Jeudi 20 février 2020 à 18h, sur le parvis Corto Maltese, un peu à l’écart de l’imposant bâtiment de la Méca, avait lieu l’inauguration de l’ « Eau », la première des trois sculptures de l’œuvre de Laurent Montaron et Olivier Vadrot, « Etude sur la nature des choses ». Mais ce n’est que le lendemain matin vers 10h, que je pars à sa découverte.
Les soleil est au rendez-vous, mais pas assez haut pour éclairer la silhouette de ce petit garçon en bronze assis sur le bord d’une pierre de lave de Volvic. De l’autre côté du quai de Paludate, avant de franchir le passage piéton provisoire, je la cherche des yeux. C’est un homme penché en avant avec un appareil photo que je remarque en premier, et la sculpture qu’il photographie en deuxième. C’est Laurent Montaron.
« Tout est pensé pour pouvoir déplacer la sculpture facilement. Comme le quartier est en travaux, c’est possible qu’elle change encore de place » m’explique l’artiste champenois.
Figure de l’enfant
La sculpture est d’un réalisme frappant. Les évents, ces traces d’ouverture dans un moule qui permettent l’évacuation de l’air et des gaz chauds chassés par la matière en fusion, sont volontairement laissés. L’enfant, les mains en creux pour recueillir l’eau de la pluie, interpelle par la spontanéité et la justesse de la posture, un équilibre entre émerveillement et curiosité.
Laurent Montaron doit prendre le train pour Paris dans deux heures. Il photographie l’œuvre sous tous les angles. Le modèle est son fils, dans une posture à l’échelle 1 :
« C’est mon enfant, mais c’est aussi tous les enfants. C’est la figure de l’enfant qui nous intéresse. 8 ans, c’est un âge qui correspond à beaucoup de questionnements. Avec mes deux fils, tous les soirs avant de les endormir, on se pose des questions métaphysiques : pourquoi la lune est ronde ? pourquoi le soleil brûle ? »
Artiste interdisciplinaire, alliant cinéma, photographie, installations et performances, Laurent Montaron s’inspire dans ses travaux de l’histoire de la technologie pour explorer les croyances, comment les innovations ont continuellement donné lieu à de nouvelles façons d’observer et de comprendre le monde.
Eau, soleil, vent
C’est donc l’enfance qui anime « cette déambulation philosophique ». A ne pas associer à une simple signalétique m’avait prévenu plus tôt Olivier Vardot pour qui « l’idée n’était pas d’indiquer le chemin entre la gare et la Méca ». Il ajoute :
« Le promeneur verra une première sculpture et ensuite une deuxième. Entre les deux, il reconnaîtra l’enfant de tout à l’heure. Et le découvrira une troisième fois encore plus loin et se fera une idée du lien créé tout au long du parcours. »
Architecte de formation, le Bourguignon Olivier Vadrot se confronte à de nombreux domaines, aussi bien le design que la scène théâtrale et musicale. Son expérience dans l’espace public s’est pliée aux installations éphémères mais également aux réalisations durables. Dans le cadre de la la consultation du Fonds Cré’Atlantique, il s’est associé pour la première fois à Laurent Montaron.
En quittant le parvis Corto Maltese, je m’engage avec Laurent Montaron rue Cabanac. C’est le vieux quartier Belcier en pleins travaux de réhabilitation qu’on traverse jusqu’à apercevoir l’arrière de la gare Saint-Jean. Avant d’emprunter le pont en U, on se retourne pour observer dans l’alignement de la rue les façades noires avant ravalement, conservées pour abriter des constructions neuves. Tout au bout, la blancheur de la Méca tranche en plein soleil.
« Ici, il y aura un escalier. La deuxième sculpture viendra se poser sur ce socle en pierre. Elle évoquera le soleil. L’enfant portera un radiomètre de Crookes ; une boule en verre avec un mécanisme de quatre ailettes qui tournent grâce au rayonnement électromagnétique. »
Il faut imaginer tout autour le nouveau quartier Belcier que transforme Euratlantique dans ce périmètre de l’Opération d’intérêt national. Cette deuxième sculpture sera implantée au cœur même de la grande mutation annoncée.
En haut du pont, à l’arrière de la gare Saint-Jean, une troisième posture de l’enfant produira de la musique grâce au vent. Prévue pour être installée en haut d’un mât qui s’élève des quais pour porter la sculpture jusqu’au niveau du regard du promeneur sur le pont, elle sera également visible par les voyageurs attendant leur train.
« A travers ses questions essentielles et fondamentales qu’un enfant peut se poser, on découvrira un rapport poétique à toutes ces choses qui nous lient à l’espace public et urbain », conclut Laurent Montaron qui s’en va prendre son train.
Rendez-vous donné pour l’inauguration de la prochaine sculpture en 2021, et la dernière en 2022.
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