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Que deviennent nos appareils numériques collectés à Bordeaux Métropole ?

Jusqu’à fin mars, Bordeaux Métropole organise une collecte d’appareils numériques et électroniques auprès des habitants, invités à déposer leurs équipements usagés dans plusieurs points de collecte. La suite est confiée à des entreprises locales chargées de leur réparation ou de leur recyclage.

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Que deviennent nos appareils numériques collectés à Bordeaux Métropole ?
La boutique Renée. Photo : Renée

Du 1er au 30 mars, Bordeaux Métropole organise la seconde édition du Mois de la Collecte Numérique, une initiative qui invite les habitants à déposer leurs équipements électriques et électroniques (EEE) obsolètes, inutilisés ou en fin de vie dans l’un des 56 points de collecte de la métropole. L’objectif : offrir une seconde vie à ces appareils, souvent stockés dans les remises, mis de côté, oubliés ou mal recyclés.

Deux entreprises locales, EcoMicro et Renée, ont été sélectionnées pour assurer leur réparation ou leur recyclage. EcoMicro est une PME familiale située à Saint-Loubès. Elle collecte principalement les déchets d’équipements électriques et électroniques (DEEE) des entreprises en Nouvelle-Aquitaine, notamment dans les zones industrielles. Ces déchets englobent une large gamme de matériaux : ordinateurs, équipements industriels, téléphonie, réseaux, cartes électroniques et composants. En 2023, l’entreprise a traité plus de 2500 tonnes, dont 80 % provenaient de Nouvelle-Aquitaine.

Renée, implantée à Artigues-près-Bordeaux, est une association et une entreprise adaptée (qui emploie des personnes en situation de handicap en aménageant l’environnement de travail pour leur permettre de garder une activité professionnelle). Elle s’occupe des petits appareils électriques et électroniques.

Lors de la première édition du Mois de la Collecte Numérique en 2024, près de 15000 équipements ont été récupérés. Parmi eux, 6478 petits appareils électroménagers, 3173 ordinateurs, écrans, tablettes et serveurs ainsi que 1606 smartphones. Au total 2 000 ont été reconditionnés et 13000 recyclés et transformés selon la Métropole.

De la vente et des dons

Une fois collectés par EcoMicro, les DEEE suivent un processus strict, qui commence par un tri rigoureux « par catégorie puis par réparabilité », explique le gérant Julien-Maxime Maranon. Commander des pièces neuves s’impose parfois, « notamment des batteries » pour des équipements informatiques et des téléphones. Certaines pièces usées mais en état de marche sont changées pour remettre l’appareil dans un état comparable au neuf.

EcoMicro parvient à réemployer environ « 15% de ce qu’on collecte auprès des particuliers et jusqu’à 40% auprès des professionnels », la plupart sur son site explique Julien-Maxime Maranon. Il ajoute :

« On donne aussi des ordinateurs à des personnes précaires qui en ont besoin pour des recherches d’emploi ou pour faire des formations par exemple. »

Les petits appareils électroménagers (micro-onde, chaîne hi-fi, sèche-cheveux…), qui représentent environ 60% de la collecte, sont confiés à Renée pour « une réparation écoresponsable » où « on récupère les pièces sur des objets irréparables pour réparer d’autres objets ». Les équipements réparés sont ensuite revendus dans leurs boutiques ou en ligne, à un prix inférieur au neuf.

Recyclage et valorisation

Les appareils non-réemployables entrent alors dans un processus de recyclage et de valorisation. Ils sont démantelés par EcoMicro pour en extraire les différentes matières premières et pièces détachées. Les matériaux recyclables extraits sont ensuite séparés : acier, aluminium, cuivre, cartes électroniques, plastiques, métaux rares et confiés à des organismes spécialisés dans leur recyclage pour les transformer en matières premières secondaires.

