Dans sa permanence de campagne, à deux pas de la mairie de Saint-Médard-en-Jalles qu’il occupe depuis 1983, le maire socialiste Serge Lamaison affiche vaillamment le sourire, mais on sent bien que la confiance a changé de camp. Dimanche dernier, son adversaire Jacques Mangon, proche du Modem et soutenu par Alain Juppé, n’a manqué son élection dès le premier tour que de 28 voix. Serge Lamaison y croit encore, du moins c’est ce qu’il affirme, déterminé à convaincre les abstentionnistes de voter pour lui au second tour, et convaincu qu’il pourra bénéficier d’une large partie des 800 voix du Front de Gauche – même si la tête de liste, Robert Quaranta, lui refuse son soutien.
Le maire sortant fier de son bilan
L’éventuelle lassitude de ses contribuables, après trois décennies de pouvoir, le maire sortant refuse de l’envisager. Il se dit fier de son bilan, même s’il admet que certains choix faits par le passé ont pu en mécontenter certains.
« On subit certainement le dossier de la construction, décidé au niveau de la CUB », explique-t-il, « et qui a conduit à une densification de l’habitat sur la commune. Et puis j’ai voulu appliquer la loi sur le logement social : à la fin de l’année, nous aurons atteint l’objectif prescrit de 20%. Cela ne plaît pas à l’électorat conservateur. »
C’est en effet l’axe d’attaque n°1 de Jacques Mangon, cette « urbanisation galopante, peu qualitative » qu’il reproche à Serge Lamaison.
« C’est la question de la beauté du cadre de vie qui est posée, dans un Saint-Médard devenu une ville-dortoir, avec un centre dévitalisé où règne le couvre-feu du samedi midi jusqu’au mardi », toutes choses que le candidat de droite promet de modifier.
L’autre dossier essentiel est celui de la connexion à l’agglomération dans cette ville de 28 000 habitants dotée d’une position qu’il qualifie de « finistérienne ».
« Serge Lamaison a raté cette question, lui qui semble se rallier finalement à notre idée de raccordement à la ligne A du tramway, après avoir défendu l’idée d’un bus à haut niveau de service, puis d’un tram sur pneus qui est une connerie sans nom », assène Jacques Mangon. « Cela coûte aussi cher que le vrai tramway, cela nécessite un autre réseau, ça n’a pas la même fiabilité et ça transporte moins de monde, bref, ça n’a aucun intérêt. »
De son côté, le maire sortant rappelle que si Saint-Médard-en-Jalles a attiré autant de nouveaux habitants ces dernières années, c’est en raison des services publics de qualité – « éducation, culture, sport » – qu’il a préservés et une activité économique qu’il a réussi à maintenir et stimuler dans le secteur.
Le soutien déterminant d’Alain Juppé
Jacques Mangon, pharmacien de 53 ans, candidat pour la troisième fois à Saint-Médard, a sans conteste bénéficié du soutien appuyé d’Alain Juppé, égérie de la « vague bleue » qui a balayé la France – et la CUB – dimanche dernier. Alain Juppé qui sera de nouveau aux côtés de Jacques Mangon ce jeudi soir, lors d’un meeting organisé au Carré des Jalles. De quoi permettre au candidat de garder un « calme olympien » jusqu’à dimanche, même s’il sait que dans une élection, « rien n’est jamais joué à l’avance ».
La veille, mercredi soir au même endroit, Serge Lamaison a tenu lui aussi un meeting, celui de la dernière chance, en compagnie du président de la région Aquitaine Alain Rousset et des députées Sandrine Doucet et Marie Récalde. À cette dernière, socialiste de 49 ans élue lors des législatives de 2012 dans la sixième circonscription de Gironde, Serge Lamaison aurait aimé passer le flambeau à Saint-Médard-en-Jalles pour éviter la candidature peut-être de trop cette année.
« Malheureusement, elle est partie à Mérignac en 2008, où elle est devenue adjointe au maire avant d’être élue députée. Et on ne trouve pas ce type de candidate de qualité sous le sabot d’un cheval. »
Certains jeunes vont voter à reculons
Quelques rues plus loin, à la terrasse d’un bistrot, des jeunes prennent l’apéro avant de déjeuner. Certains d’entre eux sont allés voter dimanche – blanc pour la plupart –, d’autres même pas.
« Ici, le soir, il n’y a rien à faire, à part traîner dans les bars, ce qui finit par coûter cher. Dès qu’on se cale en groupe sur une place, la gendarmerie s’arrête et nous demande de partir ».
Une jeune Saint-Médardaise affirme qu’il n’y a rien non plus pour ses deux enfants. Elle veut croire que Jacques Mangon leur proposera plus de choses, notamment au sein du parc du Bourdieu, un espace naturel de 28 hectares que Serge Lamaison souhaite urbaniser sur deux tiers de sa surface. Le maire sortant promet un écoquartier qui comportera « notamment des constructions novatrices de type bois, dans une logique de mixité sociale et intergénérationnelle ».
Jacques Mangon veut quant à lui « classer la totalité du parc en zone non constructible et y aménager un grand parc naturel de qualité ». Pour la mère de famille trentenaire, cette promesse d’un espace ouvert aux promeneurs et aux familles est un argument de poids.
« Et puis 30 ans de Serge Lamaison, c’est trop », conclut-elle. « Il est temps de changer un peu. »
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