C’est le seul magasin où le client est vraiment roi. Supercoop est en effet fondé sur les principes participatifs et coopératifs. Le concept : acheter une ou plusieurs parts de l’entreprise à 10€ chacune et donner trois heures de son temps par mois pour pouvoir faire ses courses. Excepté deux salariés, l’intégralité des membres de Supercoop est donc constituée de « coopérateurs », des bénévoles.
Après avoir eux-mêmes construit le nouveau supermarché (rayons, électricité, locaux…) sur un immense plateau, ils participent au fonctionnement du magasin, à l’accueil, aux caisses ou à la mise en rayon. Cette absence de masse salariale permet au supermarché de proposer des prix 20% à 40% moins cher que dans des magasins similaires.
La République en marge
Au-delà de l’aspect coopératif, Supercoop ne propose que des aliments bio ou raisonnés et locaux – les producteurs sont sélectionnés dans un périmètre de 300km. Supercoop s’engage d’ailleurs à prendre une marge unique de 17% sur tous les produits directement réinvestis dans le magasin. Pour Jean-Paul Taillardas, l’un des fondateurs, la cohésion sociale est le cœur même du projet :
« Notre mot-clé essentiel c’est le rapport direct avec tous les acteurs : consommateurs, producteurs ou coopérateurs. On se tutoie, comme une grande famille. On veut absolument inclure toute la population. C’est pour ça qu’on s’est implanté dans un quartier politique de la ville, où il y avait peu de commerce : on veut absolument toucher des catégories de personnes qui se sentent exclues du bien manger alors que cela s’adresse à tous. »
Ouvert tous les après-midi, six jours sur sept, le magasin cherche à agrandir la « famille », et trouver de nouveau coopérateurs pour élargir les horaires d’ouverture. D’où ces portes ouvertes à tous jusqu’à ce samedi soir.
« On est aujourd’hui 600 coopérateurs, mais pour être ouvert toute la journée, il faudrait être 1200, explique Jean-Paul. On garde espoir de trouver de nouvelles recrues : depuis le début de la semaine, beaucoup de personnes sont venues se renseigner, d’autres ont fait des achats. Radio trottoir a bien fonctionné. »
Virage éducatif
« La localisation n’est pas anodine », poursuit-il. Situé près de l’arrêt de tram Terres Neuves et de l’arrêt Auriac des bus 26 et 11, Supercoop espère également avoir un impact sur les débats contre la malbouffe. Françoise Queille, coopératrice, annonce de futurs partenariats :
« La directrice de l’école maternelle Carle Vernet est venue nous rendre visite et souhaiterait venir avec des classes pour des ateliers pédagogiques. Les enfants sont prescripteurs, c’est eux qu’il faut toucher, leur expliquer comment bien s’alimenter et cuisiner, avec des produits frais. »
Le centre social souhaiterait lui aussi créer des ateliers dans cette même visée pédagogique.
« Attention, nous ne sommes ni des profs, ni des bobos, souligne Françoise. Notre but, ce n’est pas d’imposer une façon de consommer. On veut vraiment mettre la tolérance en avant. On veut seulement donner des clés, des astuces pour ceux qui ne sont pas familiers à ces produits. »
Les coopérateurs qui souhaite compter 20% de coopérateurs de milieu social défavorisé.
« On veut du brassage social ici, hors de question de faire de l’entre-soi. Et on ne dit jamais “bénévole” : nos adhérents ne sont plus chômeurs, inactifs, retraités mais coopérateurs. En créant ces liens aussi, on essaie de limiter la solitude. »
Tout droit venu de Brooklyn, le projet s’est d’abord exporté à La Louve à Paris avant d’essaimer à Lille, Montpellier et Bordeaux. La Louve a d’ailleurs été un tuteur pour Supercoop notamment sur les problèmes juridiques. C’est désormais à Supercoop de prendre ce rôle, notamment pour les futurs projets d’Orthez, Soulac et même Brest.
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