Quatre ans après un féminicide qui a bouleversé la France entière, son auteur vient d’être condamné par la justice. Après cinq heures de délibération, la cour d’assises de la Gironde a reconnu coupable Mounir Boutaa de l’assassinat de son épouse, Chahinez Daoud.
Les jurés ont suivi les réquisitions du parquet. La réclusion criminelle à perpétuité, assortie d’une période de sûreté de 22 ans, a donc été prononcée. Soit la peine la plus lourde dans le droit pénal.
« Victime indélébile »
Face à la cour, l’avocate générale, Cécile Kauffman, a parlé d’un crime « ignoble » qui a « marqué profondément notre société » :
« Il voulait effacer Chahinez. Mais par la barbarie de son acte, Mounir Boutaa est parvenu à faire d’elle une victime indélébile, définitivement inscrite dans notre mémoire collective. »

Dans son réquisitoire, la magistrate évoque « l’acharnement meurtrier » de Mounir Boutaa le jour des faits. En la brûlant vive, l’accusé a fomenté un « projet d’effacement et d’extermination » :
« Il aurait pu se contenter d’un seul coup de fusil, mais il veut la voir à terre et souffrir. Chahinez ne devait plus exister. Ni pour lui, ni pour les autres. Elle ne devait plus avoir de visage et de corps, n’être que poussière. »
Malgré l’altération du discernement retenu unanimement par les experts au moment des faits, Cécile Kauffman a demandé à ne pas diminuer la peine de Mounir Boutaa, sous couvert d’une jurisprudence de la cour de cassation. L’avocate générale l’a justifié par la dangerosité criminologique élevée de l’homme, ne disposant « d’aucune capacité de réinsertion ».
Question des troubles psychiatriques
Pourtant, dans sa plaidoirie, la défense n’aura eu de cesse de mettre en avant l’instabilité psychique de Mounir Boutaa. Convaincu d’être trompé, l’homme est atteint d’une paranoïa qui l’a poussé à commettre son crime. Un trouble psychotique qui s’est intensifié avec la période de détention, d’où le fait qu’un expert psychiatre ait noté une décompensation chez l’accusé.

« Derrière la question sociétale des femmes tuées par des hommes, il y en a une autre, celle des personnes atteintes de troubles psychiques face à la justice », a plaidé Maître Anais Divot, l’une des avocates de Mounir Boutaa :
« Il n’est pas le monstre décrit dans la presse, il ne se résume pas seulement à cet acte. Derrière, il y a un trouble. L’enfermement aggrave les pathologies psychiatriques. La contrôleuse générale des lieux de privation de liberté l’a dit. L’accès aux soins est difficile car la prison n’est pas un hôpital. »
« Se tourner vers l’avenir »
Invité à s’exprimer une ultime fois, Mounir Boutaa est apparu plus calme que les jours précédents. En chemise blanche, il se lève et garde les mains dans le dos. Son discours est confus :
« J’ai vu pleurer mes enfants. Je regrette sincèrement. Je demande pardon au monde entier. Je demande pardon à tous ceux que j’ai pu blesser. Mais c’est bizarre, devant vous je ne sens rien. Je ne me sens pas coupable. »
Tout au long du procès, Mounir Boutaa n’aura eu aucun mot à l’adresse de la famille de Chahinez. À l’annonce du verdict, cette dernière n’a pas souhaité réagir publiquement. « Elle doit désormais se tourner vers l’avenir », commente Maître Julien Plouton, l’avocat de la famille :
« C’est une peine qui incombe de la gravité des faits et de la dangerosité palpable de l’accusé. Le caractère préparé du passage à l’acte a été reconnu. »
La défense a dix jours pour interjeter appel. Depuis 2017, en Gironde, 22 féminicides ont été commis.
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