Jigmé Théaux, c’est 860 000 abonnés sur sa chaîneYoutube, pas mal pour un jeune homme de 25 ans originaire de Périgueux !
Youtubeur depuis 2012, avec un débit rapide, Jigmé s’inscrit dans le style des youtubeurs comme Kriss de Minute Papillon. Comme la plupart de ses condisciples, cet enfant de la culture geek joue beaucoup aux jeux vidéo, et streame ses parties avec son meilleur ami sur Twitch.
Au naturel, ce gars abordable répond avec humour aux questions, parle avec plaisir de son activité, et n’hésite pas à rappeler lorsqu’on lui demande quelques détails supplémentaires.
Jigmé est venu au Bordeaux Geek Festival accompagné de Pat et Jérémy, deux parisiens membres comme lui de la Why Tea Fam, un collectif de vidéastes arrivés sur la toile au même moment, et qui ont vite accrochés après quelques échanges de « MP ». Avec les mêmes envies, et des contenus similaires, ils ont voulu « associer leurs bêtises, pour faire quelque chose en commun ».
Depuis, 2012, ils se donnent des coups de mains dans la réalisation, font des apparitions dans les vidéos des uns et des autres. Bref, une bande de potes qui travaillent ensemble, se voient souvent et « geekitude » oblige, passent pas mal de soirées devant des jeux vidéos. Et surtout, ne se prennent pas trop au sérieux, malgré leur notoriété grandissante. Rassurant pour des vidéastes qui veulent casser les stéréotypes !
Casser les stéréotypes
C’est en effet le crédo de Jigmé : sa chaîne, Les clichés de Jigmé, démonte les stéréotypes. De son origine (sa mère est française et son père biologique tibétain), il en a pas mal fait les frais. Dans une de ses premières vidéos, il énumère les clichés sur les asiatiques qu’il a pu subir. L’accent à la Michel Leeb, se faire appeler « le chinois », tout ça, il l’a vécu :
« C’est tout à fait courant pour un asiate, au même titre qu’un renoi de subir ce type de stéréotypes. »
Un racisme ordinaire qui ne le surprend pas, et que lui, comme ses potes de la Why Tea Fam connaissent bien, comme l’indique Jérémy :
« Ca peut être drôle une fois ces clichés. Mais quand tout le monde te fait ce genre de remarques, ça devient lourd. »
Aussi, ils contrent ces stéréotypes avec une arme infaillible : l’ironie, et le second degré !
« Quand tu es face à des remarques stéréotypées, sur le fait que t’es asiatique ou renoi ou n’importe, tu peux te braquer carrément. Ou tu rebondis en disant “ouai c’est clair, j’ai un petit sexe et alors ?”. En fait, soit on se braque et on en souffre, soit on pare la chose avec humour en rigolant de soi même », estime Jigmé.
Ce dernier veut donc pousser les gens à réfléchir. Dans une de ses vidéos récentes sur les homos, un internaute s’est fendu d’un commentaire où il réalisait la lourdeur des blagues qu’il faisait, et qu’il allait désormais arrêter.
Délirer et échanger avec les internautes
Mais sa chaine, c’est aussi de grands moments de délires. Des vidéos « FAQ » – foire aux questions – où il répond aux questions des internautes, pas toujours sérieuses, parfois indiscrètes, avec un débit « sous cocaïne ». Sans pour autant trop se dévoiler, en gardant « une certaine barrière, entre la vie privée et la vie publique ».
Et c’est aussi des vidéos qui parlent de ses expériences passées. Comme sa dernière sur l’Apple Store, où il évoque tous les clichés du magasin : les questions un peu sottes des clients, et les réponses formatées des vendeurs. Du vécu là encore, pour lui qui a été vendeur pour la marque à la pomme.
Etre youtubeur et en vivre, c’est possible
Avec une fréquentation de ses vidéos qui oscille entre un et deux millions de vues, Jigmé a pu fait de son activité de youtubeur son métier. Youtube paye les contenus originaux environ 2,5 dollars (2,2 euros) par tranche de 1000 vues, ce qui à la louche lui assure 3000 euros par mois.