« On envoie nos métaux dans des filières locales à Izon à 5km de Saint-Loubès, mais aussi à Pena Métaux à Mérignac. Ces entreprises sont chargées de les refondre et les envoyer dans des usines pour en faire de nouveaux objets » explique Julien-Maxime Maranon.

La part non-recyclable est transformée en combustible pour la production d’énergie ou de chauffage urbain. Certaines matières et appareils nécessitent une dépollution, comme les réfrigérateurs, pour extraire huile et gaz polluants. Ils sont alors envoyés, traités et incinérés au SIAP à Bassens, un établissement de Véolia qui gère les déchets dangereux.

Eco-participation

Envie Gironde, une association nationale avec une antenne dans le département, est elle aussi spécialisée dans le réemploi d’appareils électroménagers. Elle collecte chaque année 14000 tonnes auprès d’enseignes comme Darty, Boulanger ou Cdiscount.

« Quand on achète un appareil neuf chez un de ces distributeurs, on paye une éco-participation qui permet de récupérer et traiter l’ancien matériel », explique Julien Auzarel, directeur d’Envie Gironde.

Une mesure qui concerne aussi les DEEE. Ces appareils électroménagers sont, eux aussi, triés à Saint-Loubès avant d’être envoyés en ateliers de réparation et valorisation à Pessac. Les techniciens parviennent à remettre en état 12 900 appareils par an, qui sont ensuite vendus sur leur site ou dans leurs boutiques à Pessac et Ambarès-et-Lagrave. Le reste est recyclé.

Vers une consommation plus responsable

Si le recyclage et le réemploi sont essentiels, l’association Zéro Waste Bordeaux rappelle que la première étape pour réduire les déchets est un achat responsable : « privilégier des produits éco-conçus, réparables et sans obsolescence programmée » explique son coordinateur Benjamin Thiant. La plupart des appareils électroniques étant composés de pièces soudées entre elles, les réparations et le recyclage sont difficiles et, « l’objet doit être jeté, incinéré ou pire, enfouit » poursuit Benjamin Thiant.

« Même si le coût est élevé, on s’y retrouve. Plus l’appareil est utilisé dans le temps, plus l’investissement dans cet achat est rentable. Si une enceinte achetée 50 euros est utilisée que 50 fois, ça revient à 1 euro l’utilisation. Si elle coûte 100 euros mais peut être utilisée 400 fois et réparée, c’est bien moins cher », explique Benjamin Thiant.

Certains appareils peuvent difficilement être remis en marche, notamment les téléphones, les ordinateurs et les tablettes prévient Julien-Maxime Maranon :

« Les personnes ne suppriment pas leurs comptes Google ou Icloud de leur appareil avant de nous les confier, on se retrouve alors bloqué pour effacer toutes leurs données personnelles de l’appareil. Un autre problème est l’obsolescence des systèmes d’exploitations Windows. Tout cela rend inutilisable certains appareils en état de marche. On encourage l’utilisation de logiciels libres tel que Linux. »

Eviter le risque environnemental

Trois quarts des DEEE sont collectés estime l’Agence Régionale d’Evaluation environnement et Climat (AREC). Le reste, contenant des batteries et piles, présente un risque sanitaire et environnemental.

« La condition de collecte par la métropole permet de récupérer des appareils en meilleur état qui peuvent ainsi être réparés. Ce qui est moins le cas lorsqu’ils sont jetés dans de grandes bennes en déchèterie », commente l’ADEME Nouvelle-Aquitaine.

En 2022, environ 2 330 375 tonnes d’équipements numériques ont été mises sur le marché en France selon l’ADEME. Cette même année, 959 730 tonnes de déchets numériques ont été collectées à l’échelle nationale.

En Nouvelle-Aquitaine, cela représente environ 101 tonnes soit 16,7 kg par habitants. Actuellement, seuls 2% des DEEE sont réparés ou reconditionnés et 62 % recyclés. En 2022, 27 établissements néo-aquitains ont été identifiés par l’AREC comme ayant une activité de reconditionnement de flux numériques.


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