Rue89 Bordeaux : En quoi cet accord de cogestion est-il satisfaisant pour la gauche, minoritaire au conseil de CUB ?
Alain Anziani : Il est respectueux de ce qui a été fait ces dernières années et ne comporte pas de reniement. Il est d’une inspiration proche de l’accord de 2008. Bien sûr, Alain Juppé a voulu y faire figurer certaines idées de Communauté d’avenir, comme la desserte de Saint-Médard en tramway. Mais sur des questions plus délicates, le texte est assez ciselé pour laisser ouvertes les possibilités. Ainsi, il indique que nous allons étudier le maintien de la gestion de l’eau en délégation de service public. C’est vrai qu’il faut y réfléchir si la fin anticipée du contrat nous coûte effectivement 100 millions d’euros. Mais l’accord n’écarte pas non plus l’idée d’un retour en régie de l’assainissement.
Qu’avez vous dû concéder ?
Nous maintenons l’objectif des 30% de logements sociaux, et nous avons ajouté celui – non chiffré – d’inciter à l’accession sociale à la propriété. Pourquoi pas en effet ne pas laisser à un locataire de logement social l’opportunité de racheter à un bon prix l’appartement qu’il occupe depuis des années ? Par ailleurs, Alain Juppé tient à faire financer le bouclage de la mise à deux fois trois voies de la rocade par le sociétés autoroutières contre la prolongation de leurs concessions. Il faut encore un accord de l’Etat, mais nous avons voulu que l’accord précise que les sociétés ne financent pas les travaux en instaurant un péage urbain.
Et les barreaux autoroutiers voulus par Communauté d’avenir ?
Le texte précise que nous acceptons d’étudier ce projet…
Il n’y a donc eu aucune friction pour élaborer cet accord ?
Alain Juppé a eu le souci de préparer de sa plume un texte qui ne choque personne, afin d’arriver à un accord. Tout ce qui peut provoquer des points de rupture a été lissé. Le PS et Communauté d’avenir se sont notamment retrouvés pour mettre en service la LGV vers l’Espagne dans le calendrier prévu, et nous avons trouvé une formule pour respecter l’opposition des écologistes sur ce point.
Vers une « gestion molle » de la CUB
Surtout ne fâcher personne. Et ne pas faire de vague d’ici 2017, pour préserver les arrières du maire de Bordeaux dans ses ambitions élyséennes. Telle est la lecture faite par plusieurs observateurs de l’accord de cogestion de la CUB conclu la semaine dernière. Lors d’une dernière rencontre avec la presse en tant que président de la Communauté urbaine, Vincent Feltesse voit ainsi dans ce texte un mix de « l’accord de 2008, de la plateforme de la gauche pour 2014, plus quelques points pour faire plaisir aux maires de droite, comme les extensions de lignes de tramway ».
Jugeant que la poursuite des actions lancées tiendra lieu de programme de travail jusqu’en 2018, le candidat vaincu à la mairie de Bordeaux prédit « une gestion molle » à la tête de la CUB. Seule crainte du leader de l’opposition municipale à Alain Juppé : que ce dernier cède trop aux grands groupes privés dans les renégociations de délégation de service public (eau, transports…).
Autre voix discordante, Pierre Hurmic, conseiller municipal EELV à Bordeaux, se dit « hostile à cette gouvernance qui installe un club de maires à la tête de la CUB. Cet accord confirme le choix traditionnel d’une intercommunalité de guichet repliée sur l’identité communale, au détriment de l’émergence de l’intérêt métropolitain, par essence supra-communal. Par ailleurs, cet accord, bricolé dans la précipitation pour sauver à tout prix la cogestion, tourne résolument le dos aux engagements électoraux pris par une partie des signataires. »
Même pas sur la répartition des vice-présidences ?
Communauté d’avenir en proposait 14 pour la majorité et 6 pour la minorité, ce qui ne répondait à aucune logique, ni de population ni de représentation des maires, à égalité à la CUB (14 à droite comme à gauche). Nous ne sommes pas des marchands de tapis et sommes arrivés à 13-7. Parmi les délégations importantes proposés par Alain Juppé, plutôt que les finances, nous avons préféré prendre les ressources humaines, délégation plus concrète et qui permet de suivre ce qui se passe à l’intérieur de la maison (NDLR : et d’éviter ainsi que la mutualisation des services de la Ville de Bordeaux et de la CUB, voulue par Alain Juppé, n’aboutisse à un contrôle de la seconde par la première). Je serai moi-même en charge de la métropolisation, pour prépare le changement de statut de la CUB en 2015, et l’application de la loi métropole…
« Pas de centralisation effective »
Voyez vous une contradiction chez Communauté d’avenir, qui souhaite que la CUB se recentre sur son cœur de métier et plaide par ailleurs pour mutualiser davantage dans certains domaines ?
La loi métropole indique que plus on mutualise, plus on obtient de dotations de l’Etat. Et nous avons deux ans pour transférer les compétences des équipements culturels et sportifs d’intérêts métropolitains – le Grand Théâtre de Bordeaux ou le Pin Galant de Mérignac, par exemple. Mais ces transferts ne pourront se faire qu’avec une majorité des deux tiers au conseil de CUB, que n’a pas seule Communauté d’avenir. Je ne crois pas non plus à une centralisation excessive dans ces domaines, car elle suppose que les communes soient privées de tout pilotage de la programmation de salles, qui pour certaines fonctionnent bien.
Et concernant la desserte de l’aéroport de Bordeaux-Mérignac par le tramway ?
Nous sommes d’accord pour une prolongation de la ligne A vers l’aéroport, ce qui permettra de ne pas avoir de rupture de charge depuis le centre-ville. Mais je souhaite qu’il permette de désenclaver la zone aéroportuaire, deuxième bassin d’emplois de l’agglomération actuellement délaissé par les transports en commun. L’idée d’un liaison vers Pessac et la gare Saint-Jean par un bus à haut niveau de service ou un tramway sur pneu figure aussi dans l’accord. Cela n’exclut pas le projet de Vincent Bolloré mais on doit regarder si sa technologie fonctionne.
Suite à la victoire de Franck Raynal, et de l’abandon probable du projet d’extension du zoo de Pessac, le président de la région Aquitaine, Alain Rousset, évoque l’hypothèse d’agrandir cet équipement sur les terrains de la commune de Mérignac. Que lui répondez-vous ?
Le zoo ne figure pas dans notre projet municipal pour Mérignac, nous n’avons pas fait campagne là dessus. C’est un dossier très lourd, pour un équipement qui peut certes paraître attractif. Mais ce n’est aujourd’hui pas d’actualité.
Quelles vont être vos priorités pour Mérignac ?
Nous voulons renforcer son côté ville verte, qui a démarré avec la plantation symbolique, et prévue par mon prédécesseur, de palmiers, la semaine dernière sur la place Charles de Gaulle. Mais aussi garder notre dynamique de ville en mouvement, avec la fin de la régénération du centre-ville, et l’attractivité économique – nous avons encore reçu la semaine dernière les représentants d’une entreprise israélienne leader mondial des drones, qui souhaite s’installer ici. Nous voulons aussi mieux concerter la population, et des assemblées de quartier vont avoir lieu pour modifier et améliorer le fonctionnement des conseils de quartier.
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