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Alain Juppé fait le vœu pieux d’éteindre la flambée des prix de l’immobilier

Pour le maire de Bordeaux, la hausse du marché de l’immobilier à Bordeaux est une conséquence de l’attractivité de la ville. Alain Juppé annonce notamment la mise en place d’une nouvelle stratégie foncière pour changer les modalités de calcul de la valeur des terrains. Objectif : baisser leurs prix et construire ainsi des logements neufs plus abordables.

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Alain Juppé fait le vœu pieux d’éteindre la flambée des prix de l’immobilier

9000 logements sont désormais construits chaque année sur la métropole bordelaise, contre 4400 sur tout le reste de la Gironde. Mais cela ne suffit manifestement pas à étancher la soif du marché immobilier, qui a encore bondi de 12,1% à Bordeaux l’an dernier, selon les notaires de France, soit la plus forte augmentation hors Paris.

Tout en se réjouissant de « la relative stabilité des loyers » (de moins de 1% par an depuis 10 ans, même si les études constatent que Bordeaux est devenue l’une des plus chères villes de France ), Alain Juppé a, lors de ses vœux à la presse ce lundi, évoqué ces « tensions sur l’immobilier ». Elles sont dues selon lui à l’attractivité retrouvée de la ville-centre, qui a regagné près de 50000 habitants en 35 ans.

« La difficulté que je reconnais, c’est l’accession à la propriété à des prix maîtrisés », estime le maire de Bordeaux.

Pour répondre aux problèmes rencontrés surtout par les primo-accédants, le maire de Bordeaux avouait lors du conseil extraordinaire de métropole (consacré le 21 décembre dernier à l’habitat) que les élus locaux sont « démunis sur l’immobilier ancien où les logements s’arrachent et les prix flambent » (embêtant, car c’est l’ancien qui tire tous les prix vers le haut, comme nous l’expliquions ici).

Des ZAD à Bordeaux

L’objectif reste donc selon Alain Juppé d’une part de maintenir le rythme actuel de constructions neuves, avec plusieurs milliers de logements attendus sur les grandes opérations (Bassins à flot, Ginko, Euratlantique, Brazza, Bastide Niel). Parmi les projets en cours figurent l’opération pilotée par un établissement public, la Fabrique métropolitaine (la FAB) :

« 50000 logements rentre en phase vraiment opérationnelle, avec 2500 logements qui seront livrés en 2018-2019, indique Jacques Mangon, vice-président de la métropole en charge de l’urbanisme. Sur ce nombre, 20 à 25% seront en accession à prix maitrisé, à 2500 euros le m2 (contre 4350 au prix du marché). C’est moins que ce que nous visions – un tiers d’accession à prix maîtrisée, un tiers d’accession libre, un tiers de logements sociaux -, mais c’est déjà pas mal sachant que beaucoup nous disaient que nous n’y arriverions jamais ! »

D’autre part, après des années de laisser-faire, Alain Juppé parle désormais de mieux contrôler le marché immobilier, avec un nouvel outil, l’établissement public foncier (EPF) de la région Nouvelle-Aquitaine. Pour « geler les prix des terrains », le maire de Bordeaux demande ainsi à ce dernier de créer des zones d’aménagement différé (ZAD), notamment sur le territoire de l’opération d’intérêt métropolitain Bordeaux Aéroparc (même si celui-ci, situé sous les couloirs aériens, est pour l’heure exclusivement dédié aux activités économiques, lire notre encadré ci-dessous).

Usage

Le président de Bordeaux Métropole évoque en outre une nouvelle « stratégie foncière », présentée par le maire de Saint-Médard-en-Jalles le 21 décembre en conseil de métropole. L’objectif est d’évaluer les prix des terrains en fonction de leur valeur d’usage, et non plus comme actuellement en fonction de leur valeur de projet.

« Nous voulons changer le paradigme en vigueur, explique Jacques Mangon. Le prix du foncier n’est pas assis sur sa valeur propre, mais sur la capacité que le plan local d’urbanisme (PLU) donnera à ce terrain. On arrive à des tendances très inflationnistes car une maison sur un terrain de 1500 m2 n’est pas vendue à son prix, mais à celui des 50 appartements qui pourront être réalisés à sa place. Nous voulons passer à la valeur vénale de maintien d’usage de cette maison. »

D’ici un mois, la métropole espère « une contractualisation avec les promoteurs et tous les acteurs de la filière », dont l’EPF. Jacques Mangon estime que « la situation ne peut pas continuer ainsi », même pour les promoteurs immobiliers :

« Il leur faut des clients, or les prix du marché libre dépasse totalement les capacités des ménages. Les promoteurs ne vont pas courir le risque de se rémunérer pendant un an ou deux, puis voir le marché s’effondrer. Bordeaux est un bon marché, il faut qu’il soit pérennisé. »

Président de la Fédération régionale des promoteurs immobiliers, Alain Ferrasse confirme des « discussions très positives » avec la métropole :

« Tous autant que nous sommes, nous avons la volonté autant que faire se peut de faire baisser la pression sur les négociations en matière d’achats de terrains, et d’accompagner ainsi la collectivité dans son souhait de maîtriser les coûts du logement. Nous avons demandé un certain nombre de choses aux élus. Pour préciser aux propriétaires que les prix ne seront plus ce qu’ils étaient jusqu’alors, il serait intéressant que les mairies puissent établir des fiches terrains, indiquant les m2 que les élus veulent construire, ce qui donnerait une jauge plus réelle que ce que le PLU indique. »

Le doigt dans la charte

Quelles seront les moyens de contraintes et de contrôle ? Les promoteurs seront-ils tenus d’adhérer ? Selon Jacques Mangon, les contours précis de cette stratégie seront exposés dans quelques semaines, mais il ne devrait pas s’agir d’une nouvelle charte sans fondement juridique. La métropole en espère « un choc de l’offre à prix maîtrisée », permettant aux promoteurs de passer de 200 à plus de 1000 logements par an en accession maîtrisée à la propriété, soit autour de 3000 euros le m2.

« Cela ne marchera que si tout le monde s’entend et si le public (Etat, collectivités…) s’applique ces règles à lui même ; il ne devra plus vendre au plus offrant », ajoutait Jacques Mangon en conseil de métropole.

Lors de sa conférence de presse, Alain Juppé a par ailleurs rappelé qu’une « charte du bien construire » serait présentée en conseil de métropole en janvier. Les promoteurs seraient tenus de prendre plusieurs engagements, notamment le recours à un architecte tout au long du processus de construction, et une évaluation périodique de la qualité des logements livrés. Dans le viseur depuis l’affaire du balcon effondré, les logements de Ginko satisferaient toutefois 80% des habitants du nouveau quartier, selon une enquête évoquée par le maire (mais encore non publique).

Prier les promoteurs de construire mieux, moins cher, et de façon volontaire : la lune est demandée au port du même nom.


#urbanisme

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