La mobilisation des défenseurs de la cabane de L’Alexandre aura payé. La mairie de Lacanau a confirmé ce mardi la sauvegarde de cette cabane construite sur la dune au nord de la commune, et que l’Office national des forêts (ONF) voulait démolir, comme bien d’autres avant elle.
« Elle va rester en place, confirme Laurent Peyrondet, le maire de Lacanau, à Rue89 Bordeaux. C’est la seule qui reste de toutes les autres cabanes et les Canaulais y sont attachés. Elle fait partie de notre identité, notre esprit, notre jardin secret… »
En effet, plusieurs figures canaulaises s’étaient mobilisées et une pétition lancée sur internet avait recueilli plus de 1000 signatures pour venir au secours de cette construction « faite de matériaux de récupération ramassés sur la plage, et [qui] se fond parfaitement dans le décor ».
« Il y avait un problème de responsabilité et c’est ça qui gênait surtout l’ONF, ajoute l’édile. On réfléchit à un partenariat avec une association pour la prendre en charge. »
Pour l’ONF, « ces cabanes ont tendance à se multiplier et, étant régulièrement occupées quand il fait beau, posent un souci de sécurité par rapport au risque incendie », rapporte Sud Ouest.
Un havre de paix
Défenseur convaincu de « l’esprit » cabane, Francis Maugard, figure locale, parle d’un emblème qui « représente l’évasion, le rêve ». Selon lui, la cabane de L’Alexandre a été construite il y a une vingtaine d’année par « un passionné de la mer et de l’océan », un certain Bruno Rougerie aujourd’hui disparu. Au fil du temps, d’autres personnes ont contribué à son aménagement et son amélioration.
Ancien médecin à Bordeaux, aujourd’hui âgé de 87 ans, Francis Maugard coule une retraite paisible à Lacanau où il s’adonne à la peinture et la poésie. Ayant pratiqué le surf dès les années 1960, il dit avoir toujours vu et connu plusieurs cabanes/refuges dans les dunes, et en avoir même habité certaines.
« Il ne s’agit pas que de simples constructions, mais de havres de paix où les surfeurs viennent se reposer pour être en communion avec la nature et l’océan. C’est une philosophie, un art de vivre. Certains viennent avec leurs familles, les enfants y passent des moments magiques et merveilleux. »
Pour les défenseurs de la cabane de L’Alexandre, « il n y a aucune raison valable ni logique pour qu’une cabane comme celle-ci soit détruite parce que si elle part, elle part avec tous nos souvenirs ».
En effet, des souvenirs, il y en a plein les post-it accrochés sur ses murs en bois flotté. Cette cabane a fait le bonheur de tous les amoureux de ce coin sauvage de Lacanau bien à l’abri pendant l’été et à l’écart des hordes de vacanciers qui envahissent les plages médoquines dès les beaux jours.
Un secret bien gardé
Un havre de paix, certes, mais pas pour longtemps, craignait le maire depuis la diffusion de la mobilisation sur les réseaux sociaux. Cependant, un blog évoquait déjà, au lendemain du 7 août 2009, que « le 8, tout a changé, lorsque Sud Ouest a publié un joli article décrivant et localisant le petit coin de paradis ». Jusqu’à ce jour, la plage de L’Alexandre « était un petit coin tranquille où seuls les initiés se retrouvaient, une plage presque vide même en pleine folie estivale, un lieu improbable alors qu’à moins de deux kilomètres on se bat parfois pour poser la serviette ».
Un autre blog (c’est dire combien cette plage fait rêver) raconte :
« L’Alexandre, c’est un secret bien gardé. Les hôtesses de l’office du tourisme de Lacanau ne la connaissent pas ou ne la conseillent pas. Il n’y a aucun panneau qui l’indique, mis à part les minuscules écriteaux de la piste cyclable. Une fois la voiture garée, il faut marcher à travers pins. Longtemps. »
Votre serviteur confirme, la plage est accessible par un long chemin qui traverse la forêt de pins, et ensuite à travers la dune : un vrai parcours sportif !
La légende du bateau
Si l’auteur du premier blog raconte que le lieu-dit tire son nom d’ « un bateau baptisé “L’Alexandre” [qui] se serait échoué sur ce bout de plage », et dont on voit quelques vestiges à marée basse, un autre blog assure que cette épave est celle d’un bateau espagnol échoué en 1936 et qui porte le nom de « Le Cantabria », nom donné à une voie à Lacanau.
« En pleine guerre d’Espagne, le 26 août 1937, des centaines de réfugiés politiques fuyant le régime de Franco et la guerre civile de leur pays natal prennent place à bord du Cantabria depuis le port de Santander. Sur la côte de Lacanau, troublé par la brume et les lumières de la ville, il s’échouera vers 3h du matin avec 497 personnes à son bord. Fort heureusement, au petit matin, les réfugiés ont pu descendre sur la plage et trouver la solidarité des locaux qui les ont ravitaillés, accueillis et soignés. »
Une couverture de L’Illustration et quelques cartes postales confirment cette dernière version. D’une légende à l’autre, la plage de L’Alexandre et sa cabane n’ont visiblement pas fini de faire rêver.
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