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Ces troubles de santé préoccupants détectés chez les enfants en Gironde

Les bilans de la Protection maternelle et infantile (PMI) en 2023-2024, réalisés auprès de 70% des 3-4 ans en Gironde, révèlent une augmentation des troubles dépistés, notamment dentaires, mais aussi de la vue ou du développement psychomoteur, en lien avec l’utilisation des écrans. Les enfants des quartiers populaires ont proportionnellement plus de problèmes de santé.

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Ces troubles de santé préoccupants détectés chez les enfants en Gironde
A la PMI de la Maison départementale des solidarités d’Eysines (SB/Rue89 Bordeaux).

Pendant l’année 2023-2024, 13050 jeunes Girondins de 3 et 4 ans ont été dépistés à leur école maternelle par les puéricultrices de la PMI (protection maternelle et infantile), un service du Département de la Gironde. Cela représente 76% des enfants de cette tranche d’âge, qui ont bénéficié d’un bilan de santé global, permettant de détecter d’éventuels problèmes de santé, et d’orienter si nécessaire les parents vers un spécialiste.

« 40% ont eu un dépistage positif pour au moins un de ces bilans, indique France Ahano-Ducourneau, médecin directrice de la PMI, lors d’une présentation de ces données ce mercredi 16 avril. Pour la plupart, il s’agit de troubles bénins. 22,8% des enfants ont ainsi des problèmes dentaires, majoritairement des caries, c’est le premier poste pour lequel on trouve des anomalies. »

Un accès aux soins plus difficile

Les troubles du langage (17,9% des enfants) et les anomalies visuelles (16,8%) sont les autres types de problèmes les plus fréquemment détectés. La proportion de certaines de ces catégories tend à augmenter : ils n’étaient ainsi que 18,6% des enfants l’année précédente à avoir des soucis de dents, et 9,4% des enfants à avoir un trouble de l’audition, contre 6% en 2022-2023. Les troubles de développent psychomoteur ont aussi légèrement progressé, pour se retrouver chez 6% des enfants.

France Ahano-Ducourneau relativise toutefois ces évolutions, car le nombre de visites et de dépistages ont augmenté par rapport à l’année précédente. Les visites médicales avaient faibli après la pandémie de Covid – 10430 enfants avaient été vus en 2021-2022 –, et l’équipe de la PMI a été renforcée, avec 61 postes créés en 2023 pour renforcer les actions de prévention précoce, permettant de visiter 91% des écoles.

Les élus en tirent toutefois quelques enseignements : pour Jacques Raynaud, conseiller départemental délégué à l’accès au soin, ce bilan « illustre les difficultés de trouver des professionnels comme les dentistes ou les ophtalmologistes » :

« Souvent, les délais sont conséquents, il faut parfois 6 mois pour avoir un rendez-vous, cela peut décourager les familles et avoir un effet sur les prises en charge. Il y a de surcroît peu d’ophtalmos qui assurent des soins pédiatriques, plus complexes, et ce n’est pas seulement une question de désert médical en milieu rural, la problématique se rencontre aussi en ville. »

Les écrans ne font pas de quartier

D’ailleurs, les bilans de santé révèlent de fortes inégalités entre les enfants, selon qu’ils sont issus de quartiers populaires (écoles en réseau d’éducation prioritaire ou en quartier politique de la ville) ou d’autres quartiers. Les premiers, qui ne représentent que 18% des enfants, ont pour 24,5% d’entre eux des problèmes dentaires (contre 18,3% pour les seconds), pour 20,3% des troubles visuels (contre 15,1%), pour 12,6% de la surcharge pondérale (contre 8,2%)…

« Certaines familles peuvent être plus éloignées du soin, parfois en raison de professionnels de santé moins nombreux dans ces quartiers, mais aussi des barrières culturelles, linguistiques ou d’un rapport plus distant avec le système de santé », analyse la PMI.

Ces chiffres témoignent également d’évolutions sociétales préoccupantes : l’utilisation massive des écrans dès le plus jeune âge explique ainsi l’importance des cas de myopie détectés chez ces enfants de 3 ou 4 ans.

« C’est un véritable fléau pour la santé mentale, les troubles du spectre autistique et le développement langagier, estime également Amélie Bosset-Audoit, conseillère départementale et présidente de la commission prévention et parentalité et des professionnels de la PMI. La règle c’est pas d’écran avant trois ans. Mais les parents en étant plus régulièrement qu’avant sur leurs smartphones, ils accordent moins d’attention à leurs enfants, créent moins d’interactions, et contribuent au rôle global délétère des écrans. »

La mortalité infantile en hausse en France

Enfin, « des pathologies disparues sont en train de réapparaitre, comme la tuberculose ou la rougeole, susceptible de provoquer de graves troubles neurologiques lorsque les enfants ne sont pas vaccinés », rappelle Jacques Raynaud. L’élu, médecin de profession, s’inquiète donc des « informations erronées diffusées sur les réseaux sociaux par les mouvements antivax et complotistes très puissants dans le contexte post Covid », qui poussent les familles à ne pas vacciner leurs enfants.

Malgré les difficultés budgétaires, le Département entend donc renforcer sa compétence prévention précoce et accompagnement à la parentalité, qui lui a été confiée par la loi pour la protection des enfants de moins de 6 ans et de leur famille. Son Bus En Plus, qui circulait dans le Médoc, apporte par exemple des consultations PMI et de la télémédecine en Haute Gironde et dans le Libournais.

« C’est fondamental pour éviter les difficultés ultérieures, d’autant plus que la réparation, le curatif, coûte souvent plus cher à la collectivité et aux personnes elles mêmes dans leurs parcours de vie », relève Jean-Luc Gleyze, président du Département de la Gironde.

Il s’émeut de la recrudescence de la mortalité infantile en France, 23e État de l’Union européenne sur 27, avec un enfant sur 250 qui meurt avant l’âge d’un an. En Gironde, le taux de mortalité est de 3,3 pour 1000 enfants, contre 4,1 à l’échelle nationale (et 1,8 en Corrèze, département où ce taux est le plus faible).

« Les causes sont nombreuses, comme la fermeture des petites maternités de proximité, les grossesses tardives, les risques liés à l’alcool ou au surpoids, avance Jean-Luc Gleyze. La PMI avait été créée précisément pour éviter ce qui est une forme de honte nationale. Cela devrait provoquer un débat de société, ce n’est pas le cas. »

L’élu indique donc qu’il sera « attentif » à la mise en œuvre de mesures annoncées par la ministre de la famille, Catherine Vautrin, comme la création d’un registre national.


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