
A l’occasion de la Sainte-Catherine, la mairie de Bordeaux a lancé son programme de plantations, annonçant la création de cinq micro-forêts urbaines et d’un « permis de végétaliser » accordé aux habitants souhaitant jardiner dans leurs rues. Elle s’inscrit dans le projet « un million d’arbres » de Bordeaux Métropole.
« Un bon maire était un maire bâtisseur qui posait des premières pierres. Nous voulons au contraire changer l’image très minérale de Bordeaux, et casser du bitume pour végétaliser », a déclaré Pierre Hurmic ce mercredi 25 novembre – jour de la Sainte-Catherine « car à cette date tout bois prend racine ».
Le maire écologiste a présenté la démarche « Bordeaux Grandeur Nature », et la première saison de plantations, avec un budget qui sera triplé pour atteindre les 300000 euros par an. Elle s’inscrit dans la démarche « Un million d’arbres sur le territoire métropolitain », par lequel Bordeaux Métropole veut augmenter de 20% son patrimoine arboré, via un investissement de 2 millions d’euros par an.
Pierre Hurmic veut ainsi donner corps à certaines promesses de campagne, dont celle que chaque Bordelaise et Bordelais vive à moins de 10 minutes d’un espace vert, « un droit essentiel » dont beaucoup ont été privés pendant le confinement.
Les friches, c’est chic
Faute d’espace, l’heure n’est plus à la création de grands parcs, mais à la préservation des friches de la bétonisation, d’une part. La Ville a ainsi confirmé la sanctuarisation des 45 hectares du Parc de la Jallère, demandant son intégration au périmètre du Parc des Jalles, et indiqué qu’après discussion avec les aménageurs de la ZAC Bastide Niel, 9 des 15 ha d’espaces publics seront en pleine terre, contre 5 auparavant.
D’autre part, Bordeaux veut essaimer de nouveaux espaces plantés, avec notamment la création de 5 micro-forêts urbaines. La première d’entre elle verra le jour dans le quartier Bordeaux-sud, sur un parking de 240 m2 à l’angle des rues Francin, Fieffé et Billaudel.
« Le premier intérêt, c’est de lutter contre le réchauffement climatique et les ilots de chaleur urbains, rappelle Didier Jeanjean, adjoint au maire en charge de la nature en ville. Les canicules sont causées par l’albédo des surfaces sombres et imperméabilisées, qui absorbent l’énergie solaire le jour et renvoient la chaleur. Dans un quartier comme celui-ci, très minéral, on peut avoir jusqu’à 10°C de plus. Or les arbres capteront du CO2 et rafraichiront l’air. »

Dessein de Miyawaki
Un espace densément arboré de 100 m² en cœur de ville permet en effet d’abaisser la température de 1°C dans les rues adjacentes, dans un rayon de 100 mètres, lors de pics de chaleur. Le deuxième intérêt, enchaine l’adjoint, c’est que « cette stratégie de plantation est peu couteuse » :
« Nous ne plantons pas des arbres de haute tige qu’il va falloir entretenir et tailler, mais des jeunes plants que l’on met en terre de façon très dense – 3 par m2. Cela génère un cercle vertueux car la concurrence entre ces plantes les fait monter plus vite. Elles produisent alors de l’ombre, et gardent l’humidité au sol, il n’y a plus besoin de désherber ni d’arroser. »
Ces micro-forêts urbaines s’inspirent des travaux du paysagiste français Gilles Clément et du botaniste japonais Akira Miyawaki. C’est dans ce même esprit qu’a démarré lundi à Mérignac, sur le territoire de l’Aéroparc, la plantation d’une grande haie bocagère de 3 kilomètres de long et trois mètres de large, le long d’un axe routier.
Elle fera de l’ombre à la piste cyclable, et sera un hot spot de biodiversité végétale, mais aussi animale en servant de corridor à la faune. Selon Elisabeth Fournier, coordinatrice Paysage et Nature à Bordeaux Métropole, cette forêt respectera les préceptes de Miyawaki et sera constituée de 35000 plants d’essences locales d’arbres et d’arbustes, qui « ont résisté depuis des siècles aux évolutions climatiques, aux hivers trop froid et aux étés trop chauds » – érables, chênes, pruniers, aulnes, poiriers…
Du vert dans le fruit
Car, et c’est là aussi une nouveauté, Bordeaux et la métropole veulent aussi « donner à l’arbre une fonction nourricière ». 100 arbres fruitiers seront ainsi plantés cette saison dans la Ville. Cette dernière est en train d’inventorier les rues et les placettes qui pourraient être arborées, notamment les cours Aristide-Briand et du Médoc, ou encore la rue du Palais-Gallien, où des fosses destinées aux arbres n’ont jamais été replantées.
Enfin, la mairie entend encourager les citoyens à participer au verdissement, avec des permis de planter accordés aux habitants, associations et commerçants s’ils souhaitent végétaliser une façade, jardiner sur une place, ou remplacer une place de parking par un arbre – après concertation avec les autres habitants…
Comme cela a été constaté lors de la concertation sur la micro-forêt de la rue Fieffé, la question du stationnement sera sans doute épineuse en vue d’une végétalisation massive de Bordeaux.
Mais il va falloir s’attaquer sérieusement à la pollution de l’air, comme celle que l’on connaît actuellement. Sinon, gare à l’indigestion de métaux lourds…
Les riverains des rues où il s'agirait de reconvertir une place de stationnement en fosse à plantation d'arbre sont sans doute dans la situation d'un choix cornélien... :
sacrifier sa place de bagnole pour embellir le quartier, mitiger la chaleur urbaine jusqu'à son propre domicile - surtout si la palme vient caresser la façade... jusqu'à une plus-value latente de son bien immobilier escomptable à l'occasion de sa revente... et pour bénéficier de tous ces avantages passer à la combinaison marche-vélo-transports en commun, voire louer un véhicule ou un garage...
sinon renoncer à tout ça en faisant courir le risque du conservatisme, à soi et aux autres, en devant quand même faire le bon choix plus tard, mais en situation critique...
Ce qui risque par contre "d'être épineux", quelque soit l'espèce choisie pour les plantations, c'est la connaissance de l'emplacement des réseaux souterrains, pour éviter que la pioche ne "fasse grisou" avec la canalisation électrique, d'eau ou de gaz...
Rue89 ferait sans doute un article bien intéressant en interrogeant les services techniques de la ville et de l'interco là-dessus, entre autres acteurs :
quelles sont les ressources au niveau des archives pour éviter de coûteux sondages... ? Au tournant du XXe s. l'agent voyer ou les services de la ville n'obligeaient-t-ils pas les lotisseurs à produire un plan de la chose... ?