Le 28 avril dernier, Edouard Philippe, annonçait l’interdiction jusqu’en septembre « de tous les événements de plus de 5000 personnes ». Cela signifiait l’annulation de l’ensemble des festivals de l’été.
Et paradoxalement un certain soulagement pour les organisateurs de grands évènements de la région, jusque là encore dans l’incertitude, puisque l’interdiction courrait jusqu’à mi-juillet. Comment Musicalarue, initialement prévu du 31 juillet au 2 août à Luxey (Landes), ou encore le Reggae Sun Ska, qui devait se tenir du 6 au 8 août à Vertheuil-Médoc, allaient-ils se retourner ? Ces deux festivals drainent respectivement 50 000 et 30 000 festivaliers.
« Nous n’avions aucune visibilité sur les contrainte sanitaires qui auraient pu s’imposer pour un événement d’une telle ampleur dans ce contexte, rappelle Frédéric Lachaize, créateur du Reggae Sun Ska. Il paraissait difficile dans ces conditions de maintenir le festival. »
Les subventions maintenues
Dans un courrier adressé le 22 avril au Premier ministre, Alain Rousset, le président de la Région Nouvelle-Aquitaine, faisait notamment remarquer que l’annonce d’une prolongation de l’interdiction des festivals trop tardive pourrait engendrer des frais supplémentaires pour les organisateurs. L’annulation des festivals par l’Etat étant un cas de force majeure, cela permettait aux organisateurs de se désengager des contrats.
La prolongation officielle de l’interdiction des festivals jusqu’à la fin du mois d’août est ainsi venue limiter les pertes économiques pour les organisateurs. Le Reggae Sun Ska, qui compte plus de 50% d’artistes internationaux dans sa programmation, avait toutefois anticipé, et reporté à l’an prochain son édition.
Les organisateurs de festivals ont pu aussi se réjouir de la décision de la Région Nouvelle-Aquitaine et du département de la Gironde, notamment, de maintenir leurs subventions aux associations, organisatrices de la plupart de ces évènements culturels.
« On compte sur le maintien des subventions des collectivités territoriales, mais aussi sur le soutien des festivaliers qui pourront garder leurs places pour l’année prochaine, indique François Garrain président de l’association Musicalarue. On peut penser que l’on sera à même de repartir sur des événements musicaux dès octobre, il y a aussi des rendez-vous pendant l’année et on espère pouvoir les tenir. »
Relâche et Climax maintiennent le cap
Francis Vidal, le fondateur de Relâche, estime lui que malgré les incertitudes, il est encore possible de faire quelque chose. Il cogite à plein tubes, pour ne pas laisser passer l’été sans musique dans les rues de Bordeaux :
« Relâche c’est un concept, mais il ne pourra pas se faire tel qu’il était jusqu’à présent. On pourra peut-être proposer quelque chose quand même. Des “Siestes souls” en plein air, par exemple, pour permettre aux gens d’écouter de la musique allongés dans l’herbe, méditer et se relâcher. »
Il imagine aussi des « Dancing Street » mais en taille limitée.
Le festival Climax, qui traditionnellement se tient début septembre à Darwin, pourrait lui tabler théoriquement sur une jauge importante si les conditions sanitaires le permettent. Mais ses organisateurs ont tablé sur une formule renouvelée : le festival écolo, artistique et culturel devient « Warning Camp », le camp de l’alerte, sa prochaine édition s’intitulera « Régénérations » et aura lieu du 10 au 20 septembre. Ce sera ainsi une édition rallongée, annonce déjà Philippe Barre, son organisateur, pour qui « il est hors de question que le festival n’ait pas lieu ».
« Nous ici on plaide pour un changement de paradigme. Ce festival est un outil d’alerte et porte des propositions concrètes pour changer notre modèle de société. Préserver la biodiversité, ou encore inciter les gens à manger sainement, c’est aussi comme cela que l’on peut lutter contre une pandémie. C’est aussi comme ça qu’on fait face plutôt que d’attendre les injonctions du gouvernement. »
Au sein de l’écosystème les contraintes sanitaires ont été anticipées depuis longtemps. Des masques et du gel hydro alcoolique ont été commandés dès le 24 janvier. Pour Philippe Barre la conjoncture n’est donc pas un obstacle, sauf concernant les possibilités de mobilité des artistes internationaux.
« On fera venir des artistes nationaux, mais on peut aussi avoir un artiste brésilien présent en Europe qui pourra se produire pour nous. »
Les scènes d’été tentent de se réorganiser
Enfin pour les scènes plus modestes mais néanmoins importantes pour tous les amateurs locaux de musique, les réactions sont variées. Vie Sauvage, qui se déroule à Bourg-sur-Gironde, est annulé, sans plus de précisions.
Le rock indépendant du Black Bass Festival, qui aurait dû se tenir les 28 et 29 août à Blaye, attendra lui l’an prochain et Sylvain Chamu, son organisateur, se résigne à une année blanche. Ce n’est pas faute pourtant d’avoir un temps réfléchi à une édition revisitée :
« On aurait pu envisager une édition qu’avec des groupes français mais il y a trop d’incertitudes notamment sur le plan sanitaire. »
Du côte des 24h du Swing, initialement prévues du 3 au 5 juillet à Monségur, une édition allégée en septembre est en discussion :
« On est dans l’expectative, explique Sébastien Vallier. On aimerait faire une édition allégée aux alentours du 20 septembre mais on ne sait pas encore si ça va être possible. Elle se tiendrait sur 24h seulement, comme c’était le cas pour le festival à l’origine. Seul le Off serait maintenu. On a reporté les têtes d’affiches à 2021. »
Il n’est donc pas impossible que les fans du petit festival jazz puissent profiter à la rentrée des groupes prévus en off sur l’édition 2020 :
« Ce sont essentiellement des artistes jazz de la région contrairement aux têtes d’affiche qui sont des internationaux, on devrait donc pouvoir faire quelque chose. »
« C’est le cœur lourd » que l’équipe des Nuits Atypiques a annoncé sa 29e édition qui devait avoir lieu du 3 juin au 25 juillet 2020 dans 14 communes du Sud-Gironde. « Par solidarité avec les artistes, une partie des événements initialement prévus cet été sera programmée au cours de l’édition 2021 » ajoutent les organisateurs.
Enfin Les Plages Pop, événement festif du Cap Ferret, restent dans le brouillard. Ses organisateurs attendent une validation par la préfecture et la mairie pour proposer un nouveau format qui serait en phase avec les contraintes sanitaires.
L’été s’annonce donc calme en Gironde même si l’on peut espérer quelques belles surprises. Première d’entre elle : l’annonce par le ministre de la culture du maintien de la Fête de la musique, le 21 juin, sous une forme qui reste cependant à déterminer.
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