32 des 58 réacteurs nucléaires français comportent des pièces défectueuses, assure l’expert britannique John Large dans un rapport réalisé pour l’ONG Greenpeace, et dont L’Obs a dévoilé ce mercredi les conclusions. Les quatre réacteurs de la centrale du Blayais sont concernées par ces anomalies, initialement détectées et révélées le 23 septembre dernier par l’Autorité de sûreté nucléaire (ASN).
Le gendarme du nucléaire français a décompté dans les centrales de l’Hexagone 87 pièces irrégulières, commandées par Areva et fondues par l’entreprise Creusot Forge. 15 d’entre elles se retrouvent dans la centrale de Blaye. Avec 9 irrégularités potentiellement les plus graves pour la sûreté nucléaire, dont 7 pour le seul réacteur N°1, le Blayais est la centrale la plus touchés de France par cette affaire, après celle du Bugey
Plusieurs pièces incriminées présentent notamment des teneurs en carbone non conformes – elles ont été fondues en laissant une trop grande teneur en carbone dans certaines zones, ce qui en cas de choc thermique (par exemple l’envoi d’eau glacée pour refroidir un réacteur en surchauffe) peut rendre l’acier cassant.
« Autant de Fukushima possibles »
Selon John Large, qui avait précédemment travaillé sur les survols des centrales par les drones, et a pu analyser pendant des mois la documentation technique fournie par l’ASN, ce sont au moins 107 pièces qui seraient concernées, et sans doute plus :
« Faute de moyens légaux, et peut-être humains, l’ASN n’est pas allée enquêter trop profondément sur ces dysfonctionnements, déclare-t-il à L’Obs. Elle a dû attendre qu’Areva lui signale les anomalies, au cas par cas. On ne sait donc probablement pas tout ! »
« Je n’ai jamais vu de problèmes aussi graves à une échelle nationale », conclut-il dans l’hebdomadaire, estimant que « ce sont autant de Fukushima possibles ». Greenpeace demande l’arrêt des 32 réacteurs concernés « tant que les contrôles n’ont pas été effectués et les démonstrations de sûreté complémentaires apportées ».
Plus modérée, l’ASN a conclu que 21 des 23 « écarts identifiés ne remettent pas en cause la sûreté des équipements concernés », les deux cas les plus problématiques concernent des générateurs de vapeur au Bugey et à Fessenheim, et nécessitent l’arrêt des réacteurs.
Mais, souligne l’Autorité, « indépendamment de leurs conséquences réelles sur la sûreté, ces irrégularités mettent en lumière des pratiques inacceptables ; les revues engagées par Areva NP doivent donc se poursuivre et sont susceptibles de mettre en évidence de nouvelles irrégularités. »
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