Le tribunal administratif de Bordeaux avait suspendu le 20 mai dernier ces « permis de polluer », selon la Sepanso (Société pour l’étude, la protection, l’aménagement de la nature dans le sud-ouest), qui les avait attaqués en référé.
Le Conseil d’Etat est récemment allé dans son sens : il a à son tour jugé illégaux les deux arrêtés préfectoraux autorisant les rejets d’eaux usées dans le milieu naturel lors d’épisodes pluvieux exceptionnels, estimant comme le juge des référés « qu’ils auraient dû être précédés d’une étude d’impact ».
Publiés le 28 février 2025, ces textes, qui modifiaient deux arrêtés de 2019 et 2023, permettaient au Syndicat intercommunal du Bassin d’Arcachon (SIBA) de délester quatre bassins de sécurité de ses deux réseaux de collecte – pour les quatre communes du sud du Bassin et la station d’épuration de La Teste, l’autre pour les 6 communes du nord et la station de Biganos.
Coquilles
Lors de l’hiver 2023, les débordements de ces réseaux avaient entraîné une pollution de la lagune par les matières fécales ainsi libérées, contaminant au norovirus les huîtres et de nombreux consommateurs, déclenchant l’interdiction à la vente des coquillages.
Le parquet de Bordeaux a ouvert une enquête pour écocide suite à une plainte de la Ceba (coordination environnement Bassin d’Arcachon, qui regroupe 20 associations) dénonçant des pompages et des rejets sauvages par la Siba – des garde-à-vue et interrogatoires de ses responsables ont depuis eu lieu et l’affaire pourrait arriver en 2026 devant le tribunal judiciaire.
En septembre 2024, le Siba publiait pourtant un « porter-à-connaissance demandant, contre toute-attente, un assouplissement des règles encadrant le réseau dont il a la charge », rappelle la Sepanso. La préfecture de la Gironde a suivi cette requête, adoptant les deux arrêtés préfectoraux modificatifs, « sans prendre en compte les recommandations du Conseil de gestion du Parc naturel marin », déplore l’association environnementale.
« Parapluie juridique »
Il y a un an, le Siba et son président, le maire d’Arcachon Yves Foulon, avaient fait valoir que l’autorisation d’utiliser des déversoirs d’orage était sollicitée « le temps de réaliser l’ambitieux programme de travaux sur les eaux pluviales ».
Sollicité, le syndicat intercommunal n’a pas précisé où en était ce chantier, annoncé pour les 5 ans à venir. Il a simplement indiqué être « en attente des jugements sur le fond ». Les arrêtés suspendus en référé, pourraient en effet être rétablis, ou définitivement annulés, par le tribunal administratif dans les prochains mois.
« Ils ne permettent plus à l’Etat de mettre sous un parapluie juridique le Siba pour les 5 ans qui viennent, le temps que les travaux de remise aux normes des réseaux d’eaux pluviales et d’eaux usées soient faits, salue Jacques Storelli, président de la Ceba. Mais nous sommes toujours en insécurité juridique et surtout sanitaire et environnementale, car il pleut beaucoup et la machine à bétonner et à casser le ruissellement des eaux pluviales ne s’est pas arrêtée. »
L’association dénonce ainsi « la schizophrénie des élus du Bassin, qui font la promotion du tourisme 4 saisons et veulent construire 30000 nouveaux logements dans notre milieu fragile » – un objectif fixé dans le SCoT (schéma de cohérence territoriale, document d’urbanisme également attaqué par la Ceba).

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