La décision est scellée : le nouveau centre de rétention administrative (Cra) de Bordeaux verra le jour sur une parcelle du Bioparc, à Mérignac, entre la rocade et le cimetière intercommunal. Ce vendredi 8 juillet, lors du conseil de Bordeaux Métropole, 64 élus se sont prononcés pour la cession de ce terrain à l’Etat, contre 36.
Pour autant, ce projet de construction continue de susciter de vives oppositions, à l’images des quelques dizaines de militants du collectif antiCRA qui ont manifesté devant l’hôtel de métropole. Sans se faire d’illusions sur l’issue du vote, Pauline Racato, de la Cimade, espère néanmoins un débat, soulignant que le fait que la politique migratoire dépende de l’Etat « n’a jamais empêché certains élus locaux, à Calais ou ailleurs, de prendre des positions fortes ».
« La France est le pays qui enferme le plus les étrangers simplement parce qu’ils n’ont pas les bons papiers ou parce qu’ils ont de plus en plus de difficultés à obtenir des visas, il est faux de dire comme l’a fait le maire de Cenon qu’on enferme en CRA des délinquants. Et la France a été condamnée par la cour européenne des droits de l’Homme pour traitement inhumain et dégradant d’enfants dans les centres de rétention. »
L’échange de parcelles, cœur du débat ?
« C’est une décision de l’Etat et elle s’impose à nous », commence pourtant Christine Bost, vice-présidente de Bordeaux Métropole. Pour une partie de la majorité, ce vendredi midi n’était ni le lieu, ni le moment pour débattre sur la politique migratoire du gouvernement. Si « les Cra sont contestables », les délibérations du jour « ne portent pas là-dessus » mais sur « un échange de parcelles », peut-on entendre dans l’assemblée.
Ainsi, de nombreux élus brandissent l’argument de l’application de la loi. A l’instar d’Alain Anziani, président de la Métropole et maire de Mérignac, qui porte le projet de construction.
« C’est un dossier où je n’ai que des coups à recevoir mais j’ai tenu mes positions car j’ai un sens républicain profond. Quand on est républicain, on applique les lois », se défend l’avocat de profession.
Un vote « entaché d’illégitimité »
Un raisonnement « simpliste » pour Philippe Poutou (Bordeaux en luttes) qui dénonce avec d’autres élus de l’opposition le principe même de tels centres et les conditions « indignes » d’enfermement. Selon eux, la question de la rétention de personnes étrangères en situation irrégulière dépasse celle du simple choix d’un terrain, le vote d’une telle délibération cautionnant la politique migratoire du gouvernement.
« Les Cra sont inutiles et inhumains. Notre responsabilité d’élus est de défendre les valeurs de la République et d’assurer à toutes et tous le respect des droits fondamentaux. Et non de nous substituer à l’Etat pour favoriser, accompagner, faciliter la construction d’un Cra », déclare Laure Curvale, élue Écologie et solidarités, pour qui le vote du jour est « entaché d’illégitimité ».
« Pour nous c’est inenvisageable de soutenir une décision qui facilitera l’enfermement des nourrissons, des femmes enceintes, des enfants », abonde Sylvie Cassou-Schotte, adjointe au maire de Mérignac et vice-présidente de Bordeaux Métropole (EELV).
Un Cra, dans tous les cas
Les écologistes rappellent en effet que ce projet prévoit « la création de ”chambres familiales” permettant la rétention de familles entières, là où le centre actuel de Mériadeck – faute de logistique suffisante – ne peut retenir que les hommes. » La durée d’enfermement maximale sera elle portée à 120 jours, contre 45 aujourd’hui.
« Ne pas voter pour le Cra sur ce terrain, c’est voter pour le Cra à la sortie 13 », prévient Véronique Ferreira, vice-présidente à la délégation des finances de Bordeaux Métropole, qui se dit « personnellement contre les Cra ».
Or, à la sortie 13 de Pessac, l’implantation initialement prévue du Cra posait problème du fait de sa proximité avec une zone pavillonnaire. Pour le maire de la commune, Franck Raynal, le vote du jour est celui « d’une implantation plus intelligente et plus respectueuse des habitants et de notre environnement ».
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