux qui justement, connaissent le travail :
« En France, en 2015, sur 4 petits arbres plantés, 3 le sont dans les Landes, ici la culture forestière est très forte, la forêt est particulièrement entretenue et a une réelle fonction économique. »
« Ils étaient là avant et ne font que leur travail »
Laurent Desplat, conseiller municipal délégué aux espaces verts, ruraux et forestiers de Pessac explique alors ce conflit :
« Le problème c’est que les constructions se rapprochent de plus en plus des forêts, or la loi demande à ce que soit entretenue une zone de propreté de 50 mètre entre la maison et les premiers arbres en prévention des projections de pignes de pin lors d’incendie, alors forcément quand les maisons se positionnent au plus près des bois et que l’on demande aux sylviculteurs de couper et de condamner des parcelles ils sont mécontents à ce niveau-là. »
Les municipalités se retrouvent alors à jouer les médiateurs lorsque ces nouveaux habitants viennent se plaindre que l’on coupe des arbres :
« On doit leur expliquer que c’est normal, que ces forêts sont des territoires de production de bois et donc qu’il faut faire des coupes mais que c’est replanté ensuite, forcément leur cadre change un moment, mais ce ne sont pas les nouveaux pavillons qui vont instaurer leurs lois sur des zones privées de production. »
Mais ces plaintes restent tout de même à relativiser :
« Il y a eu des plaintes de résidents mais ce n’est pas courant, depuis un an et demi ça ne m’est arrivé qu’à deux reprises. Ils ont peur, ils me disent “ça coupe, ça coupe et à grande vitesse”, je dois donc leur expliquer que c’est normal. Mais ça reste vraiment des cas à part car en plus nous sommes en zone périurbaine, la cohabitation est surement encore moins problématique dans les massifs landais car ils sont plus habitués. »
La sylviculture naturelle et continue, une solution ?
Jacques Hazera un expert forestier lui-même propriétaire de forêt prône alors une sylviculture différente, plus responsable, mais peu suivie dans la région : la sylviculture naturelle et continue.
« La sylviculture que je préconise est en accord total avec les mouvements écologistes voulant d’avantage de respect et même pour les riverains souhaitant un paysage plus agréable, quand nous intervenons dans les forêts, la perturbation est très légère. Il s’agit de minimiser les frais et les dépenses, d’optimiser les recettes en produisant du bois de meilleure qualité et de profiter au maximum du fonctionnement naturel de la biologie végétale. »
Très minoritaire dans la pratique locale, Jacques Hezera essaie de promouvoir ce fonctionnement imaginé en 2009 qui est un compromis de la sylviculture irrégulière pratiquée par exemple dans le Jura et en Franche Comté, où le principe de coupe-rase est abandonné au profit de l’éclaircie régulière donnant des forêts avec des arbres d’espèces et d’âges différents. La sylviculture naturelle et continue serait donc une adaptation de la sylviculture irrégulière conçue pour les propriétaires landais avec des avantages écologiques et économiques.
Sur son site, l’expert forestier en appelle alors aux sylviculteurs, les mettant face à leurs actions :
« J’ai réalisé une série de photos avant/après d’un terrain avec des arbres adultes et surtout de jeunes semis magnifiques, seulement le propriétaire a tout rasé et ces jeunes semis, qui auraient fait d’arbres d’excellente qualité et aurait évité un reboisement, ont été perdus. La sylviculture que je propose comporte de gros avantages économiques mais aussi sur le plan du fonctionnement de l’éco-système car elle perturbe beaucoup moins la faune et la flore et notamment la micro-faune directement liée à la fertilité des arbres. »
L’homme est très actif sur son site internet, participe parfois à des conférences et reçoit des étudiants et autres professionnels forestiers :
« Mais très peu viennent de la région. »
Si la forêt attire les riverains, représentant un bon cadre de vie, il ne faut pas oublier que celle-ci est vivante, plantée et entretenue par l’homme, reste à savoir dans quelles conditions…
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