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A Bordeaux, les salariés SFR ne veulent pas se laisser faire

L’annonce, par la direction du groupe SFR, d’un plan visant la suppression de 5000 postes dans sa branche Télécom, plonge les salariés du groupe dans l’incertitude. À l’appel de plusieurs syndicats minoritaires, dont la CGT, une journée de mobilisation nationale a eu lieu aujourd’hui.

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A Bordeaux, les salariés SFR ne veulent pas se laisser faire

Devant le magasin SFR rue Sainte-Catherine à Bordeaux (CP/Rue89 Bordeaux)
Devant le magasin SFR rue Sainte-Catherine à Bordeaux (CP/Rue89 Bordeaux)

« T’es un vendeur ou t’es pas un vendeur ? », lance une militante CGT à son collègue tout en refourguant un tract à un passant. Il est 14h30 et depuis une demi-heure, une trentaine d’employés du groupe SFR se sont rejoints devant le magasin de la rue Sainte-Catherine. Vendeurs ou responsables de magasins, ils hèlent les passants sous un soleil de plomb.

« Vous voulez savoir pourquoi les salariés de SFR font grève ? ». Oui.

« Aujourd’hui, nous nous battons pour sauver nos emplois », explique Daniel Sellin, responsable d’un point de vente à Saint-Médard et délégué CGT. Le 4 août, la CFDT et l’UNSA, les deux syndicats majoritaires au sein de SFR Télécom, ont donné leur accord pour un plan visant à supprimer un tiers des effectifs de l’entreprise, soit 5000 postes. Un chiffre qu’on peine à se représenter. « De quoi remplir 30 Airbus A380 », illustre le délégué CGT. Dans les faits, il ne s’agit que d’une nouvelle étape d’un conflit qui dure depuis presque trois ans.

Les origines du mal

Avril 2014. SFR est détenue par le groupe Vivendi. Le géant de la télécommunication, qui possède notamment le groupe Canal+, entre en négociation avec Altice, la multinationale à la tête de Numericable. Le groupe de Patrick Drahi, après trois mois de levée de fonds, prend le contrôle de SFR. Suite à la plus grosse opération de fusion de l’année, les deux groupes devienne une seule et même entité : Numericable-SFR.

« Le champion français du très haut débit », comme s’en vante à l’époque Patrick Drahi dans un communiqué. Mais dès le début, le géant à des pieds d’argiles. Les 13,3 milliards d’euros qui ont financés la fusion ne viennent pas directement des poches de son nouveau propriétaire mais d’une levée de fonds. Le nouveau monstre du secteur, à peine né, a déjà des dettes considérables : 11,6 milliards d’euros, majoritairement des obligations.

Cette contrainte, à laquelle s’ajoute des résultats inquiétants pour le groupe – 175 millions d’euros de pertes nettes en 2014 –, inquiète déjà les syndicats. Pour survivre, l’entreprise va devoir gagner plus… et surtout économiser. La direction promet une garantie sur l’emploi de trois ans. Pas de licenciement avant 2017, donc.

Mais en mai 2015, les salariés se mettent en grève. L’ambiance dans l’entreprise s’est dégradé et le spectre de la délocalisation pointe le bout de son nez. Le Canard Enchainé révèle que le groupe cherche à délocaliser ses centres d’appels à Madagascar, où les salaires sont bien moindre.

Malgré un relatif apaisement, le conflit a repris de plus belle cet été avec l’annonce de deux vagues de suppression de postes, 1 000 avant fin 2016 avec la restructuration du pôle distribution du groupe, puis 4 000 entre juillet 2017 et fin 2019. Un moyen, pour le deuxième opérateur de téléphonie du secteur, d’endiguer la crise qu’il traverse : son chiffre d’affaire a chuté d’un peu moins de 6 % au premier semestre 2016.

Mauvaise passe

La promesse que les postes supprimés se feront sur la base de départ volontaire ne suffit pas à apaiser l’inquiétude des salariés :

« Seules deux instances ont signé l’accord et la distribution n’a pas été invitée à la table des négociations, explique Daniel Sellin. Nous ne remettons pas en cause le projet de l’entreprise. »

Le groupe envisage de devenir leader sur le marché en s’appuyant sur une relation client hors norme. « Mais cela semble compliqué avec une telle réduction d’effectif. »

L’entreprise, en effet, est dans une mauvaise passe. Son bilan pour le second semestre 2016 affiche des chiffres inquiétants : 58 000 clients de moins pour l’internet fixe et 334 000  autres perdus pour les abonnements mobiles.

Sur Bordeaux comme ailleurs, la situation est critique. La fusion des deux groupes a déjà entraîné la fermeture de certains magasins et la pression se reporte sur les points de ventes toujours existant.

« Tous les jours, des gens viennent se plaindre dans les magasins et nous avons du mal à les aider », regrette Daniel Sellin.

SFR, champion des litiges

Les vendeurs, de moins en moins nombreux, font face à deux fois plus de clients. Certes, le réseau mobile SFR est efficace dans les zones urbaines denses et l’entreprise progresse sur la qualité de ces lignes internets. En juin 2016, l’opérateur a ouvert 533 nouveaux sites 4G (6 828 en tout) et le groupe comble rapidement son retard sur ces concurrents Bouygues (8 346) et Orange ( 8 988).  Mais cette avancée semble se faire au détriment des usagers qui constatent de nombreux dysfonctionnement. Difficultés pour résilier leurs abonnements, options non demandées facturées… : à lui seul, le groupe SFR concentrait, en 2015, 44 % des litiges du secteur – pour 20 % du marché.

« La qualité du service après vente est mesuré sur le nombres d’appels pris », explique un autre militant de la CGT Fapt. Un critère d’évaluation plus quantitatif que qualitatif qu’il critique ouvertement. « C’est évident qu’il faut améliorer notre politique client pour que l’entreprise soit pérenne. » Mais réduire les effectifs « n’arrangera pas le problème, au contraire ».

Pour le syndicat CGT Fapt, cela risque d’entraîner la fermeture de nombreux espaces clients, en Gironde comme ailleurs. Une hypothèse sensée mais difficile à valider : les syndicats n’ont pas encore été mis au courant des critères d’accessibilité au plan de départ volontaire et ne savent pas quels magasins seront touchés.


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