Ça devient un sujet sensible pour Alain Juppé, sur la défensive à l’énoncé de la délibération n°57 au conseil métropolitain ce vendredi. Celle-ci prévoit l’acquisition des îlots B017 et B018 auprès de la SAS Bastide Niel et, dans l’espoir d’en finir avec le conflit qui oppose Darwin et Bordeaux Métropole Aménagement (BMA), de les revendre au groupe Évolution, maison mère de l’écosystème Darwin, ou d’établir un bail emphytéotique.
Au cœur de ce litige, l’îlot B017, d’une surface totale de 2637 m2, abrite Emmaüs et d’autres associations, et le B018, d’une surface totale de 2624 m2, le skate-parc.
Seul hic, le montant de la transaction : 3 millions d’euros hors taxes selon l’estimation faite en septembre 2018 par France Domaines. Or les deux îlots avaient été vendus 600 000 euros – non assujettis à la TVA à l’époque – l’an dernier par la Métropole à BMA ! Le prix du m2 est passé de 120€/m2 à 650€/m2 pour l’îlot B017 et 500€/m2 pour l’îlot B018…
Culbute
« Le rachat n’est pas urgent », estime Emmanuelle Ajon. La conseillère métropolitaine socialiste a demandé – en vain – le report de la délibération et propose de « prendre une décision à la lumière de l’avis rendu par le tribunal » après la médiation juridique en cours (voir encadré).
La veille, dans un communiqué, l’élue s’interrogeait sur l’opportunité de ce rachat :
« A 18 mois d’intervalle, le prix au mètre carré a donc quintuplé, portant le préjudice pour Bordeaux Métropole à 2,4M€, auxquels se rajoutent 600 000 € de TVA qui serait donc apparemment nouvellement applicable. Un manque à gagner total qui se chiffre donc à 3 millions d’euros. »
Emmanuelle Ajon s’inquiète également que « les différentes parties n’ayant pas été concertées, nous n’avons aujourd’hui aucune assurance quant à la volonté de Darwin de racheter ou de louer ces terrains, et si tel est le cas, à quel prix ? ». Elle craint par ailleurs que cela rende « caduque la médiation juridique puisque le litige porte en grande partie sur ces deux îlots ».
De son côté, Pierre Hurmic, conseiller métropolitain écologiste, enfonce le clou sur la plus-value en rappelant par la même occasion l’opposition de son groupe à la délibération de la vente des deux parcelles à BMA en janvier 2017 :
« On a interrogé les services de France Domaines pour connaître la raison de cette culbute. Ils ont évoqué les frais d’aménagement et de dépollution annoncés par l’aménageur. Or, celui-ci n’a pas dépensé un fifrelin puisque le terrain était occupé par Darwin. C’est finalement Darwin qui a donné la plus-value à ce terrain. »
« Interlocuteur bienveillant »
Alain Juppé rétorque à l’élu vert : « A chaque fois que vous prenez la parole, c’est pour m’énerver. » Le président de la métropole assure pourtant répondre « avec le plus grand calme possible » et explique que les 3 millions d’euros correspondent au bénéfice attendu par BMA sur ces deux îlots :
« Si on n’indemnisait pas BMA, ceci dégraderait l’équilibre financier de la ZAC. De plus, ce que je propose n’interfère pas avec la justice et, même mieux, si on est propriétaire, on retire les recours. »
Le président de la métropole espère ainsi devenir un « interlocuteur bienveillant » avec Darwin à qui il reproche à nouveau d’avoir « fait preuve d’une grande maladresse » dans cette affaire. Aux dirigeants de l’écosystème, il rappelle la nécessité d’évacuer les tétrodons et les met en garde sur l’allée cavalière, « voie publique qui est hors de question de privatiser ». Cependant, il dit être prêt à sanctuariser l’espace de la ferme urbaine « alors que faire passer ailleurs les canalisations vers la ZAC couterait bien plus cher ».
La fin des débats est tendue, mais la délibération finalement votée. Un soulagement pour Alain Juppé qui avait reconnu quelques minutes avant que ce n’était pas « la solution idéale » ?
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