Il ne faut jamais renoncer au plein emploi à condition que la production et la consommation restent compatibles, bien entendu, avec une planète en bonne santé. Mais le plein emploi est-il synonyme de plein épanouissement ?
Soyons pragmatiques et observons ce qui se passe dans les pays où le taux de chômage est faible. Des emplois bien rémunérés, stables, des emplois épanouissants certes, mais à quel pourcentage et pour combien de travailleurs ? Et combien, en revanche, de mini jobs, emplois précaires, emplois sous-payés, combien d’emplois qui ne donnent aucun sens aux activités qu’ils contiennent et ne procurent aucune satisfaction à ceux qui les occupent, hormis celles de pouvoir nourrir sa famille et boucler ses fins de mois ?
Le débat déclenché par la proposition d’un revenu universel (Benoît Hamon, l’ex-ministre de l’éducation suggère que ce revenu soit étendu à terme à l’ensemble de la population et atteigne 750 € mensuels, NDLR) s’est malheureusement dogmatisé. Il a été perverti par ses détracteurs qui s’auto-proclament comme les seuls défenseurs de la valeur « travail ».
Mais de quel travail parle-t-on ? Celui qui est effectué par les bénévoles des associations, celui des parents qui cuisinent chaque jour, jardinent ou bricolent dans leurs maisons ? De celui qui est rémunéré sur le marché du travail et que l’on appelle plus communément « l’emploi » ?
Postures électoralistes
On entend de ci de là que le travail épanouit, insère dans la société ou bien qu’il est aliénant et peu émancipateur. Énoncés comme des vérités, ces propos s’apparentent plus à des pensées dogmatiques ou des postures électoralistes, ils ne grandissent pas ceux qui les profèrent et ne contribuent pas au développement d’une société du bien-être.
Autres postures électoralistes, que celles qui consistent à étiqueter d’irréalistes des propositions nouvelles sous prétexte qu’elles sont portées par un concurrent lui aussi en campagne.
L’attitude politiquement correcte ne devrait-elle pas au contraire d’interroger des propositions innovantes et chercher avant de les idéaliser ou de les diaboliser, d’en mesurer la portée et les conséquences, non seulement comptables et financières mais également humaines ? Pourquoi ce qui est acceptable pour l’innovation technologique ne le serait pas pour l’innovation sociale ? Pourquoi la recherche ne pourrait-elle pas être aussi au service d’innovations sociétales ?
Plafond de verre
Le débat participatif qui inclut les acteurs de terrain et l’expérimentation sont les alternatives à la pensée politique dogmatique qui envahit les campagnes électorales. Si on s’inscrit dans cette démarche interrogative et pragmatique, il n’est plus utile de renoncer à des projets ambitieux, qui, parce que taxés d’irréalistes dans les débats de la politique professionnelle, se rabougrissent au cours des campagnes et réduisent l’ambition d’un revenu universel à un « RSA jeunes » qui pourrait avoir toute sa pertinence, mais perd totalement sa nature d’universalité.
La raison politique voudrait que l’on avance pas à pas, mais c’est la raison politique des campagnes électorales, celle qui promet et dont on ne sait jamais si on passera un jour des promesses à l’action. En revanche, la recherche scientifique nous offre chaque jour de nombreux exemples d’expérimentations qui se généralisent et pénètrent la société. Mais il est vrai que cela concerne surtout le domaine technique ou celui de la santé. Ne faudrait-il pas franchir ce plafond de verre qui empêche les décideurs politiques de mettre à égalité les progrès humains avec les progrès techniques ? Une question avant tout de convictions philosophiques !
Chargement des commentaires…