« Aujourd’hui, nous en sommes à 250 promesses de signature » : à cinq semaines de la clôture des 500 parrainages pour la présidentielle 2022, le candidat du NPA ne cache pas son inquiétude face à « une situation sanitaire compliquée » et une « ambiance réactionnaire » marquant la campagne.
Pour autant, malgré cette incertitude et une crise interne entre le NPA et sa branche révolutionnaire (qui présente son propre candidat à la présidentielle, Anasse Kazib, sous la bannière Révolution permanente, NDLR), Philippe Poutou a un « combat politique pour convaincre ». Ses équipes ont rencontré 10 000 maires depuis juillet.
Après Caen en début de semaine, Philippe Poutou est revenu sur ses terres pour un meeting à l’Athénée municipale, ce jeudi 27 janvier. Face à 200 sympathisants, il a rappelé les axes de son programme, qu’il assume « radical », mu par la nécessité de « bousculer un monde politique classique ».
Rupture
Parmi les principaux axes du programme de « rupture » de Philippe Poutou : SMIC à 1800 euros nets, réduction du temps de travail à 32 heures, retraite à 60 ans, revenu d’autonomie pour tous les jeunes de 16 à 25 ans, accès gratuits aux transports publics, arrêt du nucléaire en 10 ans, socialisation des banques privées…
Pour Philippe Poutou, ces mesures sont une « réponse à une société qui évolue vers l’autoritarisme et les répressions » :
« Il s’agit d’un programme qui se situe en dehors des logiques de profit et de rentabilité. C’est la formulation d’une perspective politique qui est celle de ne pas subir. Notre utilité est aussi dans un débat dont nous avons besoin à gauche, parmi les forces militantes. »
Le NPA, se détachant de ses origines communistes et de la sempiternelle lutte des classes, s’engage sur des combats plus sociétaux avec des mesures comme « l’abrogation de toutes les lois racistes et islamophobes » ou encore l’allongement du délai légal de l’IVG à 24 semaines. Sur la répression policière, symptomatique, pour Philippe Poutou, d’une « répression politique », le NPA milite en faveur du désarmement de la police et de la suppression des corps spéciaux comme le BAC ou la BRAV.
Candidat mais pas électoraliste
Jeudi soir, à Bordeaux, dans une salle comptant de nombreux membres du NPA, dont la branche jeune, le candidat à la présidentielle s’est d’abord tenu en recul du pupitre, laissant la parole à trois militants : Nora, étudiante, Willy Dhellemmes, employé de La Poste, menacé pour son activité syndicale et Béatrice Walylo, professeure des écoles. Chacun a livré son quotidien, représentatif d’une « lutte » à mener.
Nora, externe en médecine, s’est faite la porte-voix d’une jeunesse touchée de plein fouet par la crise sanitaire, contrainte de recourir à la banque alimentaire pour joindre les deux bouts :
« Le Crous continue de prélever des loyers pour des logements exigus et insalubres. La crise sanitaire vient empirer l’état psychologique des jeunes, auquel s’ajoute des difficultés matérielles (…) Plusieurs choses sont à faire : relever les bourses, y compris des étudiants étrangers, en finir avec les contrats précaires et partager le temps travail entre tous et toutes. »
Crédité de 1% des voix dans les sondages, Philippe Poutou envisage la campagne présidentielle comme une façon de rendre visible « les luttes sociales » lors de ce « moment politique important » que représente l’élection :
« Pour nous, la fonction présidentielle est anti-démocratique. Une seule personne ne peut avoir autant de pouvoirs. Mais c’est important d’exprimer des idées de révolte et une légitimité de notre camp social. C’est ça qui peut redonner confiance, donner l’envie de ne pas se résigner. »
L’exemple du Chili
Et pour bousculer tout un système, une « élection » ou même un « changement de constitution » ne peuvent suffire pour le candidat du NPA. Philippe Poutou a cité en exemple le Chili, qui a connu un mouvement populaire d’ampleur à l’automne 2019, conduisant à l’élection d’une Assemblée constituante pour renouveler sa constitution, héritée de Pinochet.
Au-delà des mesures inscrites dans un programme et des « grandes idées de gauche », « il faut surtout se donner les moyens de les appliquer » plaide Philippe Poutou. Pour le candidat, il faut donc bouleverser une société et ses logiques économiques, pas seulement les institutions.
Pour celui qui veut notamment doubler le salaire des professeurs, de l’argent il y en a, mais c’est sa répartition qui pose problème. Le candidat du NPA a mentionné le dernier rapport d’Oxfam selon lequel la fortune des cinq plus riches de France a doublé pendant la pandémie, possédant à eux seuls autant que les 40% les plus pauvres du pays. Face à la nécessité « d’affirmer une expression politique », Philippe Poutou, en fin de meeting, à appeler ses sympathisants à aller voter. La lutte, parfois, doit aussi passer par les urnes.
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