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Observatoire de l’agribashing en Gironde : « Il faut arrêter de raconter des salades »

La préfecture de la Gironde vient de créer un observatoire de l’ « agribashing » censé lutter contre les « actes d’intimidation et de violence » envers les agriculteurs. Initiative « inutile » pour certaines associations potentiellement concernées, volonté de « museler » les critiques envers une politique dictée par la FNSEA, pour d’autres. L’Etat met aussi en cause les collectivités d’agiter le chiffon rouge, au moment où les arrêtés anti-pesticides de Bègles et Parempuyre vont être attaqués en justice.

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Observatoire de l’agribashing en Gironde : « Il faut arrêter de raconter des salades »

« On ne prend pas les choses dans le bon sens » s’emporte Dominique Techer, porte parole de la Confédération paysanne Gironde.

« Au lieu de faire des choses significatives et engageantes, on prend des décisions qui ne sont pas de nature à apaiser les relations et rassurer la population. »

C’est pour cette raison que son syndicat, invité à la réunion à la Préfecture ce jeudi 19 décembre, n’approuve pas la création de l’Observatoire de l’agribashing.

Cet observatoire, lancé officiellement ce vendredi par la préfète de la Gironde, Fabienne Buccio, réunit les services de l’État, la chambre d’agriculture, les syndicats agricoles et professionnels, « avec l’objectif de disposer d’un état des lieux exhaustif des problématiques de sécurité rencontrées par les agriculteurs et d’élaborer des solutions communes efficaces et concertées ». 

En ligne de mire, « la stigmatisation en Gironde des activités agricoles d’élevage et de vente de produits issus de ce secteur communément appelée “agribashing” ».

« Nuire à l’image du monde agricole »

Ce phénomène est relevé par la collectivité suite « à une multiplication des actes d’incivilité, d’intimidation, voire de violence envers les professionnels en lien avec l’agriculture notamment sous l’action de groupuscules parfois radicaux et violents ».

Afin d’illustrer la volonté de ceux qui veulent « nuire à l’image du monde agricole », la Préfecture prend pour exemple « la réalisation et diffusion en novembre dernier de vidéos tournées sans autorisation au sein d’un élevage porcins de Saint-Symphorien par une association de défense de la cause animale  afin de dénoncer la castration (conforme au cadre réglementaire) des porcelets ou encore les actions des associations animalistes qui ont visé l’abattoir de Bazas quelques mois auparavant ».

« Ça ne servira à rien, rétorque William Burkhar, président de Red Pill, nouveau nom de l’association DxE. Nous avons été quatre fois au tribunal et quatre fois on a gagné. On n’avait même pas cité le nom de l’éleveur de Saint-Symphorien, on a cité la ville et la marque pour qui travaille l’éleveur. Le gouvernement veut faire plaisir à la FNSEA mais les lois sont toujours là. »

Même retour chez l’association L214. Sa co-référente locale, Sarah Rivaux, dénonce :

« Ils cherchent à nous museler parce qu’on veut montrer ce qu’ils veulent nous cacher. »

Criminalisation

La Préfecture de la Gironde s’appuie sur « le cadre règlementaire » des usages dans les élevages, mais également sur les produits autorisés en agriculture et en viticulture pour également souligner le « Bordeaux bashing » en référence à l’image détériorée du vin bordelais après les différentes affaires soulevées sur l’utilisation des pesticides.

« La dénonciation […] par un certain nombre de collectivités ou d’associations est considérée par beaucoup comme le point de départ des difficultés rencontrées par les agriculteurs qui cohabitent avec des zones résidentielles » déclare la Préfecture dans un communiqué.

Valérie Murat, porte-parole de l’association Alerte aux toxiques, prend l’annonce comme « un compliment » et « rigole bien dans [sa] barbe » :

« Nous sommes complètement visés. Ça veut dire que ce que nous faisons vient appuyer là où il faut appuyer. Malheureusement, ça criminalise toutes formes de contestation, tous les lanceurs d’alerte. C’est tout à fait dans l’air du temps. Quand il y a une contestation, il y a une criminalisation. Qu’est ce que ça veut dire agribashing ? La FNSEA a inventé ce terme, c’est un mot valise. On met tout et rien. On dresse les gens contre les autres pour faire croire que la société civile déteste les agriculteurs. »

Prévenir les vols

« Toutes les filières agricoles sont dans une situation catastrophique » reconnaît Dominique Techer. Mais le secrétaire syndical, lui-même viticulteur, prévient surtout de l’imminence d’un « accident industriel à Bordeaux » :

« La filière agricole est dans une situation catastrophique. Les gens sont terrorisés parce qu’ils ne savent pas quoi faire pour survivre. La fin de la récré c’est la sortie des bilans en début d’année. Les banquiers vont suspendre les crédits à court terme. Et donc l’idée est de dire, ce n’est la politique de la FNSEA qui est responsable, c’est l’agribashing. Ils faut arrêter de raconter des salades ! »

L’observatoire entend également lutter contre les atteintes aux biens dans les exploitations agricoles. Le communiqué précise que sur les 10 premiers mois de 2019, 279 faits ont été recensées par le groupement de gendarmerie de la Gironde, « ce qui représente 1,41 % de la délinquance d’appropriation. 137 de ces faits sont des vols commis sur les exploitations (vols de petits matériels, de métaux, de carburants, de produits phytosanitaires voire de récoltes) ».

La cellule nationale de renseignement et de rapprochement judiciaires (DEMETER), créée au mois d’octobre par la gendarmerie nationale, sera sollicitée dans ce cadre.


#Agribashing

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