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Le Planning familial, 60 ans de combats pour les Bordelaises

Avec l’arrivée d’une nouvelle génération de militantes, le Planning Familial bordelais est plus que jamais ancré dans les luttes féministes. Aux côtés d’autres associations bordelaises regroupées dans un collectif féministe, le Planning veut faire de la journée du 8 mars une véritable journée de lutte pour les droits des femmes.

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Le Planning familial, 60 ans de combats pour les Bordelaises

L’histoire de l’avortement et de la contraception se perd dans la nuit des temps : d’imposants traités écrits au temps des grecs enseignent comment faire passer les enfants par des tisanes, des potions, des moyens mécaniques (anneaux de cuivre spermicides, huile d’olive épaisse servant de préservatif féminin, gymnastiques variées, techniques de curetages).

Hélène Cesbron, conférencière de cet anniversaire (voir ci-dessous), nous rappelle qu’il n’y a pas si longtemps on déconseillait aux filles de la campagne de consommer une herbe, la  rue des jardins, pendant leur grossesse. On peut penser que ce conseil allait dans les deux sens… Il fallait bien les contrôler, ces naissances, dans les périodes de crise économique, disettes, guerres, catastrophes dont les femmes étaient victimes au moins autant que les hommes.

XXe siècle : la République paternaliste contrôle le corps des femmes

On oublie souvent que le XXe siècle  été le siècle plus restrictif dans le contrôle du corps des femmes. En 1920 en France une loi interdit toutes les informations et pratiques en matière de contraception et d’avortement. Les faiseuses d’ange sont alors considérées comme des criminelles, emprisonnées ou même guillotinées sous le régime de Vichy. On oublie aussi que la croissance exponentielle de la population mondiale est le fait du patriarcat (religieux ou politique) et de ses politiques natalistes et non des femmes, elles qui connaissent depuis longtemps les moyens de contrôler les naissances.

Longtemps étouffées par la religion dans un pays majoritairement catholique, les revendications des femmes sur ces sujets s’expriment en France dans le champ politique après 1945, au moment où elles obtiennent enfin un droit de vote que détiennent déjà la plupart des femmes européennes. Les mouvements de jeunesse protestants et laïques (Eclaireuses de France, Jeune femmes) sont à l’origine en 1956 d’une première organisation quasi-clandestine, « la maternité heureuse », qui devient quelques années plus tard le Mouvement Français pour le Planning Familial.

1963 : naissance du Planning à Bordeaux

A Bordeaux ce sont des médecins (Suzanne Chauveau et Robert Malgouyard) qui créent la première antenne du Planning en 1963 dans un local des allées de Tourny. En l’absence totale de moyens contraceptifs et d’éducation sexuelle, des milliers d’avortements ont lieu chaque semaine dans la clandestinité la plus totale, avec parfois des conséquences dramatiques (décès, invalidités) dont ces médecins sont les témoins tous les jours. L’association milite alors pour le droit à la contraception chimique et mécanique qui est largement utilisée dans les pays anglophones et les pays du Nord de l’Europe depuis les années 1920, mais reste toujours interdite en France.

En 1967, la loi Neuwirth, âprement discutée par un parlement masculin, légalise enfin la contraception. Sa promulgation démobilise une partie des militant.e.s du planning, notamment celles et ceux qui pensent que l’autorisation de la contraception va contribuer à faire disparaître l’avortement, toujours diabolisé par les lobbies religieux. La frange la plus engagée des militantes féministes poursuit la lutte avec le MLAC (Mouvement de Libération de l’Avortement et de la Contraception) jusqu’à la loi Veil de 1975.

Comme en 1967, la loi Veil a un effet démobilisateur pour le Planning Familial, pourtant engagé dans un travail d’information auprès des enfants et des jeunes que ne fait pas (ou du bout des lèvres) l’Education Nationale.

1981 : le Planning Familial s’affirme comme mouvement féministe

En 1981, l’équipe bordelaise se renouvelle avec l’arrivée de nouvelles et nouveaux militant.e.s (Mireille Chalat, Didier Lesbats) qui affirment l’engagement féministe du Planning Familial, rompant avec une position souvent neutre des équipes précédentes. Au Grand Parc un Planning bis (le CACIS, toujours présent) se monte à l’initiative des associations locales, vite soutenues par le Conseil départemental de la Gironde.

Le Planning Familial déménage souvent, mais consolide son action grâce à des emplois permanents. Nouvelle crise et nouveau départ au début des années 1990. Nicole Blet et Monique Nicolas, actuelles responsables du Planning bordelais, se souviennent :

« C’était l’époque des commandos anti IVG, des groupe chrétiens “provie” qui comparaient l’avortement au génocide nazi. Ils taguaient les murs des centres IVG et menaçaient le personnel. »

La mobilisation militante s’appuie également sur une autre revendication nationale, la reconnaissance du viol comme un crime.

« A cette époque, il existait une vingtaine de mouvements à Bordeaux, regroupées dans un collectif féministe, capables de se mobiliser contre les reculs proposés  par certains groupes parlementaires ou lors de faits particulièrement graves concernant la vie des femmes. »

De nouveaux champs d’action surgissent : viol, inceste, violences conjugales, mariages forcés mais aussi prévention SIDA, lutte contre l’homophobie. Tout en maintenant sa permanence d’accueil et d’information, le planning déploie son action de prévention vers de nouveaux publics (école, jeunesse, quartiers sensibles), avec de nouvelles techniques d’animation (théâtre forum), fondées sur de nouvelles analyses influencées par les études de genre (lutte contre les stéréotypes).

2016 : un planning rayonnant mais mal logé !

60 ans plus tard le planning est toujours là. Il s’est même considérablement rajeuni grâce à l’arrivée de nouvelles militantes, étudiantes ou jeunes travailleuses qui cherchent un engagement au service d’une cause qui soit à la fois (c’est la recette du Planning) politique et humanitaire, revendicative toute en restant au service des plus vulnérables.

Reconnu pour son utilité sociale et pour le professionnalisme de ses salariées, adoubé par les anciennes militantes, cautionné par les institutions pour l’importance de ses missions, il reste au Planning à trouver un ancrage pérenne : le Planning Familial de Bordeaux est un des seuls en France à ne pas être logé par la ville…

Réunion-débat

L’histoire du Planning Familial en France, avec Hélène Cesbron, médecin, historienne de l’avortement et de la contraception, autrice du livre « 49 jours, carnets d’une faiseuse d’anges ».

Mercredi 8 mars à 20h30, au centre Hâ 32, 32 rue du Hâ à Bordeaux


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