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La région ALPC s’écharpe sur les « Poitou-Charentes Papers »

L’affaire du dérapage des comptes de Poitou-Charentes a animé la séance plénière du conseil régional d’Aquitaine – Limousin – Poitou-Charentes, provoquant le départ de la salle des groupes Les Républicains et Front national, ce mercredi à Bordeaux.

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La région ALPC s’écharpe sur les « Poitou-Charentes Papers »

Refusant de participer au débat d'orientation budgétaire, les conseillers régionaux Les Républicains et FN quittent l'hémicyle (SB/Rue89 Bordeaux)
Refusant de participer au débat d’orientation budgétaire, les conseillers régionaux Les Républicains et FN quittent l’hémicyle (SB/Rue89 Bordeaux)

Les élus Les Républicains (LR) et FN ont en effet considéré ne pas pouvoir débattre des orientations budgétaires de la nouvelle grande région. Virginie Calmels, président du groupe Les Républicains, a déclaré vouloir attendre les conclusions définitives de l’audit d’Ernst & Young, dont les premiers résultats ont confirmé la dérive financière picto-charentaise, ayant généré une dette de 132 millions d’euros.

« Nous avons en fait collectivement été trompés car vous n’avez à ce jour pas diligenté de véritable audit sur créances impayées, et ni la réalité ni l’exhaustivité des 132 million n’ont été vérifiés », juge Virginie Calmels.

Jacques Colombier, responsable du groupe FN, a lui réclamé une commission d’enquête, ce qui a été rejeté car risquant de faire doublon avec la commission des finances de la région, déjà sur le pont.

« Nous ne sommes pas capables de traiter de prospective budgétaire avec une inconnue de 300, 400 peut-être 500 millions d’euros, et nous ne participerons pas nous non plus au débat », lâche donc l’élu frontiste.

Pour Alain Rousset, président de la région ALPC, pas question de reporter ce débat sur le sens des politiques publiques, notamment afin de « respecter les délais fixés par la loi », qui impose aux nouvelles régions de voter leur budget 2016 avant le 30 mai prochain.

« Il nous faut prendre des décisions chirurgicales mais en toute connaissance de cause, a commencé le président Alain Rousset. Nous allons devoir inscrire au budget primitif une vingtaine de millions d’euros correspondant aux besoins de paiements (de l’ex région Poitou-Charents). Je prendrai mes responsabilités.  (…). Mais il ne s’agit pas de punir Poitou Charentes, il y aura des projets nouveaux. »

Les Nuits Romanes les pieds devant

Alain Rousset a déjà annoncé des mesures, comme l’arrêt du fond régional d’intervention local (FRIL) picto-charentais, emblématique de l’ »emballement » des déficits de Poitou-Charentes : créé en 2005 pour compenser la baisse des dotations d’équipements de l’Etat dans les communes de moins de 10 000 habitants, il était doté de 9 millions d’euros en 2014, de 20 millions l’année suivante.

Autre exemple : l’aide à la rénovation des toitures, calibrée pour 10 000 logements, a fini par en financer le double suite à un relèvement des plafonds de ressources…

La région doit se recentrer sur ses compétences (« ne plus financer les réverbères »), estime le président de la région ALPC, qui a décidé d’annuler le festival des Nuits Romanes, jugé trop cher.

« Supprimer les Nuits Romanes ou sortir du FRIL relèvent de cette enceinte et d’un véritable débat sur les orientations budgétaires, rétorque Virginie Calmels, présidente du groupe Les Républicains. Il va falloir faire des choix, mais je ne sais pas si le budget des Nuits Romanes est dans l’ordre de grandeur du problème. La ligne ferroviaire Bedous-Canfranc coûtera par exemple 100 fois plus cher. »

Poitougate

Tout en reconnaissant à Alain Rousset le mérite d’avoir révélé ces « Poitou-Charentes Papers » (selon le bon mot de l’élu Modem Joan Taris, en référence au scandale d’évasion fiscale au Panama), l’adjointe d’Alain Juppé accuse son ex rival des régionales d’un « triple manquement » :

« D’abord en nous faisant croire que tout a été découvert en février. A l’exception des impayés, que vous ne pouviez connaître, les travaux préparatoires à la fusion et votre campagne avec Jean-François Macaire (successeur de Ségolène Royal à la présidence de la région Poitou-Charentes, NDLR) auraient dû vous permettre d’anticiper. Ensuite, vous n’avez pas anticiper les délais pour faire la lumière sur tout ceci, avant le vote du budget dont la limite est le 30 mai. Enfin, un manquement de gouvernance car Jean-François Macaire, démissionnaire de la vice-présidence et de la délégation aux finances, n’a pas été remplacé. »

Virginie Calmels va plus loin en parlant d’ »aquitanisation » de la grande région, allusion à la volonté d’Alain Rousset de supprimer l’exception picto-charentaise : l’ancienne Région est la seule à ne pas prélever la TICPE (Taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques), qui, alignée sur le standard aquitain, fera grimper de 2,5 centimes d’euros le prix du litre à la pompe. Soit 48 millions de recettes en plus, et une application plus juste du principe pollueur-payeur…

Plusieurs élus de l’opposition se sont aussi étonnés qu’un grand ménage n’ait pas été fait auprès des anciens responsables de la région Poitou-Charentes.

« Si j’ai pris responsabilité de pas garder ma confiance auprès de quelques directeurs, c’est que je suis convaincu que Jean-François Macaire et les élus n’avaient pas les informations nécessaires, même si cela peut vous sembler bizarre », répond le président de la région ALPC.

Ce dernier rappelle que trois audits complémentaires sont en cours, et que la chambre régionale des comptes s’est saisie de la question pour démêler les responsabilité juridiques des uns et des autres. Et notamment celle de Ségolène Royal : la ministre de l’Environnement, présidente de la région Poitou-Charentes de 2004 à 2014, a vivement réagi contre les accusations d’insincérité des comptes sous on règne, menaçant de poursuivre pour diffamation plusieurs élus régionaux.


#Alain Rousset

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