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Effet papillon contre la déviation du Taillan-Médoc

Le tracé de la déviation routière du Taillan-Médoc menace l’Azuré de la Sanguisorbe, une espèce en très mauvais état de conservation en France, estime la cour administrative d’appel de Bordeaux. Le département doit retoquer son projet.

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Effet papillon contre la déviation du Taillan-Médoc

Le papillon azuré de la sanguisorbe (Take Time/flickr/CC)
Le papillon azuré de la sanguisorbe (Take Time/flickr/CC)

Saisi par France nature environnement (FNE), la Sepanso Gironde et la LPO Aquitaine (ligue de protection des oiseaux), le tribunal administratif de Bordeaux avait annulé le 30 juillet 2015 l’arrêté du préfet de la Gironde portant dérogation à l’interdiction de destruction d’espèces protégées et de leurs habitats.

Alors que conseil départemental de la Gironde, porteur du projet de déviation routière, jugeait l’impact sur le papillon « faible ou nul », la cour administrative d’appel a confirmé début juillet le jugement, et condamné l’Etat et le département à verser 2000 euros aux trois associations. Motif :

« Il ressort des pièces du dossier que le projet de tracé de la déviation routière du Taillan-Médoc, qui traverse la seule station connue en Gironde et une des deux seules d’Aquitaine du papillon azuré de la sanguisorbe, conduit à une destruction partielle de l’habitat naturel de ce papillon, en très mauvais état de conservation au niveau national et faisant l’objet d’un plan national d’action. »

« Site naturel exceptionnel »

Or, poursuit la cour, « des spécimens de ce papillon et des pontes ont été recensés à seulement quelques mètres à l’ouest de l’emprise du projet ».

« Si FNE est satisfaite de cette nouvelle victoire, a commenté l’association dans un communiqué, il importe surtout que cette nouvelle décision de justice ramène à la raison les défenseurs de cette déviation qui passe au pire endroit et détruit un site naturel exceptionnel (79 espèces protégées inventoriées sur 7,8 km de tracé). »

Cela n’en prend pas le chemin, si on suit bien Frédéric Perrière, directeur général adjoint du département, en charge des territoires :

« La cour administrative d’appel a en fait rendu deux jugements, dont un est positif pour nous : alors que deux arrêtés préfectoraux avaient été annulés en première instance, celui relatif à la loi sur l’eau (en autorisant la destruction de plus de 11 hectares de zones humides, NDLR) a été validé. C’est plutôt une bonne nouvelle car cela nous évite de recommencer à zéro. Le tribunal considère en revanche que nous n’avons pas pris suffisamment de mesures pour l’azuré. Nous allons redéposer un dossier avec l’État pour présenter mesures qu’on va prendre. »

A priori pas question d’aller en Conseil d’État, le département et la préfecture comptent donc présenter un nouvel arrêté pour déroger à l’interdiction de destruction d’espèce protégée. Selon Frédéric Perrière, il pourrait par exemple prévoir l’installation de haies, afin de freiner l’imprudent papillon, dont chacun sait qu’il traverse la route sans regarder.

35 millions d’euros les huit kilomètres

De toutes façons, et au grand dam des associations, le conseil départemental mise aussi sur la politique du fait accompli, puisque les travaux ont déjà commencé, malgré les procédures en cours. Une dizaine de millions d’euros, sur un budget de 35 millions, ont déjà été dépensés pour le défrichement et la construction de giratoires. Objectif : faire passer une 2X2 voies à l’ouest du TaiFluidifier la circulation sur la route départementale 1215 pour « améliorer les relations entre la métropole bordelaise et le Médoc », est « une priorité » :

« 20000 véhicules, dont 1000 camions, passent chaque jour au Taillan, et il n’est pas rare de mettre 20 minutes pour traverser la commune, indique Frédéric Perrière. Après la déviation de Castelnau, celle de Lesparre est dans le tuyaux  et d’autres projets sont engagés ».

Au cabinet du maire du Taillan, on se dit « confiants sur la suite des opérations » :

« Après tout, on a attendu 30 ans donc on tiendra 6 mois de plus. Mais on est un peu désappointés qu’on privilégie la sauvegarde d’un papillon à celle des vies humaines. Il n’y a pas eu d’accident grave depuis quelques temps car les piétons font attention mais nous craignons qu’un se produise tôt ou tard. Et puis la ville est coupée en deux par la départementale. »

Papillon menacé ou pas, on voit mal comment ce projet de déviation, poussé par l’État et les élus locaux, pourrait battre de l’aile.


#azuré de la sanguisorbe

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