Combien Bordeaux Métropole va-t-elle mettre au pot pour GPSO ? 354 millions d’euros fléchés sur les aménagements ferroviaires au sud de Bordeaux, comme l’indique la délibération votée ce jeudi (par 62 voix pour, dont celles des socialistes et du groupe Métropole Commune(s) et 38 contre) ? 605,6 millions, soit la quote-part de la métropole indiquée par le plan de financement en annexe de ce texte, déduction faite du produit des taxes dédiées à la construction des LGV ? Davantage encore ?
Force est de constater que ni la délibération ni les débats du conseil n’ont levé le flou sur la contribution exacte de la collectivité aux lignes à grande vitesse Bordeaux-Toulouse et Bordeaux-Dax. Pour Pierre Hurmic, ce plan de financement, présenté seulement la veille du vote aux élus métropolitains, est même « d’une approximation honteuse ».
Plan bâclé
Et le maire de Bordeaux d’énumérer les « erreurs » et « fragilités » émaillant selon lui ce « plan totalement bâclé » que l’Etat impose « dans la précipitation » au président de Bordeaux Métropole, Alain Anziani. « On nous demande de nous prononcer sur un plan de financement qui est faux », estime son premier vice-président.
Le texte indique par exemple que l’Etat s’engage sur 40% des 14 milliards de GPSO, alors que ces 40%, soit 4 milliards promis par Jean Castex, ne concernent que la première phase (LGV Bordeaux-Toulouse) ; que l’Europe financerait 20% du projet, quand cette aide est une simple hypothèse ; ou encore que les rentrées financières des nouveaux impôts sont calculées aux pifomètre :
« Nous n’avons pas le moindre élément sur ce que sera l’assiette (NDLR : montant servant de base au calcul d’un impôt) de cette taxe sur les bureaux et de la taxe spéciale sur les équipements (TSE), rappelle Pierre Hurmic. On nous dit que cette TSE, votée dans la précipitation le 10 novembre dernier va rapporter 24 millions par an, prélevés sur les ménages et les entreprises au moment où les collectivités locales font des efforts pour maîtriser la pression fiscale. Quant à la taxe sur les locaux à usage de bureaux, elle sera définie dans un prochain texte. Mais on nous dit quand même que ces impôts vont nous rapporter 259 millions d’euros. »
Le groupe communiste s’est aussi élevé contre cette TSE, sans pour autant voter contre ce texte actant la participation de Bordeaux Métropole à l’établissement public local. Celui-ci sera prochainement créé afin de financer le projet de GPSO, via notamment la levée de ces deux impôts, et de conduire les travaux. C’est cette entrée de la métropole dans l’EPL qui a suscité l’opposition des 31 élus écologistes, favorables aux AFSB, mais pas aux LGV.
Affinage
Le maire de Bordeaux s’inquiète par ailleurs d’un « marché de dupes » : que la décision actuelle, qui porte sur la première phase (LGV Bordeaux-Toulouse, aménagements ferroviaires au sud de Bordeaux et au nord de Toulouse) n’impose à la métropole de compenser financer les phases futures, c’est à dire la LGV Bordeaux-Dax.
« Il est convenu que les collectivités ayant participé au financement de la première étape actent le principe d’une solidarité de l’ensemble de ces collectivités pour le financement des deux étapes, et s’engagent à financer la seconde phase lorsque sa réalisation interviendra », stipule le document.
Bordeaux Métropole pourrait-elle donc être sollicitée au delà de son engagement formel de 354 millions d’euros ? Le tableau de répartition précise bien que pour la première étape, sa quote-part sera de 21% du total des collectivités locales, soit 865,2 millions d’euros (moins 30% de fiscalité, soit 605,6 millions) et de 0% pour la seconde étape.
Mais ces proportions risquent d’être amenées à bouger : elles intègrent curieusement des collectivités qui ont soit déjà voté contre une participation à la LGV (département du Lot-et-Garonne), soit ont critiqué les montants exigés (Pyrénées-Atlantique) ou ne se sont pas encore prononcées (agglomérations de Mont-de-Marsan, d’Agen, de Pau et du Pays Basque).
« C’est vrai que j’aurais préféré voté un plan de financement plus affiné, a estimé Véronique Ferreira, vice-présidente aux finances de Bordeaux Métropole. Mais on en est au tout début et on ne pourra participer à l’affinage que si on est à l’intérieur de l’EPL. Si on est à l’extérieur on ne pourra pas s’occuper de gouvernance. »
Obscure clarté
« L’engagement est clair », plaide Alain Anziani, répliquant aux critiques de Pierre Hurmic sur le manque de clarté entre les différentes sommes avancées :
« On donne un chiffre, 354 millions d’euros, et on renvoie à un plan de financement avec peut-être des dépenses supplémentaires, mais aussi des recettes supplémentaires de péages », qui pourraient représenter 1 à 1,7 milliard recettes pour Bordeaux-Toulouse.
Mais à droite aussi des poids lourds de la métropole se sont élevés contre la méthode et l’intérêt même de GPSO. « Un projet inutile, dispendieux, bancal et inabouti », selon le maire de Pessac Franck Raynal. « Un non sens budgétaire et économique », affirme la sénatrice Nathalie Delattre, qui a tenté de faire rejeter les nouvelles taxes au Palais Bourbon, sans succès.
« Il y a encore quatre ans, on nous parlait d’un plafond de 10 milliards d’euros, nous en sommes désormais à 14 milliards alors que nous savons déjà que l’enveloppe des expropriations et des études environnementales sont sous-estimées. Nous aurons donc de nombreuses clauses de revoyures », prédit l’élue radicale bordelaise.
Mais la grande vitesse quand on aime, on ne compte pas.
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