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Les étudiants mal-logés ont secoué le Crous de Bordeaux

Une nouvelle action du Collectif Mal logement étudiant a eu lieu ce vendredi après-midi devant les locaux du Crous (centre régional des œuvres universitaires et scolaires) de Bordeaux-Aquitaine. Il demande la mise à disposition des logements vides, alors que le Crous affirme que ses résidences universitaires sont pleines.

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Les étudiants mal-logés ont secoué le Crous de Bordeaux

Ils étaient une vingtaine vendredi après-midi à attendre devant les grilles fermées du Crous, au 18 rue du Hamel pendant qu’une délégation de deux étudiants était reçue par le directeur adjoint du Centre régional des œuvres universitaires et scolaires.

La plupart des manifestants s’étaient déplacés par solidarité, d’autres pour témoigner et attendre des réponses. Comme Mouctar : cet étudiant en deuxième année de sociologie se dit « en situation irrégulière dans un logement Crous ». L’an dernier, le jeune homme de 21 ans était logé dans une chambre au village 1 près de l’arrêt de tram Arts et Métier. Mais au mois de juillet, sa demande de renouvellement a été refusée.

« Je suis le seul de mon couloir de Cité U à être dans ce cas or je ne comprends pas pourquoi je n’ai jamais posé de problèmes et j’ai toujours payé mon loyer. Je me sens victime d’injustice, énumère Mouctar. On m’a demandé de quitter ma chambre avant le 31 août mais je suis resté, je n’avais nul part où aller, la rentrée approchait et mes parents habitent au Mans, c’est beaucoup trop loin pour faire des allers-retours… »

« Je suis un étudiant en situation irrégulière »

Le Crous lui a alors accordé un délai supplémentaire, jusqu’au 15 octobre, pour quitter les lieux avant d’enclencher une procédure d’expulsion, explique l’étudiant. Morose, il confesse ne plus oser parler de sa situation en détail à ses parents de peur de les inquiéter.

« Psychologiquement c’est une période vraiment dure à traverser d’autant que je ne comprends pas pourquoi je n’ai plus le droit d’avoir une chambre en résidence Crous. On me répond seulement que la chambre a déjà été loué.»

À côté de lui, Lucie (le prénom a été changé), 20 ans, voit elle aussi les jours s’égrener, sans solution de logement à l’horizon.

« Je dors sur le canapé d’une amie depuis début septembre mais j’ai l’impression que ça fait des mois, témoigne t-elle. Mes affaires sont entassées dans le placard de sa salle de bain, on est à l’étroit, heureusement qu’elle est accueillante ».

Le serpent qui se mord la queue

L’année dernière l’étudiante en psychologie partageait un studio du Crous à 640€ à la Victoire, avec deux lits, soit 320€ de loyer par personne. Mais l’amie avec qui elle partageait sa chambre a préféré changer de logement pour la rentrée et Lucie n’a pas pu redemander une chambre double au Crous faute de connaître d’autre colocataire potentielle.

« Je me rends trois ou quatre fois par jour sur les sites d’annonce de location. En un mois je n’ai pas réussi à visiter ne serait-ce qu’un logement tellement ils sont pris d’assaut. Les rares propriétaires qui me répondent veulent que mon garant gagne 4 fois le loyer. Celui-ci est souvent autour de 500 ou 600 € or mon père gagne 1700 € par mois, c’est impossible ! »

La jeune femme qui vient des environs de Narbonne a même hésité à retourner chez ses parents cette année car elle doit redoubler sa Licence 3.

« Je pensais venir à Bordeaux juste pour passer les examens mais j’avais aussi besoin de trouver un travail pour mettre de l’argent de côté en vue de faire un master. C’était plus simple de tout faire dans la même ville. »

Résultat, trop occupée par la recherche de logement, elle n’a pas encore trouvé d’emploi, hormis quelques heures de soutien scolaire.

« Et sans emploi, je peine à avoir assez d’argent pour trouver un logement dont je puisse payer le loyer. C’est le serpent qui se mord la queue ».

Pour se sentir épaulée, Lucie s’est tournée vers le Collectif Mal logement étudiant.

« Je suis aussi en contact avec des gens qui vivent en squat, j’essaye de trouver de nouvelles solutions de logement. »

« Il faut arrêter d’avoir honte »

La jeune femme espère que son témoignage en appellera d’autres, « pour faire bouger les choses et que le Crous donne des solutions. » Surtout, elle ne veut plus se taire. « Il faut arrêter d’avoir honte de parler de ses problèmes d’argent ou de logement. »

Au 18 rue du Hamel, la porte de la grille du Crous, grince sur ses gonds. Les deux membres du collectif sortent après une heure de discussion sans être parvenus à connaître le nombre de logements vides. La divulgation de ce chiffre faisait partie de leurs revendications.

« On nous a dit que tous les logements étaient occupés, sauf ceux qui sont sous le coup d’une procédure administrative ».

Le collectif était venu aussi demander à être mis en relation avec les étudiants sans logements Crous. Mais là aussi il a fait choux blanc. Le Crous communique en effet sur le nombre de places disponibles : 7500 sur Bordeaux Métropole, 10 200 en tout sur l’académie de Bordeaux. Mais pas sur le nombre d’étudiants qui n’ont pas vu leur demande de logement aboutir.

« Les listes d’attentes sont fermées si nous n’avons pas de places à proposer. Donc pas d’attente en vain de la part des étudiants », indique le Crous, contacté par Rue89 Bordeaux.

« Pas de listes d’attentes, ça veut dire pas d’évaluation du nombre d’étudiants sur le carreau » regrette l’un des deux membres du collectif.

Il souhaite mettre en place un partenariat pour apporter de l’aide et des conseils aux étudiants qui en ont besoin.

Il a aussi demandé à ce que le Crous fasse de la prévention auprès des étudiants face aux marchands de liste, qui vendent pour 200€ environ, des contacts de propriétaires d’appartement ou de studio.

« C’est légal, mais c’est une arnaque. Le CROUS a dit qu’il allait s’y pencher », détaille le jeune homme à qui on a promis une autre réunion prochainement. Mais sous condition.

« Ils nous recevront à nouveau bientôt, à condition d’arrêter de dire que le CROUS a des logements vides » indique le négociateur à qui l’on a fait sous entendre « que ce serait bien aussi d’enlever ces mentions dans los posts publiés sur Facebook ».

Après discussion, le Collectif a pris la décision d’enlever de ses posts les phrases évoquant les logements vides – «  Notre but est d’établir un rapport de confiance pour trouver des solutions au plus vite ». Vendredi, le collectif a présenté au directeur adjoint les noms des quelques étudiants sans logement présents, en demandant des solutions rapides. Sans résultat pour l’instant.


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