Les vidéos en ligne, il y est venu sur un coup de tête en 2012. Jigmé avant, faisait de la photo, et des petits montages simples, assez décalés. Il s’est lancé dans les vidéos pour « faire réagir ».
Ça n’a pas été facile de suite, puisqu’il lui a fallu presque deux ans pour pouvoir vivre de ce travail et prendre des vacances de temps en temps. Pas tous les quatre matins non plus, puisque son activité répond aux problématiques classiques de l’auto entreprise : sans nouvelles vidéos, plus d’entrées d’argent !
Pas envie de vidéos aseptisées
Ses premières vidéos, c’est principalement avec ses collègues de l’Apple Store comme figurants qu’il les a réalisées. Des comédiens amateurs, qu’il faut briefer un peu :
« Des fois, c’est plusieurs prises le temps de les mettre à l’aise. Le temps de se chauffer un peu. Mais après moi je pars du principe que tout le monde peut s’en tirer, au bout de X prises. »
Cette présence de comédiens amateurs dans ses tournages – pour partie face caméra, et tournage extérieur – donnent une touche authentique à son travail.
« J’avais vraiment envie de garder ce côté fait maison, plutôt qu’industrialisé ou il y a un côté aseptisé dans la vidéo, qui n’est pas forcément ce qu’on a envie de transmettre. »
Sans pour autant rogner sur la qualité car pour Jigmé, une vidéo n’est aboutie que si « elle lui plait », c’est-à-dire qu’elle « est autant travaillée sur le fond que sur la forme ».
Bientôt les clichés des bordelais dévoilés !
Jigmé ne manque pas d’idées pour ses prochains tournages. Encore des vidéos tirées de ses expériences comme sur la restauration, se basant sur le métier de ses parents, restaurateurs en Dordogne.
Venu sur Bordeaux il y a 6 ans, pour des études de LEA Anglais/Chinois, Jigmé prépare pour cet été une vidéo sur les bordelais, et promet de mettre en scène tous les clichés locaux :
« Ça va être très “blanc bleu”, petit pull par-dessus la chemise. Ce qui me retient pour l’instant, c’est d’une part la météo, car je veux que ça soit ensoleillé au possible. La grosse contrainte, c’est que j’aimerais bien trouver quelqu’un qui a une maison au Ferret, avec un bateau. Bateau, huitres, vin blanc, avec la petite Mini et “papa s’il te plait achète moi le dernier iPhone”, c’est ça que j’ai envie de montrer. »
Et après ? Jigmé ne se projette pas trop à long terme, mais aimerait bien mettre les pieds dans le milieu du cinéma.
Un vrai travail de réalisateur derrière
Le cinéma, un milieu qui a plutôt tendance à dénigrer les youtubeurs autodidactes. C’est le cas de Jigmé et des membres de la Why Team Fam.
Pat, qui fait lui aussi des vidéos sur internet, a fait une école de cinéma dont il ne garde pas un souvenir impérissable :
« J’ai fait une année d’école de réalisation, à Paris. Une année… J’ai tourné une fois dans l’année en fait ! C’est très mal foutu, c’est une usine. 90 personnes, un amphi, plus jamais. On a beaucoup appris sur le tas, avec Youtube. »
Jigmé approuve :
« Tu apprends beaucoup plus en deux semaines de tournage sur Youtube entre nous et tout seul, qu’en un an d’école de cinéma. Youtube, c’est très formateur. »
Être youtubeur n’est pas un délire de « petits cons qui ne foutent pas grand-chose » dixit Jérémy de la Why Team Fam. C’est selon lui un vrai travail de court métrage, avec de l’écriture, de la technique, et une réalisation qui s’étale sur plusieurs jours. Et le rêve d’imiter Norman, passé de la Toile aux toiles.
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