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Des traces de pesticides dans des écoles du Médoc

Des échantillons de terre prélevés dans trois écoles du Médoc, proches de vignobles, contiennent des résidus de pesticides, pour certains interdits, révèle le Collectif Info Pesticides. L’association dénonce l’inefficacité des mesures de protection des établissements scolaires prises par le Préfet.

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Des traces de pesticides dans des écoles du Médoc

Les filets anti-pesticides, ici à l'école d'Arcins, sont-ils efficaces ? (DR)
Les filets anti-pesticides, ici à l’école d’Arcins, sont-ils efficaces ? (DR)

« Les enfants scolarisés dans des écoles situées à proximité de vignobles, ne sont pas protégés des pesticides », conclut ce lundi dans un communiqué l’association animée notamment par Marie-Lys Bibeyran, figure du mouvement.

Elle assure avoir détecté en tout 19 pesticides, dont 7 se retrouvent dans chaque échantillon, parmi lesquels 5 cancérigènes suspectés ou probables, et 4 perturbateurs endocriniens. Sur ces 19 produits phytosanitaires, 7 sont interdits « depuis parfois très longtemps », comme l’insecticide DDT.

Le Collectif a fait analyser (par le laboratoire Dubernet, dans l’Aude) des échantillons de terre prélevés par des parents (et devant témoin) dans la cour de récréation ou devant le portail de trois établissements : le groupe primaire de Listrac-Médoc, situé à 50 mètres de vignes dont il est séparé par des bâtiments, l’école d’Arcins où un filet anti-pesticides est installé depuis plus d’un an, et l’école du Pouyallet à Pauillac où les horaires de traitements seraient adaptés.

Ces deux dernières écoles ont mis en œuvre des mesures de l’arrêté préfectoral du 22 avril 2016 pour protéger les établissements des épandages de pesticides, prises suite à l’intoxication d’écoliers dans le Blayais, et à l’inquiétude de parents ailleurs en Gironde.

Pesticides interdits

C’est pourtant là que les résultats sont les plus alarmants, selon le Collectif Info Pesticides. 12 pesticides ont été détectés à Arcins, dont 2 cancérogènes suspectés (les molécules fongicides boscalid et metrafenone) et 4 cancérogènes probables et perturbateurs endocriniens (dont l’herbicide interdit Diuron, et le fongicide procymidone, également interdit depuis 2008).

A l’école maternelle et primaire du Mousset au Pouyallet, sur la commune de Pauillac, située à une quarantaine de mètres des vignes, ce sont 14 pesticides qui ont été trouvés, dont 3 cancérogènes suspectés – toujours le boscalid et le metrafenone, mais aussi le lindane (insecticide interdit depuis 1998) -, 5 cancérogènes probables et perturbateurs endocriniens – dont encore le diuron et le procymidone, mais aussi le vinclozoline, un fongicide interdit depuis 2007. A ce cocktail pauillacais s’ajoute un zeste de DDT, insecticide organochloré interdit depuis les années 70, et perturbateur endocrinien.

« S’agit-il d’utilisations frauduleuses ou de résidus persistants dans l’environnement ? » s’interroge le Collectif Info Pesticides, qui « demande aux instances viticoles de s’expliquer sur la présence de ces résidus de pesticides interdits, et aux pouvoirs publics de renforcer les mesures de protection qui, manifestement, sont inefficaces. »

L'école de Listrac
8 pesticides ont été détectés à l’école de Listrac-Médoc (DR)

Charge de la preuve

Le Collectif Info Pesticides tempère toutefois de lui-même la portée de cette enquête : menée à ses frais « sur un faible nombre d’échantillons », elle « n’a donc pas prétention de valeur statistique, mais prétend simplement à une valeur informative sur l’insuffisance des dispositifs mis en place par les pouvoirs publics et les autorités administratives locales ».

Jointe par Rue89 Bordeaux, la préfecture de Gironde n’a pas encore réagi. On peut toutefois s’interroger sur les conclusions de l’enquête du collectif selon lesquelles les dispositifs sont inopérants, alors que les pesticides retrouvés ont peut-être été pulvérisés bien avant, comme pourrait l’attester la présence de DDT.

« Je ne prétends pas que cela tranche la question de l’inefficacité des dispositifs dits de protection, nuance Marie-Lys Bibeyran, contactée par Rue89 Bordeaux. Mais cela soulève la question, à charge des pouvoirs publics et de l’Anses (agence nationale de sécurité sanitaire de l’environnement) de nous prouver le contraire. Ensuite, pour les pesticides interdits, en ce qui concerne la procymidone et et la vinclozoline, ce sont les molécules qui ont été détectées et pas leurs métabolites, donc on peut suspecter des utilisations récentes… »

Cocktail dans les vignes

Pour le Collectif Médoc Info Pesticides, « la seule solution acceptable, est l’application systématique de produits homologués pour la viticulture biologique sur toutes les vignes situées aux abords de tout établissement accueillant des personnes vulnérables ».

Enfin, le collectif tente de prévenir les critiques sur les quantités détectées – de 0,001 à 0,007 milligramme par kilo, très en deçà des limites autorisées dans les aliments, par exemple :

« Même s’il s’agit de quantités faibles, certaines molécules chimiques détectées sont classées perturbateurs endocriniens, dont il est scientifiquement admis qu’ils sont susceptibles de produire des effets négatifs sur la santé des enfants à des doses infinitésimales. De plus, plusieurs molécules sont simultanément détectées, preuve de l’exposition de nos enfants à de véritables cocktails chimiques, dont les risques d’effets toxiques multiplicateurs sont connus. »

Mais pas vraiment combattus par les autorités, à l’image de l’ahurissante politique de la commission européenne vis-à-vis des perturbateurs endocriniens.


#cancérigènes

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