L’allée Serr « qui ne sert à rien » devient un espace vert plus ambitieux

En longeant l’allée Serr ce lundi après-midi, des berges de la rive droite au Jardin botanique du quartier de la Bastide, force est de constater que la chaleur a fait fuir les riverains, une fois de plus. Les trois terre-pleins centraux qui parsèment la longue ligne droite de 460 m sont vides et en plein soleil. Seuls deux riverains profitent durant une petite demi-heure d’un des boulodromes mis à disposition.

« Nous ne pouvions pas jouer bien longtemps… Il fait trop chaud sur cette placette. Quelque soit l’heure de la journée, elle est en plein soleil. Il n’y a pas de point d’ombre pour se protéger de la chaleur et pour profiter », concède, sur son chemin du retour, l’un des deux boulistes habitant au bout de l’avenue Thiers.

« Sans présence naturelle, ça ne fonctionnera pas »

Sur ce revêtement calcaire et poussiéreux d’environ un hectare, un mélange de terre et de pierre, les rayons du soleil sévissent en permanence. Aucun ombrage ne permet de rafraîchir cet îlot de chaleur urbain, l’un des 40 recensés par la municipalité. L’espace aride présente pourtant pas moins de 99 arbres plantés entre 2003 et 2004, mais tous inadaptés aux conditions climatiques. Ils sont alors, pour la plupart, dans un état critique, asséchés par les fortes chaleurs.

De plus, le sol, très compact, ne leur a pas permis de se développer dans de bonnes conditions. Ainsi, les troncs sont majoritairement nécrosés, tout comme les branchages et les feuilles.

« Aujourd’hui, nous avons un espace d’un hectare sans usage. Tant qu’il n’y aura pas de présence naturelle, ça ne fonctionnera pas. Personne ne se promène, personne ne vient se poser, c’est un espace qui ne sert à rien » résume Didier Jeanjean, adjoint au maire chargé de la nature en ville, venu présenter à la presse un projet de réaménagement de l’allée ce lundi 25 août.

Alors, dès ce 1^er septembre, l’allée Serr devient le théâtre d’une revégétalisation et d’un réaménagement. En réaction aux « fortes attentes des collectifs d’habitants et des associations locales », 135 nouveaux arbres, en plus des quinze frênes conservés par les équipes municipales, 2 094 arbustes et 7 094 plantes vivaces viendront rafraîchir 3 487 m² d’espaces qui seront désimperméabilisés, décaissés et enrichi par un sol vivant. Les travaux, d’une durée de neuf mois, n’impactent ni la circulation ni les commerces aux alentours.

Pression riveraine

« C’est un projet d’aménagement important qui a été présenté à de multiples reprises aux habitants lors des conseils de quartier. Les équipes municipales, sous l’impulsion de Françoise Frémy, maire adjointe du quartier de la Bastide, ont aussi fait le tour des commerçants pour leur présenter ce projet. À ce jour, les retours sont unanimement positifs. Les seules recommandations que l’on a entendues et prises en compte, c’est d’essayer de protéger les arbres qui ont encore un potentiel » poursuit l’adjoint au maire.

Pour offrir aux riverains qui le réclamaient un espace utilisable et agréable, la mairie entend transformer l’allée en atout de « redynamisation du quartier ». Elle mise ainsi sur un retour du végétal et sur la reconstitution d’un sol plus perméable. L’occasion d’améliorer, entres autres, la gestion des eaux pluviales tout en favorisant une biodiversité locale plus résiliente.

Pour y parvenir, les services de Bordeaux Métropole, menés par Christophe Dangles, responsable du service arbres & foresterie métropolitaine, prévoient une trentaine d’essences spécifiques adaptées aux fortes expositions au soleil. Sous un dôme végétal, formé par des plantations parsemées sur extrémités des placettes, 5 boulodromes, deux tables d’échecs, trois fontaines à boire, sept tables de pique-nique, des chaises, des bancs et des arceaux à vélo seront mis à disposition des riverains.

Livraison au printemps 2026

« Le projet a un budget de 1,2 millions d’euros. Nous avons trois phases d’opération fragmentées sur les 500 mètres linéaires. L’objectif est d’avoir le moins d’impact sur le tissu riverain. Une première partie s’effectuera sur le terre plein accolé à l’écoprojet Bastide Niel, puis nous allons avancer, de terre-plein en terre-plein, vers la Garonne pour proposer une livraison au printemps 2026 » explique Ludovic Baron, responsable de projet pour Bordeaux Métropole.

Ainsi, sur la partie la plus proche du fleuve, devant le Mégarama, un premier espace (TPC 1 sur l’illustration) sera densément végétalisé, notamment par de hauts arbres « d’appel » plantés pour créer un lien visuel entre les quais de la rive droite et les quais historiques de la rive gauche.

Le deuxième secteur (TPC 2), entouré de commerces et de bâtiments, sera conçu comme un espace ombragé de détente et d’activités. Des terrains de pétanque, installés dans le cadre du budget participatif, seront déplacés pour mieux s’intégrer à ce nouvel aménagement.

Enfin, à proximité de la ZAC Bastide Niel (TPC 3), « le troisième tronçon pourra accueillir le marché de plein air, et sera exceptionnellement utilisé comme parking lors des épisodes de crue » annonce la municipalité dans un communiqué de presse.

Les résultats escomptés de ce projet, initié en 2021, devraient être visibles d’ici une dizaine d’années, le temps de laisser la nature reprendre ses droits.