Vacances ? Que nenni. Guillaume Fédou est toujours au travail. Téléphone, whatsapp, messenger… « ça ne s’arrête jamais ». « C’est fini les années glorieuses », prétexte-t-il. « Y en a qui naissent entre les deux guerres, moi je suis né entre les deux chocs pétroliers. » Il lâche l’année du bout des lèvres parce qu’il est de ceux qui préfèrent l’âge qu’on leur donne. Il est né en 1974 à Albi, avec la crise, Giscard, et Emmanuelle sur son fauteuil en rotin.
« J’ai toujours vécu dans la nostalgie et le culte de la liberté, le voyage de mes parents en 4L en Yougoslavie. Ils me racontaient ça comme s’ils me racontaient Les Valseuses. La France était un terrain de jeu avant l’ère de la financiarisation et la titrisation de l’économie. Le temps des Sicav. »
Rencontrer Guillaume Fédou se limite rarement à un salut-ça-va-? Même quand il est chargé d’un carton lourd bien trop gros pour le porte-bagages de son vélo, il tape la causette. Dans son paquet, des t-shirts et des tote bags estampillés Bordophonia, en route pour une distribution à toute l’équipe réunie pour un tournage « à côté ».
Bordophonia
Sur la terrasse d’un dernier étage avec vue sur le Palais Gallien, sont là François Parrot, Fabien Cleenewerk, Tonio Boss, et Charlotte Saric. Il manque Elodie Vazeix, Claire Sécula, Anne-Sophie Gaigeard, Nathalie Chapuy, et Franck Tallon. « Cinq filles et cinq garçons, parité ! » lance Guillaume Fédou.
« Bordophonia a fini de prendre forme pendant le confinement, ajoute-il. Initialement, je voulais faire un doc sur l’activité artistique de la ville pour la télé. La culture de Bordeaux est cachée. C’est comme ça, c’est culturel. On veut forcer les choses et montrer ce qui se fait. Tous ceux qui font quelque chose dans cette ville sont bordophoniaques. »
Bordophonie comme francophonie. « C’est l’idée du rayonnement. » Le premier sujet est sur l’artiste Jofo, le deuxième sur le musicien Miki Bangs. Suivront une série de portraits « Bordeaux de B à X », des événements et des expos de tout poil.
« On est fiers de ce qu’on est sans être identitaires. On est ouverts sur tout. On revendique notre appellation contrôlée. »
Guillaume Fédou cite Jean Jaurès : « C’est en allant vers la mer que le fleuve reste fidèle à sa source. » Effectivement, bien avant son « alya » en terre girondine, l’Albigeois et Bordelais d’adoption a navigué vers bien des rivages. Après des années lycée entre Budapest et Vienne, quelques cuites à Lisbonne – « une parenthèse avant les études » –, il file à Paris pour ses années fac.
Bordeaux, Paris, Bordeaux
La capitale le met à son rythme, « parce que si tu ne fais rien, tu ne rencontres personne » :
« Dans la vie, il y a des généralistes et des spécialistes. Moi je suis généraliste. Tout m’intéresse. Je suis culturellement omnivore. Je suis caméléon. Avec des glandeurs, je glande. Avec des bosseurs, je bosse. A Paris, j’ai rencontré des gens qui font. Si tu ne fais rien, tu deviens une sorte de nuisible, de parasite. »
Entre Sciences éco et livreur de pizza, il se retrouve en DESS 234 à Dauphine : gestion et management des institutions culturelles. Les choses sérieuses commencent, « avant ça, c’était tarot tous les jours ». Le Tarn et le rugby de papa sont loin derrière. Place au tourbillon culturel parisien.
Les premiers articles payants sont pour le webzine Cargo en 1999. Puis rédacteur en chef adjoint du magazine féminin Perso. Puis pigiste pour Technikart. Viennent ensuite deux documentaires en co-auteur pour Arte sur la musique électro et la french touch. Et enfin, Guillaume Fédou signe « Mon numéro dans le désordre » aux éditions Léo Sheer en 2014.
« Le seul libraire qui m’a payé le voyage pour venir signer en province, c’est Mollat. Me revoilà à Bordeaux où je me mets à caresser les murs. En 2015, c’est une évidence, je reviens m’installer ici avec femme et enfant. »
Rédacteur en chef de Playboy six mois avant Metoo, depuis professeur de rétro-marketing à Kedge et « goal volant » à Darwin, Guillaume Fédou lance le « kaléidoscope culturel » Bordophonia accompagné d’un panel de touche-à-tout. En quête d’un modèle économique, l’équipe espère bien mettre un pied dans l’événementiel bordelais et y ajouter sa patte.
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