La relaxe est « une belle satisfaction » pour Maître Bruno Bouyer, qui défendait Joseph-Alix B. Ce jeune homme d’origine haïtienne, arrêté alors qu’il roulait à vélo sur un trottoir à Bordeaux, et dont le contrôle d’identité avait dégénéré.
Frappé, plaqué au sol, il avait été placé pendant 44 heures en garde à vue. Puis poursuivi par trois des policiers pour outrage, rébellion et violences sur personne dépositaire de l’autorité publique, n’ayant pas entraîné d’interruption temporaire de travail (ITT).
Accusations balayées
« Il a néanmoins fallu que nous avancions nous même les preuves de son innocence, souligne l’avocat. Si nous n’avions pas produit ces vidéos que le parquet, c’est-à-dire la police, n’a pas cherché à voir pour son enquête, on se serait retrouvé avec un dossier instruit à charge. Le procureur l’a d’ailleurs honnêtement reconnu en requérant la relaxe. »
Les images, réalisées par les participants à une manifestation pro-palestinienne, à laquelle ne participait pas Joseph-Alix B., avaient fait le tour des réseaux sociaux, en raison de la brutalité de l’intervention policière. Elles ont surtout balayé les accusations des policiers, reprend Bruno Bouyer :
« Les cinq vidéos, prises sous plusieurs angles différents, ont démontré qu’il n’y avait pas de rébellion, puisque mon client était maintenu au sol et prostré, qu’il n’y a pas eu d’insultes proférées, contrairement aux déclarations des cinq agents, et qui ont donc menti selon la décision de justice, et pas eu de violence, mais un geste malheureux de mon client qui n’était pas motivé par l’intention de porter un coup. »
Racisme « endémique »
Interrogée par Rue89 Bordeaux, l’avocate des policiers n’a pas précisé s’ils feraient appel du jugement. Lors de l’audience, Bruno Bouyer avait dénoncé « un racisme systémique dans la société, dont la police ne serait qu’une des manifestations ». « Il y a une réalité factuelle, établie par le Conseil d’Etat : le surcontrôle des minorités, des personnes non blanches », juge Sébastian Roché, directeur de recherche au CNRS et auteur de « La nation inachevée. La jeunesse face à l’école et la police » (2020).
« On peut dire qu’il y a un phénomène de discrimination systémique et endémique, étant donnée la répétition dans le temps et dans l’espace de ces contrôles d’identité. Or c’est à cette occasion que peuvent arriver des choses d’une très grande gravité, illustrées dans les affaires Théo ou Chouviat. »
Celles-ci se sont terminées de façon dramatique pour les personnes interpellées – décès de Cédric Chouviat, qui avait lui aussi été plaqué et maintenu au sol, infirmité à vie pour Théodore Luhaka. Elles ont donné lieu à des condamnations des policiers dans ce dernier cas. Joseph-Alix B. s’en est heureusement mieux tiré, et avec le sentiment que la justice n’a pas été bafouée.
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