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Valérie Champigny, artiste de fond et de formes

Le 5 octobre, Valérie Champigny conclut sa résidence d’un an au palais de Justice de Bazas par une restitution publique. Ce vendredi 20 septembre, elle présente son Polyèdre aux oiseaux dans l’Ehpad de Captieux. Très active en 2019, l’artiste sud-girondine réalise une année décisive.

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Valérie Champigny, artiste de fond et de formes

Elle n’aura pas chômé en 2019 Valérie Champigny. Après une exposition personnelle « Mish-mash project » à Laboratoire Bx en avril ; une invitation par le département de la Gironde au festival MixMecs le 19 juin au Glob théâtre ; une résidence de création au centre hospitalier de Bazas en juin ; et une exposition collective du 29 juin au 7 juillet avec Diffractis et dans le cadre du Week-end de l’art contemporain, elle est sur le point de clore une année de résidence au palais de Justice de Bazas et une résidence en septembre à l’Ehpad « L’Airial de Biron » à Captieux.

Basée dans le Sud Gironde, Valérie Champigny sillonne les territoires « pour stimuler la part créative des populations » et « poétiser les espaces ». Elle emprunte au philosophe Gaston Bachelard son expression pour travailler les espaces communs, de circulation, fonctionnels. Des espaces qui, par un long processus d’observation et d’action, se transforment en lieux de vie.

En artiste « interventionnelle », elle procède à un examen, un diagnostic, se faisant oublier jusqu’à provoquer un processus participatif qui prendra le pas, avec les habitants des espaces, les salariés, les patients, les enfants… Ensemble, ils prennent part à l’aboutissement d’une transformation limpide, qui finalement s’avère évidente.

« On pourrait dire que mon travail d’artiste serait de jouer à l’anthropologue en immersion pour prendre connaissance des lieux puis de jouer à l’architecte des fonctions utopiques, poétiques ou absurdes pour donner forme. »

Lieu et non-lieu

A travers ces brèches dans le quotidien des personnes et de leurs espaces, Valérie Champigny développe une pratique artistique d’itinérance et de situationnisme. Elle s’insère et procède à de minimes changements qui s’empilent jusqu’à former des mutations aux allures radicales.

Depuis un an, elle est en résidence de création au palais de Justice de Bazas en réhabilitation, sur une invitation de la médiathèque locale. Comme à son habitude, elle met en œuvre tout un protocole qui lui est propre, de rituels et de techniques d’implication ; elle utilise le langage et le transpose dans de subtiles installations jonchées de minuscules repères familiers.

A Bazas, elle s’appuie sur les références à Thérèse Desqueyroux, personnage d’un ouvrage de François Mauriac. Le roman commence à la sortie du palais de justice, alors que l’héroïne est libérée après un non-lieu. Entamer une réflexion sur un lieu à travers un non-lieu, voilà qui rend le travail de Valérie Champigny enchanteur, sans cesse parsemé de rebonds décalés.

Elle se joue ainsi de l’anagramme de « Le Palais de justice » qui prendra la forme d’un néon « L’étais-je disculpé.e à » ; une œuvre qui sera installée de façon pérenne dans le Pôle de l’Image, de l’Écrit et du Numérique. Elle sera inaugurée le 5 octobre.

« L’étais-je disculpé.e » : installation en cours de la restitution de la résidence au Palais de justice de Bazas (DR)

Polyèdre

C’est un nouveau polyèdre qui est présenté ce vendredi 20 septembre dans l’Ehpad « L’Airial de Biron » de Captieux. Installation participative où les occupants de l’établissement, rejoints par des enfants de l’école élémentaire, ont eu pour mission de recouvrir la structure construite par l’artiste avec des brandes et des fougères.

Cette installation emprunte à l’architecture locale des palombières – des abris de chasse –, des procédés de montage en inversant la fonctionnalité de la construction. Ici, le spectateur est invité à observer par les interstices les oiseaux attirés à l’intérieur grâce à des perchoirs sur lesquels reposent des graines et de petites réserves d’eau.

« Depuis vingt ans, le polyèdre apparaît dans mon histoire. Adolescente, j’étais fascinée par une gravure d’Albrecht Dürer datée de 1514 et intitulée Melancolia. Elle représente un personnage féminin penché sur un polyèdre comme une matière philosophique. C’est une forme assez magique. Irrégulière. Ce n’est pas une forme inerte. Selon comme on pose le polyèdre, il devient un nouveau. Il n’y a aucune arrête égale, aucun angle égal. »

Dans l’œuvre de Valérie Champigny, le polyèdre tient lieu de fil. On le retrouve dans ses expositions, origamique en zinc ou en pierre, mais aussi dans ses installations où il prend la forme d’un terrain de jeu sur une parcelle de 3000 m2 en Dordogne : « Owiiig le polyèdre à visage humain », ou d’un théâtre d’ombres dans les Landes : « Polyèdre ombrivore ».

Boîtes de mots

Le langage, un autre pilier du travail de Valérie Champigny, tient lieu d’expression plastique mais aussi d’exploration imaginaire. Les titres de ses œuvres et installations, « L’émer-veilleur ordinaire », « Nuage-présage », « La chaise-échelle »… s’amusent de pièges sonores. Ses installations s’accompagnent souvent d’une phrase, d’une légende parallèle.

« Entre et imagine, tout est paysage. » « Chaque jour, je trouve ma place dans l’immensité. » « J’hydrocarbure sans fard les envies ordinaires. » Elle intègre l’écriture à sa pratique de plasticienne pour laisser poindre un début de lecture, une amorce de piste, un tremplin.

« Je laisse une part aléatoire sur mon travail pour laisser une place à l’émulation. Le langage a été toujours présent, des grandes lettres en zinc ou un néon. Les mots deviennent une matière, une sorte de châteaux cartes où on peut rebattre les cartes et imaginer un autre château. »

Parallèlement à ses résidences et expositions, Valérie Champigny anime des ateliers d’écriture à partir de boîtes de mots qu’elle conçoit. Certains extraits deviennent des installations à part entière, disposées et immortalisées par des prises de vues aériennes

Écriture créative avec des collégiens (DR)

Valérie Champigny est auteur du blog Marge de Manœuvre à Rue89 Bordeaux.


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