1 – Fêter les rails venant du Nord
Attendue et espérée par les décideurs politiques, l’arrivée de la LGV se rapproche. Le 2 juillet, les rails relieront Bordeaux et Paris en 2h04 – contre 3h11 actuellement. Les espoirs sont placés dans cette heure gagnée pour voir grandir le nombre de touristes, de déplacements d’entreprises, d’habitants.
Pour la région, la métropole bordelaise et la mairie, l’évènement vaut bien un week-end inaugural. L’occasion pour Bordeaux d’ouvrir aussi sa saison culturelle Paysages.
Cartes de visites à vendre
Vendredi 30 juin, la danseuse contemporaine Mathilde Monnier ouvre le bal au square Dom-Debos, entre le TNBA et l’église Sainte-Croix à 21h. Samedi soir, Wax Taylor, Requin Chagrin ou encore Popof feront danser le parc des sports Saint-Michel. Le lendemain à 17h, l’Opéra national de Bordeaux tiendra concert au square Dom-Bedos.
Un chapiteau se dresse aussi quai Richelieu à Bordeaux. Ce « Village Nouvelle-Aquitaine » devrait accueillir 10000 personnes sur 5500 m² pour déambuler entre les démonstrations de VTT trial, les ateliers culinaires, les épreuves de force basque.
Surtout, l’espace Tourisme présente le Futuroscope, la Cité de l’Océan de Biarritz, les tapisseries d’Aubusson et la grotte de Lascaux – autant de « cartes de visites » à « vendre » explique le président de région PS, Alain Rousset.
Car, au-delà des belles affiches et du village sous bâche, l’objectif a un goût politique. Alain Rousset ne s’en cache pas : ce week-end inaugural doit « convaincre ». Convaincre, certes, du potentiel touristique de la région mais aussi de l’utilité de prolonger cette LGV vers Toulouse et l’Espagne.
Picsou et ses dollars
Alain Rousset sort donc son artillerie. Cette LGV assure la mobilité du quotidien pour les « cadres, ingénieurs, chef d’entreprises, professeur mais aussi les familles ». Il s’essaie à l’argument environnemental :
« Sur la lutte contre le réchauffement climatique, la solution c’est le train. (…) Certes, il faut faire des infrastructures mais il peut empêcher le nœud coulant autour de la rocade bordelaise. »
Il rejoint l’argumentaire d’Alain Juppé impressionné par ces « murs » de camions sur l’autoroute et faisant fi des chiffres de l’a’urba sur la question (les camions représentent 6% des véhicules de la rocade dont la moitié viennent ou partent de Bordeaux).
On peut bien retirer « quelques hectares de bois pour retirer 10000 camions de la route » assure Alain Rousset qui a dans les yeux « des emplois comme Picsou ne voit que des dollars ».
2 – Une manifestade pour éviter une LGV prolongée
Cet argumentaire, bien connu chez les opposants, ne passe pas dans le Sud-Gironde. Pas question de changer d’avis après plusieurs années de lutte contre ce Grand projet du Sud-Ouest (GPSO).
La coordination des associations Vigilance LGV rétorque à ce « battage médiatique » :
« La LGV Tours-Bordeaux va être mise en service en grande pompe le dimanche 2 juillet en vantant le gain de temps et en occultant les nombreux côtés négatifs de cette LGV : coût disproportionné, nombreuses atteintes portées à l’environnement humain et naturel, déficit de plus de 100 millions d’euros par an pour la SNCF au détriment de ses capacités à entretenir le réseau existant, augmentation du prix des billets,dégradation de la desserte des territoires traversés, etc. »
Elle organise donc le même week-end une manifestade à Pompéjac en Sud-Gironde pour rappeler l’avis défavorable de la commission d’enquête publique aux 14000 participants.
Le vendredi soir sera projeté « La cigale, le corbeau et les poulets ». Le film d’Olivier Azam (proche de Daniel Mermet) est présenté par les Inrocks comme « un documentaire caustique autour d’un groupe de vieux villageois gauchistes qui furent traités comme de dangereux criminels ».
Cri
Le lendemain, à la place de Wax Taylor, les groupes locaux Cri Primate et Kick et Laurent prendront place sur scène. Dans l’après-midi, ce village (authentique celui-ci) présentera expositions, lecture musicale de « Walden ou la vie dans les bois » d’Henry-David Thoreau et conférence sur les grands projets inutiles.
L’évènement se nomme « LGV ? Jamais », clin d’œil amusé au slogan « LGV, j’y vais » porté par les défenseurs du GPSO.
Le président de région n’a rien perdu de sa volonté pour construire quelques rails de plus. Il veut dessiner « l’épine dorsale » de sa région dont le financement reste encore inconnu.
Suite au contrat de gouvernement passé avec les écolos, la région ne pourra pas débourser un centime. Alain Rousset parie sur une décision du président de la république, un grand emprunt et croit en la renaissance d’une taxe carbone. Bref, il a encore une belle épine dans le pied.
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