Jean-Luc Gleyze, président du Département de la Gironde, signe ce dimanche une tribune dans La Tribune du Dimanche aux côtés de Benoît Hamon, président d’ESS France, Jérôme Saddier, président du Crédit coopératif et de Coop FR, et Claire Thoury, présidente du Mouvement associatif. Tous quatre appellent à une refondation urgente du modèle social français dans un texte intitulé : « Le XXIe siècle doit être solidaire ou ne sera pas. »
Dès les premières lignes, ils dénoncent la dégradation continue des moyens accordés aux collectivités et aux acteurs de la solidarité : « Ça ne tient plus ! » écrivent-ils. Tandis que les recettes issues de la croissance ou de l’immobilier s’étiolent, les besoins des populations en fragilité explosent.
Service public en péril
Ce déséquilibre met, selon eux, en péril la pérennité même du service public et de ses partenaires :
« Est mise en jeu la pérennité des collectivités locales, notamment des départements, mais aussi celle de leurs partenaires associatifs, mutualistes, coopératifs. Finalement, celle de la continuité du service public. Car nous avons destins liés. »
Les signataires alertent : les départements sont en première ligne pour répondre à l’urgence sociale, mais leurs ressources ne suivent plus. Un paradoxe insoutenable selon eux : « Quand la société a le plus besoin d’eux, ils ont moins de moyens. »
Face à ce constat, ils plaident pour un changement de regard sur la dépense publique : « Affirmer que la dépense pour prendre soin est le problème relève d’une erreur fatale. » C’est, rappellent-ils, remettre en cause le modèle même de solidarité fondé à la Libération : « Chacun en fonction de ses moyens, chacun pour répondre à ses besoins. »
« Prélever plus le capital »
Plutôt que de réduire les dépenses, ils proposent de repenser leur financement. La Contribution sociale généralisée (CSG) serait, selon eux, « la ressource fiscale idoine pour financer les départements, pour qu’ils continuent à soutenir leurs partenaires, sans peser plus lourdement sur le contribuable ».
Ils proposent de transférer aux départements, dès le 1er janvier 2026, un point de CSG. Cette mesure, estiment-ils, permettrait de mobiliser 15 milliards d’euros pour soutenir les politiques de solidarité : handicap, grand âge, protection de l’enfance, insertion, aide alimentaire…
Deux mesures de justice fiscale permettraient d’équilibrer les comptes sociaux :
« Prélever plus le capital, et non pas les salariés ; supprimer les exonérations de cotisations sociales au-delà de 2 fois le SMIC, et non pas sur les bas salaires. »
Les auteurs citent les ouvrages Les Fossoyeurs et Les Ogres pour rappeler l’urgence de renforcer les contrôles et d’appuyer les acteurs non lucratifs, « à tous les âges de la vie ». Ils avertissent :
« Notre modèle social ne peut s’accommoder de discours prônant sans cesse la baisse des dépenses publiques, en sacrifiant les personnes et les territoires les plus vulnérables, en les jetant dans les bras épineux de l’ultralibéralisme. »
Un plan social à venir
Pour eux, c’est tout un pan de l’économie sociale et solidaire qui risque de s’effondrer :
« Le plus grand plan social à venir pourrait être, précisément, celui du monde associatif et coopératif. »
Derrière cet appel, c’est une vision du vivre-ensemble qu’ils défendent : celle d’une société où chacun contribue selon ses moyens, pour garantir à tous un égal accès aux droits fondamentaux.
La tribune s’achève sur un avertissement et un espoir partagé :
« Dans notre démocratie, chacun doit prendre sa juste part pour que chacun soit d’abord considéré en fonction du citoyen qu’il est, de ses besoins et non de ses moyens. L’enjeu de société devant nous est implacable : le XXIe siècle doit être solidaire ou ne sera pas. »
En octobre 2025, le conseil départemental de la Gironde a voté, pour la première fois de son histoire, un budget déficitaire de 97,7 millions d’euros, la collectivité ayant dû inscrire des dépenses nouvelles liées à la protection de l’enfance, au RSA et à la PCH. Cette situation est principalement due à la chute des droits de mutation immobilière (DMTO) de près de 200 millions d’euros en deux ans, fragilisant structurellement le modèle financier du département.

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