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Le plan social de Ford validé, l’usine de Blanquefort au point mort

Le plan social scellant la fermeture définitive de l’usine Ford de Blanquefort, devrait être officiellement ouvert dès ce mardi. L’absence de communication de la Direction du Travail (Direccte), valant de facto homologation du PSE (plan de sauvegarde de l’emploi). La CGT va l’attaquer en justice. Le conseil régional de Nouvelle-Aquitaine demande la « réquisition » du site.

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Le plan social de Ford validé, l’usine de Blanquefort au point mort

Ce lundi à minuit, heure butoir pour la validation de ce plan, ni le groupe Ford, ni les syndicats n’avaient annoncé avoir reçu de notification de la Direccte, relevait l’AFP. Or le Code du Travail stipule qu’au bout du délai de 21 jours, « le silence gardé par l’autorité administrative (…) vaut décision d’acceptation ou d’homologation » du PSE.

Les licenciements, reclassements et départs en pré-retraite devraient s’accélérer officiellement dans les prochains jours à Blanquefort. Sur les 850 salariés, entre 400 et 500 salariés pourraient être licenciés, avec deux à trois ans d’indemnisations – le PSE représenterait en moyenne 190000 euros par salariés.

Entre 300 et 400 salariés pourraient être éligibles à la pré-retraite, dans une usine à la moyenne d’âge de 51 ans, et quelques dizaines d’autres reclassés dans l’usine voisine GTF, co-détenue par Ford et le canadien Magna.

« La bataille continue », réagit ce mardi matin la CGT Ford, qui annonce sont intention d’attaquer le PSE en justice, devant le tribunal administratif :

« Le gouvernement a baissé les bras (…), il n’a pas utilisé son seul moyen de pression pour faire reculer Ford ou pour lui faire payer cher son départ. Le PSE n’a aucun fondement, aucune justification économique. Tout le monde le sait, tout le monde l’a dit durant cette dernière année. Ce que le gouvernement n’a pas pu faire ou pas su faire ou pas voulu faire, nous allons le tenter. »

Les syndicats espéraient un nouveau rejet du PSE – une première version a été retoquée en janvier par la Direccte -, afin de contraindre Ford à négocier sur l’avenir du site. Mais après le deuxième rejet d’une offre de reprise de Punch-Powerglide, la messe était sans doute déjà dite.

« Ford devra payer »

Rejetant l’idée d’un amendement express à la loi Florange pour imposer à une entreprise bénéficiaire de céder une usine à un repreneur viable, Emmanuel Macron évoquait l’usine de Blanquefort au passé, vendredi dernier lors de son échange avec les élus girondins.

Le président de la République indiquait qu’outre l’indemnisation dont bénéficierait les « anciens salariés » licenciés, l’Etat mettrait en place un « suivi personnalisé pour présenter des offres d’emplois ou des formations requalifiantes » dans la région, où l’industrie a du mal à recruter dans certains secteurs.

Il a évoqué l’exemple de GM&S, à La Souterraine, bien que « 18 mois après leurs licenciements, plus des 2/3 des anciens salariés sont toujours au chômage ou dans la galère de la précarité », selon la CGT Ford.

Entrée de l’usine Ford (SB/Rue89 Bordeaux)

En revanche, Ford devra « payer pour la revitalisation » du site de Blanquefort, assurait vendredi Emmanuel Macron à Christine Bost. La vice-présidente du conseil départemental l’interpellait sur ce qui risque de devenir une gigantesque friche industrielle ; les collectivités demandent à l’État de récupérer le terrain et ses équipements pour un euro symbolique, dans l’espoir de pouvoir les revendre directement à Punch.

Qui veut gagner des millions ?

Réquisitionner est une mauvaise idée, estime le chef de l’Etat, car cette solution exonérerait Ford de ses devoirs pour dépolluer, voire réindustrialiser le site. Dimanche, Bruno Le Maire déclarait au journal Le Parisien avoir demandé 20 millions d’euros au constructeur automobile dans ce but – soit moins que les 22 à 26 millions de subventions publiques versées à Ford entre 2013 et 2018, et même 40 millions d’euros selon les syndicats, qui incluent l’ensemble des aides (CICE, chômage partiel).

Selon Bercy, cité dans le Parisien, Ford aurait annoncé ce mardi qu’il serait prêt à verser ces 20 millions d’euros. Dans un communiqué, le constructeur est plus évasif :

« Lorsque Ford quittera le site de FAI, nous voulons également le faire d’une manière correcte et responsable. C’est la raison pour laquelle nous avons offert un plan social très complet et avons signé une lettre d’intention avec le gouvernement français qui offre un soutien à la revitalisation significativement supérieur aux exigences légales. »

L’entreprise précise néanmoins avoir « offert de transférer le terrain et les bâtiments (dépollués selon les normes convenues) pour 1 euro ».

« Nous donnerons davantage de détails sur notre plan de revitalisation lorsqu’il sera achevé. »

Yaourts

On s’oriente donc vers un transfert provisoire du site aux mains des pouvoirs publics, ce pour quoi plaidaient les collectivités, ou encore Benoît Hamon. En visite ce lundi sur le site de Blanquefort, ce dernier a ainsi défendu une « nationalisation temporaire » de l’usine. Intérêt aux yeux de l’ancien candidat socialiste à la présidentielle :

« Orienter le programme industriel vers les grands enjeux sur lesquels les constructeurs automobiles français se sont engagés avec l’Etat, à savoir ceux de la transition écologique et des véhicules propres. »

Le fondateur de Génération.s estime qu’il n’y a « que la France qui s’interdise » de nationaliser temporairement une usine, et que l’État ne s’interdit pas par ailleurs d’investir dans des entreprises privées :

« C’est assez incroyable, j’entends Bruno Le Maire dire que l’État n’a pas vocation à faire des boîtes de vitesse mais j’observe qu’avec la Caisse des Dépôts, l’Etat est présent au capital de Danone. On fait bien des yaourts, donc on peut bien faire des boîtes de vitesse! »

Ce lundi, le conseil régional de Nouvelle-Aquitaine a, en séance plénière, adopté une motion exigeant la réquisition du site.

Ford avait annoncé en février 2018 son intention de se désengager de Blanquefort, usine de boîtes de vitesse implantée en 1972 aux portes de Bordeaux, qui compta jusqu’à 3.600 salariés, et qui tourne depuis des mois au ralenti. Mais la fermeture devrait impacter l’emploi girondin plus largement, avec quelque 2.000 emplois induits menacés.


#usine no futur

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