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Le tribunal de Bordeaux botte en touche sur la fermeture de l’usine Ford

Le tribunal de grande instance de Bordeaux s’est déclaré ce mardi incompétent à juger du bien fondé économique la décision de Ford de fermer son usine de Blanquefort. Dénonçant un « déni de justice », les salariés de Ford vont faire appel.

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Le tribunal de Bordeaux botte en touche sur la fermeture de l’usine Ford

« On est là, on est là, même si Ford ne le veut pas, pour l’honneur des travailleurs et pour un monde meilleur, même si Ford ne le veut pas nous on est là ». Une cinquantaine de soutiens de la CGT reprend à sa façon l’hymne des Gilets jaunes. Le coeur y est encore – un peu -, même si l’espoir de sauver l’usine de Blanquefort s’amenuise encore un peu plus.

Philippe Poutou espérait du tribunal de Bordeaux une « victoire historique », un jugement contraignant Ford à ne pas fermer son usine de Blanquefort (Gironde), et à la céder à un repreneur. Alors à la sortie du tribunal de grande instance de Bordeaux ce mardi 2 juillet, le leader de la CGT FAI (Ford Aquitaine industrie) et Philippe Brun, l’avocat du syndicat, tentent de cacher leur déception, et encouragent leurs sympathisants en filant la métaphire footbalistique :

« On est à la mi-temps du match et on est menés 1-0, mais il reste une deuxième mi-temps et peut-être la prolongation ».

L’affaire de l’État

Car le TGI, après avoir entendu les deux parties le 4  juin dernier, vient de botter en touche : il se déclare incompétent à juger cette affaire qui relève donc, selon lui, du tribunal administratif.

« C’est ce qu’on craignait le plus, que le tribunal n’ose pas se prononcer sur le fond », souffle Philippe Poutou. C’est « une mauvaise nouvelle », reconnaît Maître Brun :

« Le tribunal n’a pas dit que nous avions tort, qu’il y avait bien une clause économique (dans la décision de Ford), et un abus de son droit de propriété à refuser un repreneur (en l’occurrence Punch, NDLR). Mais il considère que c’est l’affaire de l’Etat, et que cette compétence relève de la justice administrative. Sauf que le Conseil d’État a tranché en 2015 qu’il ne pouvait contrôler la validité d’une clause économique ! »

Appel en septembre

Pour Philippe Brun, c’est là « une position intenable, d’une gravité absolue » : « Si personne n’est compétent, alors qui l’est ? Cela s’appelle un déni de justice et on ne peut pas en rester là».

La CGT et leur avocat annoncent donc qu’ils feront appel, avec à nouveau assignation à jour fixe en septembre, afin d’arracher une éventuelle décision avant le début des licenciements – l’usine girondine de boîtes de vitesse employait 872 salariés au démarrage du plan social, et un certain nombre est déjà parti en préretraite.

« On garde espoir », poursuit Philippe Poutou, qui espère faire reconnaître « le droit à l’emploi » :

« Tout le monde reconnaît que Ford a menti. Et le droit est avec nous, on ne peut pas virer les gens sans motif économique. La justice doit suppléer l’impuissance du pouvoir politique et ne pas laisser faire des multinationales. Une décision favorable pour nous aiderait les salariés de Whirlpool, Ascoval ou General Electrics » menacés par des licenciements.

Guérilla juridique

La CGT, qui attend ce jeudi 4 juillet le jugement de la cour d’appel de Bordeaux sur l’irrespect des engagements de FAI à maintenir 1000 emplois, a par ailleurs entrepris des recours devant le Conseil de l’Europe et devant l’Organisation internationale du travail (OIT), pour des entorses supposées de la France aux normes sociales internationales.

Ces plaintes s’attaquent aux ordonnances de la loi Travail 2, votée en 2017. Celles-ci restreignent à un an (contre 30 ans en 2008) le laps de temps pendant lequel il est possible de contester la réalité du motif économique d’un licenciement, et mettent également en place des barèmes pour l’indemnisation des salariés au conseil de prud’hommes, contestés par la CGT.

Celle-ci dénonce enfin le concept de « cause réelle et sérieuse » à un licenciement économique, en vigueur en France. Il est selon la CGT en contradiction avec l’obligation de présenter « une cause nécessaire », établie par la Charte sociale européenne ou la convention de l’OIT.


#usine no futur

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Photo : SB/Rue89 Bordeaux

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