« Je me relèverai, je reviendrai et je serai maire de Bordeaux ! » Ce dimanche soir vers 23 heures, sous les applaudissements des militants réunis à son QG du cours de la Somme, Vincent Feltesse tente de montrer qu’il n’est pas KO. Le candidat socialiste vient pourtant de perdre très gros : la Ville, bien sûr, avec un score moins bon encore que ce que les sondages lui prédisaient (23% à ce moment-là). Et très probablement la communauté urbaine, qu’il préside encore pour quelques jours.
Si ses supporters s’attendaient à passer une soirée difficile, ils ne s’imaginaient pas qu’elle serait à ce point cauchemardesque. Dès 20h30, les sympathisants et colistiers présents cours de la Somme se désintéressent des résultats du dépouillement à Bordeaux qui s’affichent sur écran géant canton par canton, et n’annoncent aucune bonne surprise.
Les bastions vacillent
Car la stupeur est provoquée par les bastions roses dans l’agglomération, qui vacillent : le PS perd Le Taillan-Médoc, Artigues, Ambès et Carbon-Blanc. Il est en ballotage très défavorable à Saint-Médard-en-Jalles, et se retrouve talonné par la droite à Pessac.
« On a perdu la CUB ! », lâchent rapidement des membres de l’équipe de campagne, suspendus à leur portables. Constat déjà fait au Palais Rohan par Alain Juppé lors de son discours victorieux.
« C’est totalement inattendu, indique Simon Labouyrie, qui analyse les résultats de l’agglomération dans le staff du PS. La droite faisait du bluff en affirmant qu’elle pouvait récupérer la CUB. Mais même les sondages les plus pessimistes dont on disposait donnaient des résultats plus favorables que ceux qu’on réalise. On pensait pouvoir garder la majorité même en perdant une ville comme Artigues, pas quatre ou cinq. D’autant qu’on ne fait pas des scores renversants ailleurs, à Eysines ou Blanquefort, et que nos réserves de voix ne sont pas très importantes pour le deuxième tour à Pessac et Mérignac ».
Sur le plateau de France 3, où Vincent Feltesse s’exprime d’abord, puis devant ses partisans, le président de la CUB appelle néanmoins au « sursaut des abstentionnistes de gauche » pour conserver ces villes, ainsi que Parempuyre ou Floirac. Mais plus personne n’y croit.
À la désillusion socialiste s’ajoute aussi la déception pour le Front de gauche : avec moins de 5% des voix, Vincent Maurin perd son siège au conseil municipal, où le frontiste Jacques Colombier va faire son retour.
Margaux, 33 ans, est carrément en larmes :
« À cause de la défaite, mais surtout de la montée super inquiétante du Front national, partout. C’est anormal. On va rentrer dans une ère de résistance. Je suis travailleuse sociale, et je crains que la CUB à droite construise peu de logements sociaux, et qu’il n’y ait aucune amélioration pour les gens en grande précarité ».
Des sortants contestés
Comment expliquer la débâcle ? Vincent Feltesse dresse un parallèle avec les élections municipales de 1983, lorsque les Français avaient sanctionné le tournant de la rigueur pris par le gouvernement Mauroy – même si lui préfère parler d’effort de « redressement » conduit par l’équipe Ayrault.
Son colistier écologiste Pierre Hurmic rappelle la une « indigne » de L’Express sacrant Juppé meilleur maire de France en pleine campagne électorale.
La députée Sandrine Doucet souligne aussi cette « campagne nationale menée pour faire voter Juppé », et estime que les affaires relatives à Sarkozy ont polllué la « visibilité des électeurs ». Elle signale par ailleurs les « situations particulières de ces maires sortants contestés ». C’est notamment le cas de Ludovic Freygefond, maire du Taillan et patron du PS girondin, ou de Nicolas Madrelle à Carbon-Blanc.
Sandrine Doucet s’interroge enfin sur les effets du « mode de vie » dans la partie ouest de l’agglomération :
« Il s’y trouvent beaucoup de lotissements éloignés de tout, sans vie culturelle, où même les ingénieurs de l’aéronautique sont inquiets pour leur avenir. Cela crée des grincements ».
Qu’elle soit ou non renvoyée de la CUB, la gauche girondine devra probablement balayer devant sa porte.
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