A l’occasion du premier Light off de l’année, les militants se retrouvent chez Florence qui vit en colocation à La verte. Cet appartement spacieux rue Cheverus, qui fait office de QG pour les Jeunes écologistes de Bordeaux Aquitaine (JEBA), s’est transformé le temps d’un instant en atelier de peinture géant. « Attention, nuit gravement à la lucidité » ou encore « Faîtes l’amour, pas les magasins », les slogans fleurissent sur les affiches que les jeunes gens vont placardés lors d’une virée nocturne.
Leur objectif : éteindre les enseignes lumineuses de nuit dans un souci de préservation énergétique, une action « symbolique », comme l’exprime Anouk, une des organisatrices:
« Nous savons pertinemment que nous ne révolutionnerons rien. Mais cela nous permets de sensibiliser les gens que l’on rencontre aux thématiques énergétiques. C’est souvent un premier pas vers l’engagement et la mobilisation »
Jean-François, membre du RAP, rappelle que la pollution lumineuse est « un gâchis énergétique monumental » : un panneau énergétique consommerait 4500 kWh par an, l’équivalent d’une famille de 4 personnes. Une pétition nationale d’interdiction des publicités énergivores a d’ailleurs été lancée, recueillant aujourd’hui plus de 32 000 signatures.
Le groupe se lance dans les rues, à visage découvert, armés de perches à crochets en bois de bambous. Si quelques personnes les dévisagent dans la rue, beaucoup sont amusées par cette initiative originale. Le principe est simple: il existe parfois un interrupteur extérieur situé en hauteur sur les façades des magasins – d’où l’utilité des perches – qui une fois relevé, éteint les lumières des enseignes. Si certains commerçants responsables coupent le courant en fermant, c’est loin d’être le cas de tout le monde.
Le groupe se sépare pour couvrir le plus de rues possibles, de Gambetta à Sainte-Catherine, en passant par les différents cours du centre-ville. Ce sont principalement les grands axes routiers et piétons qui regorgent d’enseignes lumineuses. Des volontaires rejoignent la troupe en cours de route, armés de leurs propres ballets et de leur détermination. Un sans-abri rencontré sur le chemin leur fait part de ses migraines ophtalmiques accentuées par la pollution lumineuse exacerbée de la ville, et les félicite pour leur action salvatrice.
Malheureusement, il existe encore de nombreux magasins d’envergure laissant toutes les lumières et les écrans allumés à l’intérieur, bien après leur fermeture. C’est notamment le cas d’une boutique de téléphonie rue Sainte-Catherine, de celle d’une marque d’habillement rue Saint-Rémi (voir les photos) ou encore du PMU City de Gambetta. Dans ces cas-là, aucune action légale n’est possible.
L’ambiance particulièrement bon enfant de l’action permet à plusieurs curieux de s’intéresser au problème. Timothée, Julian et Baptiste, qui ont répondu présents suite à l’appel lancé sur facebook, s’engagent ainsi pour la première fois dans une telle action, mobilisés principalement contre ce gaspillage énergétique qui « ne sert strictement à rien ».
Une action anti-pubs
Plusieurs affiches et tracts sont aussi collés en ville pour dénoncer les méfaits de la publicité, qui motive particulièrement le collectif national de résistance à l’agression publicitaire (RAP), principal fournisseur de perches à crochets ce soir là. Anouk déplore la violence de l’espace publicitaire:
« La pub c’est encore plus violent que les lumières la nuit. Ça nous agresse tout le temps, partout, en plus d’être très souvent sexiste. C’est très violent. »
« On est anti-pubs car c’est une agression qui nous saute à la gueule, poursuit Jean-François. On comprend que les gens aient besoin de communiquer, mais il ne faut pas non plus que ça en devienne envahissant. Nous sommes d’abord des citoyens dans la rue, même si cette propagande te rappelle tous les 4 mètres que tu es un consommateur. »
La réglementation autorise les militants à coller des affiches sur les panneaux. Cependant, il est interdit de taguer dessus, comme le font activement les déboulonneurs sur le territoire national. L’une des militantes lilloises de ce collectif anti-pubs, crée en 2005 en région parisienne, sera d’ailleurs en procès le 21 février prochain pour dégradation légère. Si le collectif RAP lui a apporté son soutien, les Jeunes écologistes tiennent à respecter la loi, et ne souhaitent pas en arriver là.
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