
Le Réseau Action Climat, l’UNICEF et Greenpeace évaluent dans un rapport dévoilé ce jeudi les premiers pas des maires dans les douze plus grandes agglomérations françaises en matière de lutte contre la pollution atmosphérique liée au trafic routier. « En bonne voie » sur quatre enjeux clés examinés, « en retard » sur les trois autres, Bordeaux peut être encore plus volontaire, jugent-elles.
Pierre Hurmic a reçu sa première « carte de transports » du Réseau Action Climat, de l’UNICEF et de Greenpeace. Après avoir publié avant les municipales un classement des 12 agglomérations françaises, ces associations veillent désormais à la mise en œuvre des politiques des nouveaux maires contre la pollution atmosphérique. Ce au moment où la France a été condamnée par le Conseil d’Etat pour ne pas lutter suffisamment contre un fléau responsable de 48000 morts prématurées chaque année.
Si elles sont « conscientes » qu’une partie des décisions attendues sera débattue à l’échelon métropolitain, les trois ONG relèvent néanmoins que « la ville-centre endosse généralement une responsabilité particulière en matière de lutte contre la pollution de l’air ». D’autant que leurs maires officient aussi à la métropole – celui de Bordeaux en est ainsi le premier vice-président.
Or, indiquent-elles, « les engagements pris pendant la campagne des municipales par le nouveau maire de Bordeaux sont très encourageants pour permettre à la ville d’accélérer sa transition vers les mobilités actives et partagées, avec notamment un programme ambitieux en faveur du vélo et des baisses de vitesses de circulation ».
Elles saluent ainsi l’abandon du grand contournement de Bordeaux, la volonté annoncée de réduire ces vitesses (20 km/h dans les quartiers apaisés, 30 km/h en ville, 50 km/h sur les axes pénétrants, 70 km/h sur la rocade), ou encore la multiplication par 5 à l’échelle de la métropole du budget vélo, qui représentera un investissement de 350 millions d’euros sur 6 ans.
Système vélo performant
Les associations se félicitent que les aménagements provisoires nés de la crise sanitaire soient « pérennisés » – même si le bilan des expérimentations ne sera définitivement tiré que dans quelques mois. Elles applaudissent à « la création d’un réseau d’aménagements cyclables circulaires entre les villes de la métropole (boulevards, intra rocade et extérieur à la rocade) », là aussi propulsé par le plan d’urgence vélo lancé après le premier confinement par l’ancienne majorité à la métropole.
Le trio d’ONG souligne que « l’ensemble des leviers d’un système vélo performant » a été « pris en compte dans le programme » de la Ville et de la métropole bordelaise – offre de stationnement renforcée avec « des parkings relais voitures + vélos », création de stations-service vélo dans toute la ville, formations à l’utilisation du vélo généralisées dans les écoles élémentaires et des vélo-bus « institutionnels » pour les trajets domicile-école… En attendant que tout cela se concrétise effectivement.
Bordeaux et la métropole sont aussi « en bonne voie » sur la « dynamique en faveur des transports en commun », avec la volonté d’améliorer le service de bus et le RER girondin, ou celle d’étendre la gratuité pour les jeunes à faibles revenus ou en cas de pic de pollution.
Les ONG s’avancent toutefois en expliquant que la « tarification solidaire basée sur les ressources a été mise en œuvre en 2020 » – effectivement votée par la précédente équipe à la métropole, elle n’est pas encore en vigueur.
Point d’inquiétude
A Bordeaux, nuancent par ailleurs le RAC, Greenpeace et l’UNICEF, « le principal point d’inquiétude concerne la réduction de la place des véhicules les plus polluants avec l’absence d’engagement concernant la mise en place d’une zone à faibles émissions (ZFE) ».
Ces organisations plaident en effet pour des zones de circulation restreintes aux seules voitures propres, en « visant la sortie du diesel en 2025 puis de l’essence en 2030 ». Sur ce point, la mairie, questionnée par Rue89 Bordeaux, annonce son intention de mettre en place une telle zone à l’échéance 2023, avec des « primes incitatives de remplacement » pour épauler les ménages modestes dans les changements de moyens de transport nécessaires.
Enfin, Bordeaux est classée « en retard » sur les mesures telles que les rues scolaires, « fermées à la circulation aux horaires d’entrée et de sortie d’école, et de manière permanente autant que possible », selon les ONG. La Ville répond qu’une étude a été lancée sur ce sujet « conjointement à la ZFE ».
« A ce jour nous avons terminé l’inventaire de toutes les rues, la ligne au budget est définie, nous entamons maintenant les études techniques pour hiérarchiser les réalisations », indique Didier Jeanjean, adjoint au maire en charge des quartiers apaisés.
Les auteurs du rapport expliquent que leurs « cartes de transports » seront « régulièrement actualisées pour suivre la mise en œuvre effective des engagements pris par les nouveaux maires, ainsi que leur renforcement éventuel ou certains renoncements ».
bien moins par contre du côté du financement des transports en commun en site propre, comme le tram, les futurs RER de province, et rien pour l'aide au renforcement des moyens financiers des établissement publics fonciers pour casser la spéculation foncière et immobilière, génératrice principale de la périurbanisation et de son corollaire:
le flot automobile des salariés automobilistes pendulaires, qui rappelle son existence deux fois par jour sur la rocade...
"nutriscore" qui aurait cependant mérité quelques indicateurs supplémentaires, ceux par exemple qui ne figurent jamais ou réactualisés avec beaucoup de retard dans les recensions d'organismes comme le CEREMA* :
- nombre de lignes de bus des réseaux de transport urbain (TU) bénéficiant de la priorité aux feux de circulation et de site propre, avec la proportion de la présence de ces équipements sur l'itinéraire ;
- état des projets de nouvelles lignes de tram, état de la connectivité du réseau (maillage) et part de la zone urbaine dense couverte ;
- nombre de voyages en TU par habitant et par an dans les réseaux d'agglo ;
- la qualité des cheminements piétons (au-delà des abords des groupes scolaires), avec la marche très souvent comme mode de déplacement principal après la bagnole...
On regrette par contre que l'électromobilité ("aides financières à la transition" ) figure dans la liste des indicateurs :
quelle différence, au-delà de l'amélioration de la qualité de l'air, en termes d'encombrement de l'espace public et du comportement asocial automobiliste, qu'on roule au diesel ou au nucléaire (peut-on parler de "transition" ? )... ?
*https://www.cerema.fr/fr/cerema