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Une semaine de lutte contre l’isolement des personnes âgées en Gironde : à la rencontre d’André et de Michèle

Du 2 au 7 juin, le Département lance la deuxième édition de sa campagne de lutte contre l’isolement des personnes âgées, en partenariat avec l’association Monalisa. Le but est de mettre en marche tous les acteurs girondins, entre sensibilisation, animations et repérages. Ce jeudi, Michèle rendait visite à André, 93 ans.

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Une semaine de lutte contre l’isolement des personnes âgées en Gironde : à la rencontre d’André et de Michèle
Cela fait maintenant quatre ans que Michèle rend visite à André chaque semaine. Photo : JG/Rue89 Bordeaux

C’est au sein de la résidence-autonomie Plein Ciel à Mérignac que Michèle rejoint André. Le lieu, insiste Michèle, n’a rien à voir avec un Ehpad :

« Les résidences-autonomie, comme le nom l’indique, sont destinées aux personnes âgées encore relativement autonomes. Ça leur permet de garder leur indépendance au sein de leur propre appartement, tout en bénéficiant de services, de soins, et de moments collectifs avec les autres résidents. Contrairement à un Ehpad, ils sont par exemple libres d’aller et venir », nuance-t-elle.

Cela fait cinquante ans que Michèle, 76 ans, s’est engagée dans le bénévolat, d’abord dans l’aide aux devoirs, puis progressivement dans l’accompagnement des ainés, toujours guidée par cette volonté d’aider son prochain. Après un rapprochement du Centre communal d’action sociale (CCAS) de Mérignac avec l’association Monalisa (Mobilisation nationale contre l’isolement social des âgés), Michèle a rejoint cette dernière voilà 4 ans.

Née en 2014, Monalisa fédère de nombreuses autres associations de lutte contre l’isolement – telles que les Petits Frères des pauvres – sur la base d’une charte et de formations communes. Avec des rendez-vous psychologiques et d’analyse de pratique au moins tous les deux mois, les 9000 bénévoles de cette fédération sont assurés d’être accompagnés au mieux dans leurs services aux 60 000 bénéficiaires à l’échelle nationale.

La naissance d’une relation de partage

À la suite d’une chute, André a fait une demande d’accompagnement puisque ses enfants habitent en Bretagne et sur la Côte d’Azur. C’est à ce moment là qu’il est devenu le tout premier bénéficiaire de Michèle. Elle lui rend visite au moins une fois par semaine, le temps d’une heure, pour s’assurer que tout va bien, et surtout pour lui tenir compagnie.

Après avoir vécu dans son propre logement, il a emménagé depuis deux ans à Plein Ciel, une résidence riche en activités :

« On fait du yoga, du vélo, de la gymnastique, des dictées… Je ne suis pas bon partout mais je touche à tout au moins », sourit-il.

Il se sent également plus en sécurité, un médecin venant le voir une fois par semaine. Il est également muni d’un badge qui l’assure de pouvoir contacter quelqu’un à tout moment.

Mais c’est avant tout sa relation avec Michèle qui le stimule : les deux adorent parler de littérature et considèrent leur vision de la vie très similaire.

« Les conversations sont plus difficiles avec les autres résidents, il y un fossé d’âge, d’expériences de vie ou de sujets d’intérêt. Avec Michèle, je pense et je réfléchis, c’est ce qui permet de conserver tout ce que j’ai gagné dans la vie », explique André tandis que Michèle l’écoute avec un grand sourire.

L’occasion de revenir sur une vie bien remplie

À 93 ans, André, discret sur sa vie qu’il juge peu intéressante, dévoile pourtant un parcours riche : Scolarisé jusqu’à l’âge de 14 ans, il travaille dans les vignes avant de s’engager quatre ans dans l’armée. Il est alors envoyé au Sénégal, à Madagascar, et fait le tour de l’Afrique en bateau. Il reprend ensuite ses études à l’École nationale d’administration à Strasbourg. Sa carrière se poursuit dans les voiries et réseaux jusqu’à la retraite. Après deux mariages, trois enfants – dont un aujourd’hui disparu –, il parle avec émotion et fierté du reste de sa famille.

Toujours est-il que lorsque Michèle lui demande s’il se sent plus apaisé aujourd’hui, après cette vie de rebondissements, celui-ci s’en amuse :

« Ah ça oui je suis plus tranquille ! La seule chose qui m’énerve c’est ce téléphone qui n’arrête pas de sonner ! », avant que Michèle ne lui réponde du tac au tac qu’il ferait mieux de lui répondre plus souvent, ce qui les fait rire tous deux.

Michèle a d’ailleurs une journée chargée, puisqu’elle doit accompagner son deuxième bénéficiaire à l’aéroport dans l’après-midi, avant de rejoindre les Petits frères des pauvres de Mérignac, eux aussi mobilisés pour cette semaine de lutte contre l’isolement.

Plus de 120 actions dans toute la Gironde cette semaine

Car justement, les acteurs mobilisés sur la question sont nombreux et sont coordonnés par la Commission des financeurs de la perte d’autonomie, chapeautée par la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie (CNSA).

Cette semaine de lutte contre l’isolement est ainsi un temps pour visibiliser cette coordination et mettre en commun les actions des associations, des services publics et des citoyens. Après une première édition réussie l’année passée, le but est d’aller encore plus loin cette année. C’est pourquoi plus de 120 actions de sensibilisation et de mise en lien ont lieu cette semaine, entre fêtes foraines de quartier intergénérationnelles, piques-niques, lotos, ou spectacles…

« Le but est de faire ça en début d’été en prévision des canicules à venir. J’ai vu que les premières vagues de chaleur arrivent dès la semaine prochaine, on a donc bien fait de la faire à ce moment là », explique Romain Dostes, vice-président du Département chargé de la politique des aînés et du lien intergénérationnel.

L’enjeu principal est celui de la territorialisation de l’aide, afin que l’offre ne demeure pas confinée à la Métropole, d’autant plus au sein du plus grand département de France métropolitaine. Ainsi, Monalisa décompte 33 équipes citoyennes dans toute la Gironde, permettant de mettre en lien des aidants au sein d’une même antenne géographique stratégique.

Les Centres locaux d’information et de coordination (CLIC), quant à eux, sont au nombre de neuf dans le département et servent d’outil d’accompagnement des aidants. Enfin, le Service public départemental de l’autonomie, nouveauté de la semaine, vient d’être créé pour offrir de nouveaux lieux d’accueil pour aidants et personnes âgées, après le constat national d’une offre peu équitable selon les territoires.

« La politique des ainés repose sur deux axes : celui de la bien-traitance et celui de la lutte contre l’isolement. On estime à 40 000 le nombre de personnes âgées isolées en Gironde, bien que l’isolement recouvre des réalités différentes, pouvant aller jusqu’à la mort sociale, comme définie par les Petits frères des pauvres », conclut Romain Dostes.


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